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  • 标题:Complexe des musees d'ethnographie et d'ethnologie au Quebec, 1967-2002.
  • 作者:Bergeron, Yves
  • 期刊名称:Ethnologies
  • 印刷版ISSN:1481-5974
  • 出版年度:2002
  • 期号:January
  • 出版社:Ethnologies

Complexe des musees d'ethnographie et d'ethnologie au Quebec, 1967-2002.


Bergeron, Yves


A premiere vue, il peut sembler etonnant d'ecrire qu'il existe un complexe des musees d'ethnographie et d'ethnologie au Quebec. Le mot complexe renvoie d'abord au concept de reseau des musees. Il fait egalement reference au sens qu'on lui donne en psychologie, c'est-a-dire un ensemble de representations et de souvenirs a forte valeur affective, contradictoires, partiellement ou totalement inconscients, et qui conditionnent en partie le comportement d'un individu. Complexe d'Electre (ou du pere) ; complexe de culpabilite (1). Comme on le verra dans la presente analyse, le reseau des musees d'ethnographie apparait complexe a plusieurs egards. Ce titre a double sens permet de faire reference a la fragilite du reseau des musees d'ethnographie et a la crise reelle que ces musees traversent depuis une dizaine d'annees. Mais au-dela de cette crise, que l'on peut bien decrire puisqu'elle est observable, il importe surtout de comprendre ce qui explique cette situation.

Premieres observations de terrain

Pour aborder le sujet des musees d'ethnographie, j'ai choisi de me placer dans la position de l'ethnologue qui observe. Ma pratique de la museologie depuis maintenant quinze ans et mon interet pour l'evolution du concept du patrimoine(2), l'histoire des musees (2002) et le phenomene du collectionnement (1996) m'ont permis d'identifier quatre constats majeurs a partir desquels je propose une relecture de l'evolution des musees d'ethnographie au Quebec de 1967 a aujourd'hui.

Premier constat : le programme d'ethnologie offert a l'Universite Laval a joue un role determinant dans la formation des museologues au Quebec. Consequemment, il faut tenir compte du fait que le programme d'ethnologie a influence considerablement le developpement du reseau des musees et de la museographie originale qui s'est developpee au Quebec.

Deuxieme constar : il existe veritablement une crise des musees d'ethnographie au Quebec comme ailleurs dans le monde. Cette crise s'est amorcee il y a une dizaine d'annees. Au debut des annees 1990, on a constate que les projets concernant les musees d'ethnographie commencaient a susciter de moins en moins d'interet. Cette situation peut sembler paradoxale, car la museologie quebecoise connaissait alors une phase de developpement sans precedent depuis l'ouverture en 1988 du Musee de la civilisation (voir Grandmont 1991 : 56-59) qui peut etre considere comme un musee d'ethnographie. Cependant, il faut se rappeler que le Musee de la civilisation avait demande pres d'une vingtaine d'annees avant de se realiser. Il s'agit d'un long parcours, debutant en 1967 avec l'ethnologue Jean-Claude Dupont qui propose au ministre de la culture du Quebec de creer un Institut national de la civilisation plutot qu'un Musee de l'Homme du Quebec.

Troisieme constar : si on acceptait de ne pas se censurer, on pourrait enoncer sans reserve que les musees d'ethnographie sont en quelque sorte en voie de disparition au Quebec. S'agit-il d'un probleme reel ou d'une simple periode de transition ? Est-ce que ce constat preliminaire s'observe egalement a l'exterieur du Quebec ? Je serais naturellement porte a defendre l'idee d'un passage a vide de l'ethnologie dans les musees. On verra notamment de quelle maniere l'ethnologie a favorise le developpement des musees tout en contribuant a faire disparaitre les musees d'ethnographie.

