Maturite organisationnelle des organisations publiques et management des connaissances.
Lemay, Lilly ; Bernier, Luc ; Rinfret, Natalie 等
Dans le contexte de decroissance des organisations publiques, de
departs massifs a la retraite et de renouvellement de plus ou moins la
moitie des effectifs, le defi du transfert intergenerationnel de
connaissance et du management des connaissances se pose avec acuite.
Parmi les defis strategiques actuels pour les cadres, que d'aucuns
pourraient voir comme un paradoxe, on note une tentative de conjuguer la
diminution des ressources et la perte de memoire organisationnelle et de
connaissances avec une volonte d'augmenter la productivite,
notamment par les technologies de l'information, ainsi que le
souhait d'augmenter la qualite des services aux citoyens.
Par ailleurs, meme si dans certains cas les ressources financieres
sont presentes, un manque d'expertise sur le plan du management
organisationnel des connaissances pose un defi important dans la mesure
ou l'on ne sait souvent pas comment articuler et developper une
telle demarche.
Une etude recente, (Rinfret et coll. 2010) demontre une grande
difficulte pour les cadres d'arbitrer entre les contraintes en
termes de ressources et/ou de connaissance, et le developpement
organisationnel. De fait, ono gere le plus souvent le transfert des
connaissances entre les personnes de maniere ad hoc et informelle et
tres peu d'efforts sont consentis au developpement du management
des connaissances et du savoir sur le plan organisationnel.
Dans cet article, nous proposons un modele de management des
connaissances base sur des phases de maturite organisationnelle. Dans ce
modele, les types de connaissances transmises, partagees ou generees,
varient selon le niveau de maturite organisationnelle atteint en matiere
de management strategique des connaissances.
Dans un premier temps, nous discutons des notions
d'apprentissage organisationnel, d'organisation apprenante et
d'organisation intelligente, presentes dans la litterature mais non
articulees entre elles. Nous presentons ensuite la methodologie de
l'etude. Les resultats nous permettent de dresser un etat de la
situation dans le secteur public quebecois en matiere de transfert
intergenerationnel et de management des connaissances en posant les
questions : que transfere-t-on? Comment le transfere-t-on? Dans un
troisieme temps, les donnees relatives au contenu et au processus de
transfert et de management des connaissances sont integrees dans le
modele propose, qui articule entre elles les notions
d'apprentissage organisationnel, d'organisation apprenante et
d'organisation intelligente. Nous concluons sur des perspectives de
recherche.
Des approches disparates dans la litterature
Les ouvrages sur le management des connaissances dans une
perspective d'apprentissage fait l'objet d'une
litterature abondante depuis les annees 1980 (Miller 1996; Wang et Ahmed
2003; Karatas-Ozkan et Murphy 2010). Il se definit le plus souvent comme
un changement organisationnel survenu a la suite d'une acquisition
organisationnelle d'experience (Argote et Spektor 2011) et a
travers des processus d'apprentissage individuel et partage dans un
contexte organisationnel (Rashman et coll. 2009). D'un point de vue
managerial, une revue de la litterature existante indique trois grandes
perspectives : (1) l'apprentissage organisationnel percu comme une
approche largement instrumentale ou dominent les technologies de
l'information et des communications, ainsi que les outils ou
mecanismes sociocognitifs. La question d'actualite du transfert
intergenerationnel des connaissances y est le plus souvent associee; (2)
une approche organisationnelle ou l'apprentissage intra et
interorganisationnel est en jeu et ou se pose la question du management,
c'est-a-dire le role des cadres, moins en termes hierarchiques
qu'en termes d'organisation de l'apprentissage du
collectif; c'est l'organisation apprenante par prise de
conscience d'ellememe (mindfulness); (3) et une approche
strategique qui aspire a devenir une organisation intelligente,
c'est-a-dire celle qui est capable de se remettre en question voire
de se reinventer, grace a ses processus technologiques et humains qui
apprennent en continu. Faire ce que l'on a a faire n'est plus
separe de l'apprentissage.
L'apprentissage organisationnel : une perspective
instrumentale de gestion des connaissances
Une preoccupation importante concernant les outils et mecanismes
organisationnels d'acquisition, de distribution,
d'interpretation et de memorisation des connaissances que les
individus possedent (Huber 1991) occupe une bonne partie de la
litterature sur l'apprentissage organisationnel (organizational
learning), et particulierement celle concemant le transfert
intergenerationnel de connaissances (voir par exemple, Huber 2001;
Sharifuddin et Rowland 2004; Handzick et coll. 2008; Koskinen et
Pihlanto 2006). La connaissance y est percue comme un objet (Gherardi
2009) que l'on peut manipuler a travers des processus cognitifs (De
Fillipini et Ornstein 2005; Dodgson 1993), sociaux (Gherardi et coll.
1998; Lave et Wenger 1991), comportementaux (Cyert et March 1963) (tous
cites par Rashman et coll. 2009), et aussi techniques et technologiques
(Tuomi 2000; Miller et coll. 2006). Dans le contexte immediat du
transfert intergenerationnel des connaissances, et en particulier dans
le secteur public, on mise d'abord sur les mecanismes et systemes
de gestion de l'information pour le transfert ou le partage de
connaissances dans une optique restreinte de la continuite des services
mais aussi en regard du devenir des organisations publiques (Secretariat
du Conseil du Tresor 2007; Stoyko et Fang 2007; Rashman et coll. 2009;
Snyder et coll. 2004).
Le concept d'apprentissage organisationnel (organizational
learning), lorsqu'il est associe a des processus (Karatas-Ozkan et
Murphy 2010), correspond a la dimension instrumentale de la gestion des
connaissances (Handzick et coll. 2008; Sharifuddin et Rowland 2004). Les
mecanismes et systemes de gestion de l'information pour le
transfert ou le partage de connaissances sont mis en place, et une
gestion des ressources humaines afferentes est aussi requise afin de
gerer et de mettre en valeur le << capital de connaissances
>>. (Brauner et Becker 2006; Koskinen et Pihlanto 2006; Herremans
et Isaac 2004; Zarraga et Garcia-Falcon 2003).
