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文章基本信息

  • 标题:Le regard entrave. Litterature et anthropologie dans les premiers textes sur la Nouvelle-France.
  • 作者:Plante, Jean-Francois
  • 期刊名称:Ethnologies
  • 印刷版ISSN:1481-5974
  • 出版年度:2003
  • 期号:September
  • 语种:English
  • 出版社:Ethnologies
  • 摘要:Paolo Carile est specialiste de la litterature de voyage des XVIe et XVIIe siecles et professeur de litterature francaise a la Faculte des Lettres de l'Universite de Ferrare. Les etudes qu'il a reunies dans ce livre abordent toutes des sujets appartenant a une meme periode, situee entre la Renaissance et la crise du classicisme francais. Il se propose de scruter des pages dont il dit qu'elles sont etiquetees comme mineures du fait qu'elles sont peu connues et peu etudiees.
  • 关键词:Books

Le regard entrave. Litterature et anthropologie dans les premiers textes sur la Nouvelle-France.


Plante, Jean-Francois


Le regard entrave. Litterature et anthropologie dans les premiers textes sur la Nouvelle-France. Par Paolo Carile. (Sillery, Septentrion, 2000, 223 p., index, ISBN 88-7999-268-X.)

Paolo Carile est specialiste de la litterature de voyage des XVIe et XVIIe siecles et professeur de litterature francaise a la Faculte des Lettres de l'Universite de Ferrare. Les etudes qu'il a reunies dans ce livre abordent toutes des sujets appartenant a une meme periode, situee entre la Renaissance et la crise du classicisme francais. Il se propose de scruter des pages dont il dit qu'elles sont etiquetees comme mineures du fait qu'elles sont peu connues et peu etudiees.

Les textes etudies sont tous relatifs a la Nouvelle-France avant 1620, meme si quelques-uns ont ete ecrits par des gens n'ayant pas traverse l'Atlantique. A travers les textes de Lescarbot, Biard et Montchrestien, Paolo Carile tente de cemer comment ces auteurs ont traite l'image du Sauvage nord-americain et comment ils ont percu puis interprete l'alterite extreme du monde amerindien a laquelle les voyageurs francais de la fin de la Renaissance ont ete confrontes. L'auteur termine d'ailleurs sa propre presentation du sujet en amenant quelques idees de base comme l'ambivalence du mythe du Sauvage et decrit les principaux signes de la difference qui s'offraient aux yeux des voyageurs : la nudite, l'anthropophagie, la polygamie et l'alteration du corps. C'est donc un ensemble de mythes et de prejuges, decrits par Carile, qui se porte sur ces differences et qui entrave le regard.

Apres cette introduction, l'auteur procede a une mise en contexte. Carile nous parle des contraintes scripturales et culturelles auxquelles font face les ecrivains de l'epoque. Il s'agit de comprendre comment les gens << regardaient >> et selon quels criteres ils organisaient la realite. On voit comment l'odorat, l'ouie et le toucher ont preseance sur la vue. Le poids de la rhetorique est explique dans son application au genre qu'est le << paysage ecrit >>, cette forme bien encadree de description. De plus, la fonction du voyage avait ete generalement de confirmer l'explication des realites geographiques et ethnographiques proposee par les sources classiques et religieuses. Mais ces voyages outre- Atlantique deviennent de plus en plus des gestes culturels conscients aux objectifs multiplies. Selon que l'on est explorateur ou missionnaire, le regard sur ce nouveau pays change et l'objectif de la description se modifie. En identifiant ainsi les buts que se sont fixes les differents voyageurs, l'auteur nous fait voir comment se fait la transition du paysage classique et quelque peu fictif vers la description plus moderne du paysage nord-americain.

L'ouvrage fonctionne ensuite selon un plan thematique ou les textes etudies, la plupart de Marc Lescarbot, sont compares avec ceux de contemporains comme le Jesuite Pierre Biard ou le Recollet Gabriel Sagard.

Le chapitre deux nous decrit tout d'abord Lescarbot : avocat, poete et surtout homme cultive et curieux de tout. L'auteur veut nous montrer que le voyageur francais est un homme resolument moderne et lucide face a ce nouveau monde qu'il decouvre en meme temps que quelquesuns de ses compatriotes. Pour ce faire, il cite des passages de L'Histoire de la Nouvelle-France puis des Muses de la Nouvelle-France et en profite pour souligner certains mots appuyant ses affirmations. La premiere citation, par exemple, met en evidence la vision neuve qu'a Lescarbot des peuples amerindiens dont il a fait la connaissance. La defaite des Sauvages Armouchiquois et les Adieux, parties importantes des Muses, forment ensuite la matiere principale de ce chapitre. En etablissant une comparaison avec les textes d'auteurs italiens et francais, Paolo Carile montre bien que Lescarbot possede parfaitement le genre de l'epopee et que le sujet ethnographique d'une bataille entre Amerindiens peut devenir un sujet epique, tout en conservant une portee documentaire. De meme, dans les Adieux, certains passages sont choisis pour faire ressortir, par exemple, un climat canadien realiste obtenu quand l'avocatpoete utilise des procedes d'ecriture tels que l'accumulation ou la comparaison. Toutes ces citations et observations aident Carile a affirmer la richesse du monde poetique de Lescarbot. En fait, celui-ci aurait fait entrer le Canada dans la litterature francaise.