Quatrieme constat : depuis une dizaine d'annees, on observe notamment que les museologues quebecois n'osent a peu pres plus s'afficher comme ethnologues de formation. Comment peut-on expliquer cette situation alors que l'on sait qu'une large partie des museologues quebecois ont fait des etudes au programme d'ethnologie du Quebec a l'Universite Laval ? On pourrait etayer plusieurs hypotheses pour expliquer ce comportement. Dans un premier temps, on pourrait expliquer que l'arrivee d'un programme de maitrise en museologie en 1987 a provoque une rupture avec le mode de formation traditionnelle en museologie. Alors, comment expliquer que les nouveaux museologues, formes au programme conjoint de maitrise de l'Universite de Montreal et de l'Universite du Quebec a Montreal et du diplome de deuxieme cycle en museologie de l'Universite Laval, continuent tres souvent a se definir en fonction de leur formation de premier cycle ? Ils n'hesitent pas a dire qu'ils proviennent de l'histoire de l'art, de l'histoire, de l'archeologie, des sciences ou des communications. Seconde hypothese : il y a de moins en moins de museologues quebecois ayant recu une formation en ethnologie. Lorsqu'on examine les disciplines d'origine des etudiants de deuxieme cycle en museologie, on constate qu'ils proviennent d'horizons differents et de disciplines diverses. Une troisieme hypothese pourrait etre exploree. Ce quatrieme constat n'est peut etre tout simplement que le resultat des trois constats precedents.

Les musees d'ethnogrophie et d'ethnologie du Quebec en trois temps

De maniere a rendre compte de la situation des musees d'ethnographie et d'ethnologie au Quebec, je propose de poser un regard retrospectif qui permet de mieux comprendre les changements importants observes dans le reseau quebecois des musees d'ethnographie. Ce regard retrospectif debute en 1967, car cette annee marque un tournant dans le developpement des musees au Quebec. Ainsi, j'ai identifie trois periodes marquantes pour les musees d'ethnographie au cours des trente-cinq dernieres annees. La premiere periode debute en 1967 avec le projet du Musee de l'Homme du Quebec et l'analyse qu'en fait Jean-Claude Dupont pour le ministre des Affaires culturelles du Quebec. Cette date cie annonce une periode de developpement du reseau des musees quebecois au cours des annees 1970. On voit alors apparaitre de nouveaux musees regionaux qui s'interessent tout particulierement aux identites regionales et qui constituent des collections ethnographiques. La seconde periode debute avec le referendum de 1980 et se poursuit jusqu'en 1992 avec le congres international ICOM des musees qui reunit a Quebec(3) des milliers de museologues. Enfin, la derniere periode couvre globalement les annees 1990 et confirme les tendances observees au cours des annees 1980.

Premier temps : l'emergence des musees d'ethnographie, 1967-1980

En 1967, le ministre des Affaires cultureUes souhaite doter le Quebec d'un musee national d'ethnologie. Le projet initial du gouvernement du Quebec s'inspire alors du modele du Musee de l'Homme a Ottawa. Le rapport de Jean-Claude Dupont, redige en 1967 pour le ministre des Affaires culturelles, trace un portrait sans equivoque de la situation des musees au Quebec. A cet egard, on peut dire que l'annee 1967 constitue une annee charniere dans l'histoire de la museologie au Canada et plus particulierement au Quebec. L'evenement historique que constitue l'exposition universelle de 1967 a permis de rassembler a Terre des Hommes une multitude de pays. Montreal devient alors le carrefour des cultures. Cette ouverture au monde que represente l'exposition universelle de Montreal est accompagnee d'une periode de changements majeurs dans l'histoire culturelle du Quebec. On observe alors un veritable choc des cultures et des differences. Aux yeux des Quebecois, le monde et les autres cultures ne sont plus simplement des faits divers dans l'actualite, que l'on peut lire dans les journaux ou au mieux que l'on peut entrevoir a la television, a une epoque ou les images nous parviennent encore en differe. Ces autres cultures prennent forme et s'expriment a travers une serie de pavillons thematiques. Les pays participants font alors appel aux plus recentes technologies de communication. Ce ne sont pas simplement des pavillons qui surgissent sur les iles de Terre des Hommes, ce sont egalement des musees vivants(4).

A la suite de cet evenement culturel international, le regard des Quebecois sur le monde ne sera plus jamais le meme. Mais ce qui retient avant tout notre attention, c'est qu'en decouvrant les cultures et les patrimoines du monde, on redecouvre ici le patrimoine du Quebec. Il ne s'agit certainement pas d'un hasard si la loi quebecoise sur les biens culturels elargit quelques annees plus tard, au debut des annees 1970, la notion de patrimoine.

La periode comprise entre 1972 et 1985 constitue sans aucun doute la periode la plus animee pour le patrimoine. La nouvelle Loi sur les biens culturels elargit encore le type d'objets a proteger, en precisant l'archeologie et aussi, desormais, les arrondissements naturels. Les monuments historiques deviennent biens culturels. Plusieurs collections ethnographiques et artistiques font l'objet de classements et de reconnaissances, deux statuts differents que distingue dorenavant la loi (Arpin et al 2000 : 29).