Dans l'optique des boucles d'apprentissage (Argyris 1982,
2003), on peut associer cette perspective a une boucle simple
d'apprentissage avec la recherche des moyens pour resoudre des
problematiques.
L'organisation apprenante : une perspective organisationnelle
du management des connaissances
Le concept d'organisation apprenante (learning organization)
correspond, quant a lui, a la dimension organisee de
l'apprentissage, ou ce ne sont plus seulement les connaissances des
individus, mais la connaissance organisationnelle qui interesse les
chercheurs (Wenger 1998), dans une vision plus strategique de son
developpement (Wenger 2004). La culture et le leadership sont percus
comme des determinants organisationnels de l'apprenfissage des
individus au sein du collectif et du collectif lui-meme (Huber 1991;
Barrette et coll. 2007; Tseng 2010; Schein 1995; Gherardi et Nicolini
2002; Sun 2010; Eglene et coll. 2007; Fernandez et coll. 2010).
On peut ici parler d'une double boucle d'apprentissage
(double loop learning) (Argyris 1982, 2003) avec un questionnement
strategique sur les pratiques et la capacite a detecter et a surmonter
les comportements possibles de defense du statu quo (Argyris 2003), ou
encore d'absorption des nouvelles connaissances (Sun 2010). Il ne
s'agit plus seulement de resoudre des problemes (Weick 2006), mais
aussi de s'interroger sur la justesse ou la pertinence des facons
d'agir et de penser. La capacite des individus--a tous les niveaux
organisationnels--a << preter attention >>, a <<
prendre pleine conscience >> (mindfulness) et a donner un sens
(sensemaking) (Weick et coll. 2005) a ce qui se passe sur le plan de
l'organisation et quant a son environnement (Levinthal et Rerup
2006) permet a l'organisation d'avoir une plus grande
flexibilite d'action, de reactivite, ou de proactivite. Des
intermediaires de connaissance (Cillo 2005) peuvent agir en traducteurs
et vecteurs de cette prise de conscience. La connaissance n'est
plus seulement un objet, en termes de contenu comme dans la premiere
perspective, mais aussi une activite organisationnelle (Gherardi 2009).
L'organisation << intelligente >> : une
perspective ethologique des organisations
Certains chercheurs postulent que les organisations vont encore
plus loin dans la poursuite d'une intelligence. Certains la
percoivent dans une perspective cybernetique grace a une (grande)
capacite d'adaptation aux situations changeantes, celle
d'influencer, voire de transformer son milieu, ou, si necessaire,
de trouver un nouveau << terrain de jeu >> et meme de se
reconfigurer elle-meme dans son environnement, et par sa contribution
(consciemment et resolument) au tout plus grand auquel elle appartient
(Schwaninger 2000). Ce dernier element est particulierement opportun
dans le cas des organisations publiques car l' <<
organisation >> qui produit le service public est constituee, en
fait, de plusieurs organisations interreliees : politiques,
ministerielles et organisationnelles. La perspective de
l'organisation publique intelligente devrait etre alors synoptique
(Tsoukas et Chia 2002), et meme neuronale, au sens de l'ethologie
humaine, en sachant qu'un cerveau humain a besoin des autres
humains pour se developper (Cyrulnik 2006).
Il s'agirait d'une organisation qui a integre des
processus technologiques (au sens large), capables d'apprendre (Zhu
et coll. 1997), ou des pratiques transformationnelles (pas seulement de
leadership). Pour etre transformationnelle, une pratique requiert des
praticiens de la creativite (Weick 2006; Clegg 1999), du leadership
(Wright et Pandey 2009; Boyatsis et Van Oosten 2003), et mieux encore,
une capacite a revoir le paradigme qui la sous-tend (Tsoukas et Chia
2002). Ce faisant, une capacite et une imagination constamment en action
(Weick 2006) pour exister et interagir avec son environnement
caracterise l'organisation intelligente qui ne se contente pas
d'etre seulement reactive et de resoudre les problemes au fur et a
mesure (Clegg 1999), mais qui reflechit en continu et contribue a
l'evolution de son environnement, voire lui donne forme
(Schwaninger 2000). Mais il est parfois difficile d'exercer son
imagination dans une bureaucratie, compte tenu qu'elle fonctionne
dans des categories fixes (normes, regles), donc en fonction du passe,
plutot que de contribuer activement a creer l'avenir. Il y a
cependant de l'espace pour l'imagination creatrice, a
commencer par le developpement d'une plus grande capacite a
concilier les logiques politico-administratives et interprofessionnelles
concernees par la meme pratique (Riege et Lindsay 2006) et par le
dialogue reflexif (voir Gherardi et Nicolini 2002). Chacune des
organisations serait alors concue comme autant de neurones en connexions
synaptiques pour une intelligence du service public rendu, et en
relation plus cybernetique que hierarchique. Il ne s'agit plus
d'outils ou de mecanismes qui s'ajoutent aux activites, mais
des pratiques elles-memes qui sont porteuses de connaissance (Gherardi
2009). Dans la premiere perspective, la boucle simple
d'apprentissage permet de resoudre un ecart par rapport a une norme
avec les pratiques actuelles.
Dans la seconde perspective, la double boucle d'apprentissage
permet de revoir les pratiques reliees a la tache. Dans la troisieme
perspective, une troisieme boucle d'apprentissage permet de voir la
pratique comme etant celle du service public a rendre par un systeme
d'unites organisationnelles reliees en connexions synaptiques pour
un apprentissage du systeme dans sa totalite.
Des perspectives evolutives dans la realite
<< Knowledge is a polite word for dead but not buried
imagination. >> (Cummings 1953, cite par Weick 2006).
Nous proposons que ces trois perspectives sont, en fait,
consubstantielles et evolutives en pratique et qu'elles peuvent
s'integrer dans des phases de maturation organisationnelle.
Considerer la connaissance comme un objet, puis l'integrer comme
une activite et enfin la concevoir comme une pratique est chose possible
dans une optique de maturation organisationnelle.