Le chapitre trois s'attarde sur le Theatre des Muses, court texte theatral de 243 vers faisant partie des Muses de la Nouvelle-France. La encore, l'humanisme de Lescarbot est mis en valeur. Mettant en lumiere differents elements comme le style soutenu du personnage de Neptune, les passages familiers ou burlesques, de meme que le cote solennel puis festif du spectacle, l'auteur du Regard entrave rattache cette piece hybride a la tradition des << entrees >> royales, ballets et mascarades de cour, tous tres populaires en Europe pendant tout le XVIe siecle et jusqu'au debut du XVIIe. Mais la piece nous est aussi presentee comme un des premiers exemples de texte appuye sur des notions ethnographiques reelles, contrastant ainsi avec l'exotisme fantaisiste des autres textes inspires par la Nouvelle-France. Carile cite entre autres exemples le vocabulaire amerindien exactement reproduit. Il propose plus loin une lecture plus symbolique s'appuyant sur le domaine religieux et fait ressortir les fondements colonialistes presents dans le texte.

Dans le chapitre quatre, l'auteur nous amene a un autre type de texte, ou il nous presente Lescarbot sous un jour different. A travers l'etude de La Conversion des Sauvages, que Carile qualifie << d'information orientee >>, on peut voir comment le voyageur francais est amene a offrir une image manipulee de la realite canadienne dans un but quelque peu evangelique et surtout colonialiste. L'auteur cite a cet effet des passages ou Lescarbot evoque les Gaulois ou le monde classique pour rattacher les tribus nord-americaines a l'histoire occidentale, creant une sensation de deja connu. L'argumentation presente ensuite des donnees aussi bien d'ordre economique que social, laissant voir que le point de vue est ethnocentrique et le regard nettement entrave.

Dans le chapitre suivant, l'auteur nous propose d'etudier La Relation derniere de meme que La Conversion des Sauvages de Lescarbot et la Relation de la Nouvelle-France de Biard. Ces textes illustrent la querelle entre Lescarbot et le pere Biard sur la question de l'evangelisation des Amerindiens. En dressant un portrait, surtout religieux, des deux hommes et du contexte entourant les debuts de Port-Royal, Carile depeint ces << divergences paralleles >> qui les separent. Il montre en fait comment tous deux font disparaitre l'alterite de cet << autre >> amerindien pour le rendre acceptable aux Francais, quoique les deux ecrivains aient des buts publicitaires en France forts differents. Il soumet ensuite quelques cles de lecture etayant ses hypotheses.

Apres une courte section consacree a l'Histoire de la Nouvelle-France, beaucoup moins eclairante sur les contraintes scripturales de l'epoque et ou se melent ethnologie naissante et, a nouveau, rhetorique, Paolo Carile conclut son ouvrage en etudiant un des principaux textes sur les sauvages de la Nouvelle-France redige sans l'experience directe de l'ecrivain. Le Traicte de l'oeconomie politique de Montchrestien (1615) aborde le domaine des explorations outre-Atlantique, alors en pleine expansion. Carile explique longuement les arguments d'ordre commercial qu'utilise Montchrestien pour justifier l'importance de nouer des liens avec les populations autochtones et de tenter l'installation permanente de colons francais. Ces efforts visaient principalement a l'expansion du capitalisme naissant et s'appuyaient aussi sur des motivations sociales.

C'est dans la description des Amerindiens, les montrant comme de << vrais humains >> ayant toutes les qualites pour devenir partenaires commerciaux, que Montchrestien se demarque de l'exotisme litteraire en vogue a l'epoque. Carile suggere qu'il se serait largement inspire de l'Histoire de la Nouvelle-France et donne alors plusieurs arguments ayant trait a la forme, a la perspective ideologique et au vocabulaire.

L'exploration des textes s'appuie sur des instruments hermeneutiques multiples. Selon les cas, l'auteur fait appel a l'histoire des mentalites, a la rhetorique, a l'anthropologie, a l'ethnographie et a l'histoire socioeconomique. Avec ces instruments, Carile nous montre bien l'evolution des modeles descriptifs durant cette periode charniere et nous fait mieux connaitre la sensibilite, l'imaginaire et les structures mentales des Francais de l'epoque.

Chaque chapitre de l'ouvrage est construit avec sa propre demarche interne. Le lecteur qui n'a pas une connaissance quelque peu etoffee de l'histoire sociale, economique et politique de l'epoque pourra parfois se sentir oublie par l'auteur. En ce sens, certaines references a des ouvrages de base seraient necessaires. De meme, plusieurs des raisonnements de l'auteur seront plus parlants au lecteur qui possede les principes de base de la rhetorique. Mais cette etude demeure sans aucun doute tres utile a celui qui travaille sur les debuts de la Nouvelle- France et qui veut bien comprendre la facon dont les grands voyageurs s'exprimaient par ecrit. Il s'agit la d'une tres bonne introduction aux sources du debut du XVIIe siecle.

Jean-Francois Plante

Universite Laval

Quebec
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