Ce n'est donc pas par hasard que le ministre des Affaires culturelles du Quebec, Jean-Noel Tremblay, fait l'acquisition en 1968 de la collection Coverdale qu'il confie au nouvel Institut national de la civilisation. On retrouve dans cette collection quelque 2 500 pieces d'origine autochtone, europeenne et quebecoise ; cette collection est reconnue pour sa qualite, sa representativite et sa diversite (Dube 1998 : 33)(5).

Portrait des musees au Quebec(6) en 1967

Le memoire de Jean-Claude Dupont s'ouvre sur une page intitulee Avertissement . D'entree de jeu, l'auteur apporte une precision importante : lorsque j'utiliserai le terme musee d'ethnographie, je veux parler du Musee que nous designons a tort sous le nom de Musee de l'homme du Quebec (le fait de specifier du Quebec rectifierait cependant en partie cette erreur) . Dupont donne ensuite quelques definitions de differents types de musees. Cette demonstration lui permet de preciser les distinctions qu'il entrevoit entre le concept de Musee de l'homme et de Musee d'ethnographie. A ses yeux, le Musee de l'homme montre l'evolution humaine vue a travers le monde dans son entier ; ce n'est pas notre musee precise-t-il. En contrepartie, il developpe davantage son point de vue sur le musee d'ethnographie qui, a ses yeux, presente de facon detaillee l'evolution naturelle et le peuplement humain d'un pays donne, en montrant comment les ancetres de ce pays donne ont tire du sol leur subsistance, comment ils se sont groupes pour se defendre et travailler en commun, etc. C'est le Musee de l'histoire d'un groupe d'hommes ; c'est notre musee . Comme on pourra le constater, la question identitaire demeure une preoccupation essentielle dans l'argumentation qu'il developpe.

Malgre cette definition assez enthousiaste de ce qu'est un musee d'ethnographie, Dupont demontre que les musees d'ethnographie, tels qu'on peut les voir en 1967, ont peu d'avenir : Apres confrontation de toutes ces donnees indispensables, il appert que la formule musee d'ethnographie est depassee, pour ne pas dire morte (Dupont 1967 : 1).

Il peut nous sembler etonnant de lire ces propos venant d'un jeune ethnologue. Dupont recueille d'ailleurs, lors de ses entrevues, des expressions qui definissent le musee d'ethnographie tel qu'on le percoit a cette epoque. Il en donne quelques exemples revelateurs : Assortiment de curiosites / Sorte d'amusement sterile / Recueil de debris antiques / Passe-temps pour collectionneurs excentriques / Entrepot de vieux objets poussiereux confies a la garde de conservateurs maniaques / Enterrement de premiere classe, etc. (1)

Ces commentaires recueillis lors d'entrevues dans le reseau des musees quebecois lui suggerent donc la conviction qu'il faut trouver une formule nouvelle pour interesser le peuple a l'etude de la civilisation . Il semble clair, dans l'esprit de Dupont, que la vision de la museologie ne se trouve plus en adequation avec la societe quebecoise de la fin des annees 1960. Ses nombreuses entrevues lui permettent d'ailleurs de conclure que le musee, pour le peuple, c'est encore le sejour des muses de l'Antiquite (1).

Dans son rapport, Dupont exprime un point de vue critique sur les differentes fonctions des musees. Il precise que le Musee, contrairement a ce qu'on dit souvent, n'a pas ete concu pour la recherche. Il suggere plutot que le musee, historiquement, est plutot apparu comme une solution de debarras pour les collectionneurs qui avaient des richesses personnelles, livres, peintures, objets d'art, bijoux, armes, etc. (2). Il ajoute d'ailleurs, a titre d'exemple, qu'au debut du XXe siecle, le Musee national du Canada se donne pour fonction d'etre l'entrepot naturel de tous les objets de valeur scientifique du Ganada (voir charte) (2).

A la lecture du rapport de Dupont, une question se pose : peut-on vraiment parler de musees d'ethnographie en 1967 ? Lorsqu'on prend connaissance du reseau des musees au Quebec a cette epoque, on constate rapidement que les musees prives ressemblent plutot a des cabinets de curiosites. Meme s'ils conservent des collections ethnographiques, ces musees ne disposent pas de programme scientifique ni de programme de documentation des collections. En ce sens, on peut constater qu'il n'existe pas, a la fin des annees 1960, de veritable musee d'ethnographie au Quebec. Tout au plus, on retrouve des musees d'histoire qui accumulent dans leurs reserves des objets temoins de la vie quotidienne et de la culture populaire. Le seul modele que les museologues quebecois connaissent demeure le Musee de l'Homme a Ottawa.