Methodologie de l'etude
Les cadres de la fonction publique quebecoise ont ete cibles pour
la recherche exploratoire, car cette population connaitra une vague de
departs massifs a la retraite, avec pres de 40 % de departs des
effectifs, la moitie d'entre eux etant des cadres (Gouvernement du
Quebec 2007, cite par Rinfret et coll. 2010). Ces derniers representent
donc une categorie vulnerable en regard du transfert des connaissances.
Six groupes temoins composes de huit cadres en moyenne ont ete
constitues. Pour chaque groupe de cadres une liste de six questions
ouvertes a ete preparee (voir Annexe 1). Les seances ont dure en moyenne
trois heures et toutes les discussions ont ete enregistrees, puis
retranscrites et presentees par la suite aux participants pour
validation. La participation etait volontaire et l'anonymat ainsi
que la confidentialite ont ete garantis aux participants. En tout,
cinquante cadres ont participe, dont onze retraites, vingt-trois de
niveau 3 et 2 et seize de niveaux 4 et 5. Les cadres<< de niveau 2
sont des directeurs generaux alors que les cadres de niveau 4 occupent
habituellement le premier niveau de gestion. Ce sont les deux niveaux
principaux. Les cadres de niveaux 2 et 3 gerent des cadres alors que
ceux des niveaux 4 ou 5 dirigent des equipes de professionnels. Parmi
les repondants, vingt-deux etaient des femmes et vingt-huit etaient des
hommes. Ils travaillent ou ont travaille dans dix-neuf differents
ministeres ou organismes publics quebecois et, pour ceux ayant pris leur
retraite, celle-ci etait effective depuis un peu plus de trois ans
(Rinfret et coll.). Les groupes temoins ont ete constitues afin
d'etudier comment les anciens cadres qui sont partis a la retraite
voyaient le transfert intergenerationnel de connaissances, comment les
cadres actuels voient ce qui doit etre fait et ce que les nouveaux
cadres esperent recevoir.
L'analyse de contenu (Thietart et coll. 2007; Duriau et coll.
2007) a ete utilisee pour mettre en lumiere un portrait de la situation
actuelle, ainsi que le contenu du transfert de connaissances et la
maniere dont cela etait fait ou pourrait se faire. Par la suite, un
corpus d'articles a caractere scientifique portant sur le concept
de maturite organisationnelle a ete analyse, puis adapte pour lier le
management des connaissances avec des phases de maturation.
Etat de la situation
Du transfert des connaissances ...
Une gestion du personnel en difficulte
Les resultats de l'etude exploratoire indiquent que les cadres
des organisations publiques rencontrent de nombreuses difficultes,
notamment : la mobilite et les changements incessants du personnel,
combines a la decroissance des effectifs, l'embauche de personnes
sous contrats, lorsque possible, pour tenter de contrecarrer la
surcharge de travail; des services de ressources humaines debordes par
les questions consequentes a la decroissance des effectifs : gestion
previsionnelle des effectifs avec la determination des profils de
competences, l'elaboration de politiques et de mecanismes de
transfert des connaissances, en plus du soutien et du suivi; les
problemes accrus de sante mentale; la difficulte de combler les postes
etant donne les qualifications et les competences recherchees jumelees a
des conditions de travail souvent non competitives avec le secteur
prive, ainsi que la difficulte a retenir le personnel competent.
On reconnait par ailleurs que le transfert des connaissances depend
le plus souvent d'initiatives personnelles. Le transfert des
connaissances liees a la tache semble relativement facile a faire, cela
lorsque la pratique a ete documentee et/ou que la personne qui quitte le
poste a le temps d'accompagner suffisamment longtemps la personne
qui lui succede.
Toutefois, les pratiques en la matiere demeurent generalement peu
documentees et le doublage de postes continue d'etre marginal. Dans
ce dernier cas, le partage d'experience impliquant les
connaissances implicites, voire tacites (Frappaolo 2008; Loon Hoe 2006;
Li et Gao 2003), ne peut se faire. Neanmoins, cette situation n'est
pas toujours percue comme negative lorsqu'elle permet
l'exercice d'une nouvelle creativite et la decouverte de
nouvelles facons de faire chez le nouveau cadre ou le nouvel employe.
Dans tous les cas, cependant, cela entraine des delais et une perte
temporaire de productivite.
Neanmoins, si la pratique actuelle de transfert des connaissances
est surtout le fait d'initiative personnelle des individus en ce
qui concerne leur tache, le transfert de connaissances demeure percu
comme etant une responsabilite organisationnelle.
... au management des connaissances
Des cadres inquiets
Les cadres d'organisations publiques se disent inquiets par la
perte de memoire organisationnelle et des connaissances, notamment
implicites et tacites. Neanmoins, ils sont le plus souvent occupes a
gerer les operations au quotidien et la menace, bien que sentie, demeure
encore intangible. Ce faisant, la strategie en matiere de management des
connaissances est absente ou n'est pas claire et le calcul
couts-avantages n'est pas fait, du moins pour le moment; en fait,
l'on croit que les couts seront importants, notamment parce
qu'il faut engager des retraites ou des individus a l'externe
pour realiser une partie du travail, ou encore a cause des consequences
dues aux delais de prestation des services, sans compter les problemes
relies a la sante au travail. Mais le calcul ne se fait generalement
pas. Pour l'un des repondants de l'etude :
Ce qui arrive, c'est que d'un cote, il y a des dossiers
qui passent d'une main a une autre, mais il y a aussi des coupures.
Donc, tu te retrouves avec deux fois plus de dossiers, tu ne peux pas
remplacer le poste et tu n'as pas l'expertise de l'autre.
Mais les autorites te disent: << Tu dois faire du transfert de
cormaissances, (alors) assure! >> Il y a une dissonance de plus en
plus forte qui se cree et a un moment donne, il faut que je fasse tomber
des pans de murs. Les autorites veulent que tu en fasses plus, on veut
que ron monde soit en sante malgre les heures supplementaires ... ce
n'est pas viable.
Meme dans le cas des cadres, la transmission sur le plan managerial
des savoirs implicites et tacites lies a l'experience apparait
difficile, etant donne le nouveau contexte de forte decroissance qui est
lie, paradoxalement, au souhait du gouvernement d'ameliorer
davantage la qualite de prestation des services. Mais le discours sur
l'amelioration de services demeure inoperant dans bien des cas en
attendant les ajustements de parcours. << Les gestionnaires sont
pris dans des chantiers pour stabiliser les structures [et] ils doivent
developper des plans de mesure, des plans directeurs [pour assurer la
suite]. >>
On releve aussi une preoccupation concernant le developpement de
capacite de l'organisation a reflechir par elle-meme, autrement
dit, de developper des outils et des mecanismes qui rendent les
organisations moins dependantes des individus (mobilite et decroissance
des effectifs), mais qui les encouragent aussi a s'engager envers
l'organisation et la prestation de service public. On denote aussi
une preoccupation concernant le bien-etre des fonctionnaires et le sens
de leur engagement, qui serait lie a la confiance en soi, en
l'organisation et au plaisir d'y travailler. Cependant, pour
l'heure, la responsabilite de gerer le transfert des connaissances
semble incomber aux services des ressources humaines. Bien que deja
debordes, ils doivent, ou devraient, developper des competences en la
matiere tout en gerant les autres difficultes liees a la decroissance du
personnel, la dotation et la retention, ce qui est un defi difficile.
La gestion de l'information, ainsi que les technologies
afferentes, semblent encore peu connues et cet etat de fait apparait
problematique dans le contexte ou il y a une volonte gouvernementale de
miser sur les technologies de l'information et des communications
(TIC). Cependant, les ressources (financieres, humaines, et en controle
de la qualite) font defaut, l'on souhaite innover dans la
prestation de services publics, tout cela en tenant compte des
caracteristiques des nouvelles generations de travailleurs. <<
Est-ce que l'on veut perpetuer les choses ou faire du changement?
>>, questionne l'un des cadres.
Les cadres percoivent une necessite et une urgence sur le terrain
de gerer les connaissances et leur transfert, mais la mise en oeuvre
organisationnelle connait des rates, faute de strategie, de leadership,
de connaissances ou de moyens (outils et ressources).
Que transfere-t-on?
Trois elements caracterisent le contenu des connaissances a
transferer : le caractere explicite et implicite des connaissances
(Frappaolo 2008; Loon Hoe 2007), le contexte, et la culture qui implique
un savoir souvent tacite (Li et Gao 2003; Glisby et Holden 2003).
Les connaissances explicites, ou formelles, correspondent a
l'expertise et a la tache et sont les premieres visees par le
transfert. Elles sont de type instrumental. Les analyses de
vulnerabilite seraient considerees comme un prealable souhaitable, sinon
necessaire, pour identifier les postes ou fonctions a risque de perte de
memoire ou de connaissances. Toutefois, la documentation, bien que
necessaire, presente un risque certain d'infobesite et/ou le risque
de ne pas etre consultee, faute de temps ou d'organisation de
l'information facilitant l'acces ou faute d'etre percue
comme ayant une valeur ajoutee. Par consequent, les questions de forme
et de contenu se posent a ce chapitre :
Chez-nous, on a demande aux personnes de beaucoup documenter sur le
site du reseau, mais on s'est rendu compte que personne ne lisait
les documents : peu de gens, dans le feu de l'action, sont prets a
lire beaucoup de documents.
Lorsque l'on documente, il ne faut pas negliger de parler des
lecons apprises.
Outre la documentation des taches, jugees necessaires mais peu
conviviales dans la forme et selon le contexte, ou encore la redaction
de cahiers de reference pour cadres qui veulent un outil pour aider les
employes dans leur effort de transfert de connaissances, le fait de
soutenir des mecanismes d'echanges interpersonnels est aussi
considere comme important sur le plan instrumental du transfert des
connaissances. On pense aux cercles de legs, au co-developpement, au
mentorat, au coaching ou encore aux communautes epistemiques,
strategiques ou de pratique, ainsi que les echanges hierarchiques de
connaissance comme etant des moyens privilegies. On y ajoute des
mecanismes de gestion comme le doublage de poste, les analyses de
vulnerabilite, le partage de dossiers en gestion conjointe ou
complementaire, pour briser les silos, ou encore la cartographie des
connaissances et du reseau social de certains postes comme moyens de
gestion des connaissances.
Si les connaissances explicites touchent au contenu de la tache et
aux procedures afferentes, les connaissances implicites, plus
informelles, touchent quant a elles a la pratique, c'est-a-dire a
la facon dont les choses se font, les comportements, et une sorte de
mode d'emploi non ecrit et qui est teinte par la personnalite des
individus (idiosyncrasie) (voir Frappaolo 2008; Li et Gao 2003).
Contrairement aux connaissances tacites (au sens donne par Polanyi
1966), les connaissances implicites peuvent etre codifiees, mais
requierent un exercice d'analyse des pratiques (Frappaolo 2008). La
qualite des interactions entre les unites ou entre les personnes
d'une meme organisation, de meme que l'arrimage
politico-administratif changeant selon le sous-ministre en place,
apparaissent comme les principales preoccupations au chapitre des
connaissances implicite :
C'est important de connaitre la dynamique : les contacts,
comment interagir avec les personnes cles, le climat, les equipes, les
relations avec les gestionnaires. Cela permet de se proteger et de faire
attention a certaines choses. C'est le 'how to'; (...)
des trucs qu'on apprend avec l'experience comme gestionnaire,
pas des choses qu'on apprend dans les livres.
La question de savoir s'il faut connaitre, ou non, l'etat
des relations entre les personnes est partagee. Certains apprecient de
connaitre << les pieges a eviter, les facons de faire et de ne pas
faire >>, de connaitre << le passe de sa nouvelle fonction
>>, ou encore << de se faire accompagner par son patron pour
decoder les enjeux >>. D'autres considerent preferable de
batir sa propre opinion et d'entamer les relations a neuf, d'
<< avoir les faits non teintes de perception >>, et de
pouvoir exercer << son jugement personnel >> sans etre
influence :
C'est un privilege quand on arrive, on a un agenda vide.
C'est le temps de prendre des rendez-vous avec differents
gestionnaires pour entendre, pour parler, avant de pointer des gens dans
l'organigramme. [Mais] cela aide de connaitre et de creer le
reseau.
Il faut transferer la tache mais pas son opinion personnelle, car
il faut laisser a la nouvelle personne son propre defi a relever.