Il faut rappeler que le Musee de l'Homme s'inscrit dans une longue histoire qui plonge ses racines historiques au Quebec. Des la creation de la Commission geologique du Canada en 1842, les geologues prospectent et analysent les ressources naturelles du Canada-Uni (Vodden 1992). Ils parcourent alors le territoire du Quebec et de l'Ontario et ils constituent des collections mineralogiques et geologiques qu'ils exposent dans un musee amenage dans l'edifice de la Commission geologique situe sur la rue Saint Gabriel a Montreal (1852-1881). La Commission geologique offre egalement des collections a des musees et a des institutions d'enseignement. C'est ainsi que l'Universite McGill, le Seminaire de Quebec et plus tard l'Universite Laval recoivent des collections constituees par les premiers geologues canadiens (Bergeron 2002 : 51-72).

Alors qu'ils explorent le territoire canadien, les geologues collectent des objets ethnographiques appartenant a des communautes amerindiennes et inuit. C'est ainsi qu'on a commence a constituer la premiere collection ethnographique au pays. Ces collections scientifiques et ethnographiques de la Commission geologique du Canada sont a l'origine du premier Musee de l'Homme au Canada. C'est dans ce contexte que l'anthropologue Marius Barbeau entre au Musee national du Canada en 1910.

Bien qu'il n'existe pas de veritable musee d'ethnographie au Quebec, le Musee de l'Homme du Canada demeure le modele de reference au pays. Il n'est donc pas etonnant que le ministre des Affaires culturelles du Quebec souhaite creer en 1967 un Musee de l'Homme du Quebec.

Musees d'art et musees d'ethnographie

On peut supposer que Dupont mesure le fosse qui existe a la fin des annees 1960 entre les musees d'art et les musees d'ethnographie. Gerard Morisset avait deja etabli des bases solides pour l'histoire de l'art du Quebec (1981 ; voir aussi Garneau 1979). Les conservateurs des beaux-arts disposent alors d'une meilleure formation. Consequemment, les collections d'arts quebecois se trouvent mieux documentees. Quant aux collections ethnographiques, elles demeurent encore dans le cercle restreint des collectionneurs et des amateurs d'antiquites. A toute fin pratique, on ne trouve pas d'ethnologues de la culture materielle dans les musees quebecois. Les travaux d'ethnologues en culture materielle restent rares. Barbeau a publie quelques ouvrages sur les artisans (1937 ; 1957 ; voir aussi Beland 1985). Par ailleurs, Robert-Lionel Seguin commence a publier des articles et des ouvrages sur la culture materielle quebecoise(7). Mais en somme, tout reste a faire. Cette analyse de la situation des musees conduit Dupont a constater qu'il y a un travail enorme a realiser dans le champ de la culture materielle(8). En fait, il semble que Dupont ne fasse pas clairement la distinction entre musee d'histoire et musee d'ethnographie. Ce qu'il presente comme des musees d'ethnographie, ce sont essentiellement des musees regionaux qui se consacrent a l'histoire et qui conservent cependant des collections ethnographiques.

En ce qui concerne la museographie des musees, il souligne l'etalage statique et permanent qui, dit-il, fatigue les visiteurs. Ses propos a ce sujet sont assez severes :

Un element qui concourt a la faillite des musees d'ethnographie c'est la notion de musee entrepot ou les specimens en permanence fatiguent les visiteurs. C'est l'eternite et la banalite des expositions en permanence (Dupont dans Pichette 2001 : 3).

En somme, il existe a la fin des annees 1960 de nombreux musees d'histoire qui possedent des collections ethnographiques, mais qui ne disposent pas encore du professionnel apte a etudier et a mettre en valeur ces collections ethnographiques. L'Universite Laval forme des etudiants en ethnographie depuis 1944, mais ceux-ci se specialisent plutot dans la perspective du folklore et des traditions orales. Il existe alors un deficit majeur pour la formation scientifique en culture materielle(9).