On considere parfois que << pour certaines personnes, il vaut
mieux qu'il n'y ait pas de transfert comme tel, cela pour lui
permettre de creer, d'innover, pour ne pas [leur] donner de mauvais
pli. >>
Il faudrait savoir ce qu'on veut transferer.
On veut leguer des equipes de travail mobilisees et dynamiques,
autonomes et qui s'entraident, des gens polyvalents, en mesure de
comprendre les enjeux pour aider le gestionnaire.
Ces resultats indiquent qu'en matiere de connaissances
implicites, une ethique de la gestion et du transfert des connaissances
apparait comme sous-jacente a l'apprentissage par
l'experience. Comme les relations interpersonnelles sont de nature
subjective, l'information factuelle sur les evenements et sur les
actes, davantage que sur l'opinion d'une personne envers une
autre, ressortent comme etant davantage souhaitables. Un leadership de
type participatif (Rosenberg et coll. 2010) impliquant une telle ethique
peut alors favoriser les echanges entre les personnes.
Le contexte du transfert de connaissances, et a fortiori, celui du
management des connaissances, demeure en questionnement : que faut-il
transferer, ou pas? Les attentes ne sont pas toujours exprimees,
certaines facons de faire doivent changer ou encore les personnes ne
sont pas outillees, ou bien ne sont pas encouragees a le faire, ou
encore ne le souhaitent pas; par exemple, dans le cas cite du contexte
de decroissance, lorsque les personnes ont pratiquement toujours
travaille en periode de croissance.
Par ailleurs, bien qu'il y ait une connaissance implicite,
voire relativement explicite de la culture organisationnelle, elle est
le plus souvent de l'ordre du savoir tacite, c'est-a-dire
fortement ancree, au point ou les personnes ne sont pas en mesure
d'en parler de maniere consciente et deliberee (Polanyi 1966).
Certains font alors reference au paradigme qui sous-tend la philosophie
de gestion. Cette derniere devient cependant plus explicite
lorsqu'elle se nourrit de l'actualisation des valeurs
organisationnelles dans la gestion quotidienne: Ce qu'on veut ne
pas leguer, << Moi, ce que j'essaie de defaire, c'est de
controler au lieu de servir >> [...] << Il faut leguer le
gout de changer et de servir; servir la societe, l'aider a se
developper. >>
Il ne s'agit pas necessairement de transferer ce qui existe,
mais de profiter de l'occasion pour innover et creer de nouvelles
competences. Cependant, la transition ne semble pas toujours facile:
<< La culture gouvernementale est axee sur la modernisation et les
coupures mais avec le meme niveau de services. Donc, on developpe des
maladies mentales; mon ministere est comme ca. >>
Ainsi, a la question << Que transfere-t-on? >>, on fait
generalement l'hypothese que le transfert de connaissances est
necessaire; mais, sur le plan du contexte et de la culture
organisationnelle, qu'ils soient gouvernemental, ministeriel ou
d'une entreprise publique, l'exercice du jugement dans une
forme de leadership apparait approprie. Toutefois, actuellement, la
strategie et les criteres d'un tel exercice sont absents.
Qu'est-ce que l'on veut construire? Quelle est la vision
d'avenir? La reponse a de telles questions apparait necessaire pour
dissiper le flou qui masque parfois les modes de pensee et d'action
actuels en regard des modes de pensee et d'action a venir. En
d'autres termes, le diagnostic et le pronostic restent a faire pour
degager une vision constructive de l'avenir; ou bien, s'ils
existent deja au sein du gouvernement, ils ne sont pas clairs pour les
cadres et pour les employes du secteur public, qui ont a leur tour de la
difficulte a faire le transfert de connaissances au sein de leur
organisation. L'alignement strategique ne se fait pas et les
organisations n'ont pas encore developpe la capacite a apprendre.
Comment le transfere-t-on?
Si on ne sait pas toujours ce qu'il faut transferer comme
connaissance ou savoir, au-dela de la tache et des faits relatant le
contexte ou illustrant la culture en place, et bien que plusieurs moyens
et mecanismes de gestion soient connus, on en sait encore moins sur le
management des connaissances. On voit au premier chef des conditions de
reussite de la part des dirigeants, mais aussi une problematique
concernant le role des gestionnaires et un manque de perspective
organisationnelle.
On identifie deux grandes categories de conditions presentees comme
propices au transfert et au management des connaissances : une volonte
claire chez les dirigeants accompagnee d'une mise en oeuvre
consequente au discours sur le sujet, et une gestion appropriee du
personnel sur le plan humain.
Dans le premier cas, on percoit la legitimite du processus et les
chances de succes a la mesure de l'engagement des dirigeants dans
le processus. On reconnait ce dernier comme important pour
l'organisation, notamment lorsqu'il est identifie dans le plan
strategique avec des actions et des cibles concretes dans le temps. Ce
faisant, des personnes peuvent etre alors associees explicitement au
processus. Parmi les facteurs de succes identifies en gestion, on
souligne le fait de valoriser les gens qui assurent le transfert, ne
serait-ce qu'en leur accordant du temps pour le faire. Sur le plan
du management strategique et pour assurer la qualite, deux facteurs cles
de succes sont identifies : assurer la perennite de l'experience
(il faut du temps pour acquerir l'experience du poste et de
l'organisation), et faire en sorte d'obtenir des resultats en
termes de performance organisationnelle quant au transfert et au
management des connaissances et du savoir.
J'ai degage des mesures prioritaires et des indicateurs de
resultats et je les ai fait approuver par le ministere. J'ai aussi
identifie les postes strategique dans la structure, et j'ai
signifie que si j'obtenais 'telle chose', je pourrais
faire telle autre, mais qu'autrement, 'telle mesure' ne
pourrait pas etre << repondue >>. J'ai fait le
marketing de cela partout. [L'idee], c'est d'associer les
ressources aux mesures, ce qui est parfait parce que liees.
L'une des problematiques d'importance concerne le passage
de professionnel a gestionnaire (au sens large). On fait souvent
l'hypothese qu'un expert en contenu peut devenir
automatiquement un bon gestionnaire, ce qui n'est pas le cas, car
il s'agit d'un metier en soi.
Lorsque l'on passe de professionnel a gestionnaire, on doit
laisser le professionnel de cote et laisser agir le gestionnaire. On
garde la tendance a reflechir en professionnel, mais le metier de
gestionnaire n'est pas la meme chose. Il faut quelques mois pour
arriver a prendre de la distance. En tant que cadre 3, on travaille en
strategie, ce qui implique de faire travailler les experts en contenu et
de les mettre en valeur. Un probleme existe : on choisit des experts en
contenu pour etre gestionnaires parce qu'ils connaissent le
contenu; mais cela ne veut pas dire qu'ils sont de bons
gestionnaires.
Je suis alle me chercher un coach dans le ministere, un <<
vieux loup >> qui me confrontait, me remettait en question. Je
suis alle me chercher un autre son de cloche dans l'organisation.
Je me considere comme un generaliste alors que ma superieure ne
l'etait pas, alors j'avais besoin d'un autre generaliste.
Je ne voulais pas devenir un specialiste de specialistes, je voulais
rester un generaliste pour continuer a voir l'ensemble de la
question.
Dans l'organisation ou je suis, on est choyes, on a des
rencontres deux fois par annee avec la direction generale. On a aussi
des rencontres de gestionnaires, deux fois par annee. Les chefs
d'equipes en ont. Ca permet la retention et ca facilite le
transfert des connaissances.
En synthese des resultats obtenus, on denote, d'une part,
qu'un leadership assume de la part de la direction quant a la
conduite organisationnelle du management des connaissances est attendu
chez les cadres. Par ailleurs, pour passer de la gestion budgetaire au
management strategique, le management des connaissances (explicites) et
du savoir (implicite et tacite) impliquerait une perspective
organisationnelle qui transcende le caractere instrumental et les
mecanismes de gestion des connaissances jugees necessaires a la
continuite et au developpement organisationnel.
Les resultats de la recherche demontrent une situation jugee
compliquee en pratique par les cadres. Ces derniers voient la necessite
et l'urgence de gerer, et mieux, les connaissances sur le terrain,
mais la mise en oeuvre connait des rates faute de strategie, de
leadership, de competences en la matiere, et de moyens (outils et
ressources). Quelles sont les formes de leadership necessaires a une
telle entreprise? Il n'y a pas, pour l'heure, de strategie ni
de criteres a un tel exercice. On constate des symptomes, mais on ne
connait pas l'etat des lieux en matiere de management des
connaissances (diagnostic) et on semble naviguer a l'aveugle pour
l'avenir (pronostic). Les organisations publiques semblent avoir
besoin de developper leur capacite a apprendre, cela dependant
d'une volonte claire chez les dirigeants accompagnee d'une
mise en oeuvre consequente au discours sur le sujet, et une gestion
appropriee du personnel sur le plan humain. En d'autres termes, la
recherche demontre que le management des connaissances et du savoir dans
les organisations publiques en est au stade de l'enfance de
l'art et qu'il peut gagner en maturite.
Un modele de management des connaissances selon la maturite
organisationnelle
La litterature portant sur la maturite organisationnelle
(Capability Maturity Model) et sur le management des connaissances
(Khatibian et coll. 2010; Bourne 2008; Joslin 2007; Desouza 2006; Martin
et coll. 2005; Chase 2003; Doss et Kamery 2006), propose des phases de
maturation organisationnelle. Nous proposons, quant a nous, une version
adaptee de ce modele pour le secteur public, en tenant compte des
resultats de notre etude. Chacune des cinq phases correspond a un stade
de maturation necessaire pour passer de l'apprentissage
organisationnel a l'organisation apprenante, puis a une
organisation intelligente. Les phases ne sont pas mutuellement
exclusives et se completent au fil de la maturation.
Ce modele presente des phases plutot que des etapes pour temoigner
du fait que la maturation est evolutive dans son tout ou en parties et
que chacune des parties est reliee a l'autre.
Dans la phase << initiale >>, le transfert de
connaissance demeure l'initiative isolee d'individus et il
n'y a pas de leadership en la matiere. Dans la phase <<
procedurale >>, on commence a mettre en place des procedures de
transfert des connaissances liees surtout a la tache et un leadership de
type instrumental a ete assume pour passer de la phase 1 a la phase 2.
On denote certaines preoccupations liees a la strategie
organisationnelle (reflexion, analyse, planification), ou aux strategies
fonctionnelles, notamment en gestion des ressources humaines et en
systeme et technologie de l'information. A ces stades de
l'apprentissage organisationnel, on tente de reduire les ecarts
(voir le single loop model de Argyris 1982; 2003) en regard d'une
situation que l'on considere normale pour effectuer les operations
quotidiennes. Le mode d'apprentissage est analytique et les
processus sont structurels au sens technique et routinier du terme
(Miller 1996).
L'organisation devenue << intelligente >> en est
une qui a developpe une aptitude et une capacite a << apprendre a
apprendre >>, a agir et a reflechir sur ses actions
La conception que les dirigeants et les cadres ont de
l'organisation (Morgan 2006) a une incidence sur la facon de gerer
les connaissances mais surtout sur la synergie organisationnelle a
developper, ou non, a cet egard. Une conception plus classique et tres
presente de l'organisation refere a l'idee de << machine
>> et les politiques comme les gestionnaires (dirigeants et
cadres) misent sur les operations, les structures et une stricte
rationalite economique. Les procedures de gestion des connaissances y
sont privilegiees et les questions de synergie organisationnelle
n'entrent pas, ou peu, en ligne de compte au profit de la
hierarchie. Les deux premieres phases de maturation refletent bien cette
conception mecaniste de l'organisation.
A l'heure actuelle, les resultats de notre etude semblent
indiquer que les organisations publiques quebecoises en seraient le plus
souvent a ces phases 1 ou 2 de leur maturite en matiere de management
des connaissances.