Pour des raisons personnelles, Dupont quitte l'Institut national de la civilisation dont il a defini les objectifs(10) dans son rapport depose en 1967. L'annee suivante, il integre l'equipe de Luc Lacourciere en etudes canadiennes. Des la session d'automne, Dupont donne un premier cours correspondant a son projet de these consacre a L'artisan forgeron(11) . Rapidement, il prepare de nouveaux cours generaux sur la culture materielle. On entre, au debut des annees 1970, dans une periode d'effervescence. Le programme de folklore s'ouvre alors au secteur de la culture materielle. Ce nouveau champ de recherche permet l'emergence de nombreux travaux sur les objets et les metiers traditionnels. Les ethnologues quebecois investissent un champ qui etait demeure a toute fin pratique vierge. Les annees 1970 marquent un tournant majeur pour les travaux de recherche en culture materielle. Jean Simard, qui faisait egalement partie de l'Institut national de la civilisation, rejoint bientot le programme d'ethnologie. Il apporte une dimension nouvelle a la culture materielle et contribue notamment a donner un souffle nouveau aux travaux de recherche. Parallelement a cette nouvelle orientation du programme d'ethnologie, on constate que le nombre d'inscriptions au programme ne cesse de progresser. De nombreux jeunes etudiants sont seduits par la perspective de l'ethnologie qui offre a la fois un regard anthropologique sur la culture populaire et un regard neuf sur la culture materielle.

Avec un certain recul, les annees 1970 apparaissent aujourd'hui comme l'age d'or de l'ethnologie quebecoise a l'Universite Laval, que l'on designe alors comme le programme d'arts et traditions populaires (Dupont 1997 : 25-48 ; Moussette 1982 : 7-42).

De cette premiere vague d'etudiants, plusieurs jeunes ethnologues se retrouvent bientot dans des musees comme chercheurs, conservateurs et directeurs. Plusieurs ethnologues integrent l'equipe nationale de Parcs Canada a Ottawa alors que se prepare la vaste operation de regionalisation du reseau des lieux historiques. En 1975, on voit apparaitre a Quebec le bureau regional de Parcs Canada qui a la responsabilite de mettre en valeur les lieux historiques et les collections ethnographiques sur l'ensemble du territoire quebecois. Ces ethnologues occupent des postes au service des collections et au service des expositions, dans les equipes d'archeologie et dans les ateliers de restauration. La formation qu'ils ont acquise en ethnologie et, plus particulierement, en culture materielle les prepare bien a travailler avec des collections ethnographiques dans des perspectives d'interpretation et de mise en valeur.

Dans un article publie par l'Institut quebecois de recherche sur la culture, Paul-Louis Martin analyse la production des travaux en ethnographie de 1970 a 1980. Il debute son texte en precisant que l'ethnographie est alors devenue une discipline pleine et entiere qui contribue a la connaissance de l'histoire :

L'ethnographie, source de l'histoire : nul ne peut plus defendre le contraire. Comprendre les manieres de vivre et de produire des groupes humains, connaitre leurs systemes culturels, leurs technologies, leurs structures sociales precede obligatoirement l'interpretation de leur passe, fournie non plus par la seule sequence evenementielle mais aussi par l'explication riche et dense de la vie (Martin 1983 : 149).

Martin demontre l'originalite des travaux menes en ethnographie et notamment dans le secteur de la culture materielle. Il decrit cette effervescence comme

un boom de l'ethnographie ou du patrimoine materiel, ou de l'histoire concrete, comme il plaira de l'appeler, [qui] a constitue ces quinze dernieres annees un developpement sans precedent pour les sciences historiques, l'equivalent -- toutes proportions gardees -- d'une baie James pour le genie technique. Dans ces conditions et dans le contexte d'une administration publique avant tout fonctionnelle, des ecarts etaient et sont encore inevitables. Par ailleurs, les conditions de l'amelioration sensible des approches et des travaux ethnographiques se precisent davantage depuis la creation du centre de recherche qu'est le CELAT. Les disciplines commencent a s'ouvrir davantage les unes aux autres, les recherches s'inscrivent et s'integrent dans un cadre global de la connaissance et finalement plusieurs programmes de travaux aux objectifs clairs ont ete mis sur pied depuis trois ou quatre ans (166).

On ne saurait evoquer cet essor majeur des travaux en culture materielle sans mentionner le cas particulier de l'historien de l'art et ethnologue de l'Universite du Quebec a Montreal, Michel Lessard. En 1971, Michel Lessard publie l'Encyclopedie des antiquites du Quebec. Cet ouvrage, destine au grand public, va connaitre un succes exceptionnel. Reedite a plusieurs reprises, il devient la reference des amateurs d'objets anciens. Un an plus tard, Lessard publie cette fois l'Encyclopedie de la maison quebecoise. Ecrit dans le meme esprit que le precedent, cet ouvrage connait egalement une tres large diffusion. Par ailleurs, Lessard s'associe a des cineastes et produit pour la television des series consacrees au patrimoine quebecois. Pour bien comprendre ce contexte d'effervescence des annees 1970, on doit tenir compte de la contribution de chercheurs comme Lessard qui s'adressent au grand public(12).