La maturation d'une organisation fait qu'elle passe au
stade d'organisation apprenante (learning organization) avec une
dimension organisee de l'apprentissage. Dans la phase <<
analytique >> (3e), une synergie organisationnelle se developpe,
mais le plus souvent au niveau d'une seule unite de
l'organisation. Les initiatives sont organisees, mais a
l'echelle de cette unite, qui peut alors etre vue comme menant un
projet pilote et pouvant devenir un modele pour les autres unites de
l'organisation. Par la suite, le modele s'etend a toute
l'organisation et on atteint la phase << geree >>. Un
leadership strategique s'ajoute au leadership de type participatif
de la phase << analytique >>. Le mode d'apprentissage
est synthetique et interactif et les processus sont davantage
institutionnalises au sens ou la culture et les valeurs sont
determinants (Miller 1996; Barrette et coll. 2007; Wang et Ahmed 2003).
Ce faisant, une conception plus organique de l'organisation,
qui tient compte de la culture et de la symbolique sur le plan
organisationnel, favorise le management des connaissances (dimension
organisee) et la conduite du changement organisationnel. Le
developpement d'une synergie entre les personnes fait partie des
preoccupations.
Une conception aussi politique tient compte des parties prenantes
et de leurs enjeux (Morgan 2006; Dufour et Steane 2007); elle se traduit
par un sens politique associe au management public, un leadership
associe au devoir d'avis des cadres (voir Lemay 2008, 2009)
conjugue a un sens du management associe aux programmes et politiques
publics. Le management des connaissances se tourne alors vers les
resultats, tant sur le plan politique que sur le plan de la qualite de
prestation des services publics. Une synergie organisationnelle plus
grande s'obtient alors par l'effort managerial de coordination
socio-technique.
Une conception plus strategique de l'organisation (Lemay 2008,
2009) opterait pour une configuration de ces perspectives (Dufour et
Steane 2007). En favorisant les conditions d'apprentissage, le
dirigeant et le cadre misent sur la capacite organisationnelle plutot
que sur les seuls techniques et outils de gestion; ils agissent en
leaders transformationnels (Vera et Crossan 2004) plutot qu'en
operateurs de machine (Lemay 2008, 2009). La connaissance ne se limite
pas aux connaissances explicites, codees ou normees, mais peut etre
percue comme une structure d'idees, de concepts ou de modeles lies
a l'action, ce qui rend discutable l'idee du transfert de
connaissances au profit de l'idee qu'elles sont plutot
recreees dans l'action (Tywoniak 2007). On mise alors sur le
capital intellectuel, et pas seulement sur le capital de connaissances,
ce qui s'aligne avec la perspective <<
exploitation/exploration >> (Match 1991) et la combinaison des
<< boucles simple et double d'apprentissage >> (Argyris
1982, 2003).
L'organisation devenue << intelligente >> en est
une qui a developpe une aptitude et une capacite a << apprendre a
apprendre >>, a agir et a reflechir sur ses actions. La phase
<< optimisee >> (5e) du management des connaissances
implique une attitude marquee par la recherche de sens (le sensemaking
de Karl Weick et coll. 2005: 409), "where meanings materialize that
inform and constrain identity and action". L'organisation est
continuellement branchee sur les interactions internes-externes
(Stonehouse et coll. 1999) et la pensee strategique est liee a
l'apprentissage par la generation de connaissances (Schoech et
coll. 2002; Zhu et coll. 1997). Le leadership est devenu de type
institutionnel, ce qui signifie que le service public en tant
qu'institution est au coeur de l'intelligence
organisationnelle dans son environnement. Les modes d'apprentissage
sont alors constitues comme neuronaux, c'est-a-dire que chaque
unite organisationnelle agit comme un neurone en connexion synaptique,
ce qui permet au systeme entier d'apprendre.
Ce modele est a la fois un outil de diagnostic et de comprehension
du niveau de maturite organisationnelle atteint et a atteindre de meme
que des capacites ou aptitudes a developper ou a acquerir pour repondre
aux enjeux relies non seulement au transfert de connaissances (base
individuelle), mais surtout au management des connaissances (base
organisationnelle) et au management strategique des connaissances (base
institutionnelle).
Conclusion
L'objectif de cet article etait de presenter un modele de
management des connaissances relie a des phases de maturite
organisationnelle, en se fondant sur les resultats d'une etude
exploratoire menee aupres d'une cinquantaine de cadres de la
fonction publique quebecoise. Le contexte de decroissance des
organisations publiques pose avec acuite non seulement la question du
transfert des connaissances entre les personnes, mais surtout celle du
management des connaissances et du savoir sur les plans organisationnel
et institutionnel.
Les cadres publics doivent faire face a une situation encore plus
complexe qu'auparavant etant donne la conjoncture de changements
drastiques, mais aussi du fait que les connaissances ne concernent pas
seulement le passe, mais l'avenir, ce qui pourrait impliquer de
nouveaux types d'organisations (Schwaninger 2000) plus organiques
et intelligentes que mecanistes et repetitives. Dans cette optique, le
modele liant maturite organisationnelle et management des connaissances
que nous avons propose peut se presenter a la fois comme un outil de
diagnostic et de developpement de cette maturation recherchee.
Toutefois, des etudes subsequentes seraient necessaires pour tester
et consolider encore davantage ce modele. Une etude pointue du passage
d'une phase a une autre permettrait de mieux comprendre la pratique
du leadership le favorisant, ainsi que les interactions socio-techniques
et la dynamique organisationnelle necessaires. Il serait aussi possible
de mieux etablir les criteres definissant ce que sont
l'apprentissage organisationnel, une organisation apprenante et une
organisation intelligente. On peut se demander par ailleurs, s'il
est necessaire que toutes les organisations publiques tendent a devenir
apprenantes, voire intelligentes. Quoiqu'il en soit, le
developpement de la gestion des connaissances, et surtout du management
strategique des connaissances, apparait comme une necessite a
l'heure actuelle.
Annexe 1. Les grilles d'entretiens (Rinfret et coll. 2010)
Pour chaque groupe de cadres une liste de six questions ouvertes a
ete preparee.
Les retraites devaient repondre aux questions suivantes :
* Lorsque vous etiez encore a l'emploi dans un M/O, comment
jugiezvous la question de la gestion des connaissances dans un contexte
annonciateur de departs massifs a la retraite?
* Selon vous, quel role l'organisation doit-elle jouer dans la
gestion et le transfert des connaissances aupres des collegues qui sont
susceptibles de quitter leur emploi?
* Au moment de votre depart a la retraite, avez-vous pris soin
d'identifier, de documenter et de transmettre des connaissances que
vous jugiez << critiques >>?
* Dans l'ensemble, jugez-vous satisfaisantes les differentes
initiatives, a la fois personnelles et organisationnelles, qui ont ete
realisees afin de preserver les savoirs susceptibles de se perdre lors
de votre depart?
* Selon vous, quels ont ete les outils et les moyens de transfert
les plus efficaces pour favoriser le partage et l'appropriation des
nouvelles connaissances?
* Qu'est-ce qui a facilite ou rendu difficile les activites
liees au transfert ou si c'etait a refaire, qu'est-ce que vous
feriez et qu'est-ce que vous ne feriez plus lors de la realisation
des activites liees au transfert?
Les cadres 3 et 2 ont repondu aux questions suivantes :
* Selon vous, quel role l'organisation doit-elle jouer dans la
gestion et le transfert des connaissances aupres des collegues qui sont
susceptibles de quitter leur emploi?
* Est-ce qu'il y a des connaissances explicites et tacites que
vous auriez apprecie recevoir lorsque vous avez ete promu a votre
nouveau poste?
* Qu'est-ce que vous pensez des differentes initiatives
organisationnelles qui ont ete realisees en matiere de transfert des
connaissances?
* Avez-vous initie des projets de transfert dans votre unite
administrative?
* Qu'est-ce que vous comptez faire pour poursuivre en ce sens?
* Qu'est-ce qui a facilite ou rendu difficile les activites
liees au transfert ou si c'etait a refaire, qu'est-ce que vous
feriez et qu'est-ce que vous ne feriez plus lors de la realisation
des activites liees au transfert?
Finalement, les questions posees aux cadres 5 et 4 etaient les
suivantes :
* Qu'est-ce qu'on vous a transmis en termes de
connaissances explicites et tacites?
* Qu'est-ce que vous auriez apprecie que l'on vous
transmette?
* Qu'est-ce que vous pensez des differentes initiatives
organisationnelles qui ont ete realisees en matiere de transfert des
connaissances?
* Avez-vous initie des projets de transfert dans votre unite
administrative?
* Qu'est-ce que vous comptez faire pour poursuivre en ce sens?
* Qu'est-ce qui a facilite ou rendu difficile les activites
liees au transfert ou si c'etait a refaire, qu'est-ce que vous
feriez et qu'est-ce que vous ne feriez plus lors de la realisation
des activites liees au transfert?
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Lilly Lemay est professeure a l'ENAP de Montreal. Luc Bernier
est professeur titulaire a l'ENAP. Natalie Rinfret est professeure
titulaire a l'ENAP. Nathalie Houlfort est professeure au
departement de psychologie, Faculte des sciences humaines, a
l'UQAM. Les auteurs tiennent a remercier le Conseil de recherche en
sciences humaines du Canada (CRSH) pour le financement de cette
recherche.
Tableau 1. Maturite organisationnelle et management des connaissances
Phases Description Caracteristiques
Apprentissage organisationnel
1 Initiale Ad hoc. Pas de * Leadership :
processus formel, le absent ou faible.
transfert des
connaissances est a * Methode : peu ou
l'initiative des pas.
individus.
* Outils :
--Demande une [much auto-developpes.
less than ] poussee
[much greater than]
manageriale continue
et significative
pour passer a la
seconde phase.
2 Procedurale Oriente sur le * Leadership :
transfert des instrumental.
connaissances
formelles ou normees * Methode : parfois
et liees a la les 5 phases, mais
tche. tron quees.
--Demande une * Outils : TIC de
poussee base comme des
manageriale continue Intranet, des
et significative bases de donnees
pour maintenir elementaires, des
l'impulsion et grilles d'analyse.
developper une
synergie * Coaching, etc.
organisationnelle.
Organisation apprenante
3 Analytique Analyse des * Leadership :
competences, participatif.
planification de
main-d'eeuvre et * Methode : quatre
gestion de phases sont mises en
carrieres, culture ceuvre, mais la 4
participative en vue (e) en amorce; on
du partage de favorise
connaissances l'information et les
implicites. connaissances pour
une prise de
Analyse de decision
l'environnement strategique.
strategique :
tendances, occasions * Outils :
et menaces, pleinement
positionnement; fonctionnels--
gestion des parties grilles et bases de
prenantes. donnees
sophistiquees et
--Fonctionnel et possible ment
specifique a une interactives, auto-
division, un formation, coaching,
departement. mentorat,
intermediaires de
connaissance
possiblement
identifies, analyse
strategique.
4 Geree Un processus de * Leadership :
management des strategique.
connaissances
strategiques est * Methode : cinq
instaure : phases sont mises en
identification des ceuvre; la phase 5 est
intermediaires de vitale pour evaluer le
connaissances succes.
strategiques a tous
les niveaux de * Outils : graphiques,
l'organisation et des rapports, supports
moyens formels et visuels, profils, etc.
informels de partage Co-developpement, co-
des connaissances. production des
connaissances.
--Les methodes et les
outils peuvent etre
utilises ailleurs
dans l'organisation.
Organisation intelligente
5 Optimisee La conception de l'
[much less than]
organisation[much * Leadership :
greater than] peut institutionnel.
etre etendue au
systeme des unites * Methode : on apprend
organisationnelles des resultats et des
constituantes du donnees comparatives, et
meme service public. on apprend surtout a
revoir les paradigmes
--Une capacite de pour passer d'une vision
reflexion sur le hierarchique et en silos
contenu a une conscience et une
et le processus de vision neuronale de
management des fonctionnement du
connaissances est systeme de service
developpee menant a public.
l'innovation et au
developpement
organisationnel
strategique.
* Outils : auto-
--Toute l'organisation organises: analyse des
est concernee par le ten dances, gestion des
developpement continu risques, etudes com
et a integre paratives et surtout
l'apprentissage management strategique
dans ses pratiques. integrant un partage des
resul tats
d'apprentissage
strategique dans
l'interet superieur
commun.