Parallelement a cet essor exceptionnel en culture materielle, les annees 1970 marquent egalement une nouvelle phase de developpement pour le reseau des musees quebecois. Le rapport du ministre des Affaires culturelles, Jean-Paul Lallier, publie en 1976, annonce des changements importants. On propose de creer une Regie du patrimoine, une direction des musees et de mettre en place un reseau coherent de musees, de centres d'exposition et de centres d'interpretation. En somme, le gouvernement federal et le gouvernement provincial investissent massivement dans des infrastructures de mise en valeur du patrimoine.

La contribution du Musee des arts et traditions populaires a Paris

En France, on doit tenir compte de l'impact du nouveau musee des arts et traditions populaires a Paris. Le ministere de la Culture et des Communications inaugure en 1972 la galerie d'etude et, en 1975, la galerie culturelle du Musee national des arts et traditions populaires. Ce musee, oeuvre de Georges-Henri Riviere et de Jacques Pasquet, represente le meilleur exemple de ce qu'est a l'epoque un musee d'ethnographie. L'originalite de ce musee reside notamment dans la cohabitation avec le Laboratoire d'ethnologie francaise. Pour chaque projet, les museologues travaillent avec des chercheurs et des scientifiques. Les concepteurs du musee et de la galerie culturelle associent d'ailleurs a leur demarche Claude Levi-Strauss. Avec quelques annees de recul, Jean Cuisenier fait le point sur la situation de l'ethnographie en regard des autres disciplines au milieu des annees 1970.

En trente ans aussi, le champ intellectuel a profondement change. L'anthropologie sociale et ses sources universitaires anglo-saxonnes ont acquis droit de cite grace aux enseignements de Claude Levi-Strauss au College de France. On ne pouvait pas ne pas se demander dans quelle mesure les demarches methodiques, les hypotheses theoriques et le genre de resultats que suscitait la nouvelle discipline pouvaient s'appliquer aux societes europeennes et singulierement a la France. Les historiens manifestaient, de leur cote, un interet de plus en plus soutenu pour les interrogations des ethnologues et des sociologues, pour leur maniere de traiter les donnees sociales, pour leurs propositions de reinterpretation du passe. Les investigations archeologiques, longtemps orientees par le souci de remonter jusqu'aux periodes les plus lointaines de la prehistoire, commencaient a s'appliquer au Moyen Age, a la Renaissance et aux Temps modemes. La sociologie, enfin, etait en pleine mutation, stimulee par les changements de la societe industrielle, les conflits sociaux et les effets multiples de la croissance economique. Il en advenait de meme pour une discipline restee longtemps en marge, la folkloristique : cantonnee jusqu'alors dans l'etude des traditions orales et le recueil des coutumes, elle etait en plein renouvellement theorique sous l'effet conjoint du structuralisme, de la psychanalyse et de la semiotique (Cuisenier 1987 : 221).

Le rayonnement du Musee des ATP s'etend alors sur l'ensemble de la France et bien au-dela des frontieres. L'enseignement de la museologie de Georges. Henri Riviere devient la reference de la nouvelle museologie. Encore aujourd'hui, sa vision de l'ethnomuseologie demeure originale et actuelle. Pour bien comprendre la museologie quebecoise, il importe de replonger dans les textes de Georges-Henri Riviere (Cours de museologie 1980) qui ont inspire les museologues d'ici et d'ailleurs.

La question de la formation professionnelle en museologie

Les investissements que s'appretent a realiser les gouvernements necessitent par ailleurs une main d'oeuvre qualifiee. Or, il n'existe aucune formation en museologie au Quebec. Certains choisissent alors de poursuivre des etudes de deuxieme cycle en museologie au Canada et a l'etranger. Plusieurs choisissent de poursuivre leur formation en s'engageant dans des etudes de deuxieme et de troisieme cycle au programme d'ethnologie de l'Universite Laval. Lorsque l'on examine attentivement les sujets des memoires et des theses, on constate que plusieurs concernent la culture materielle et qu'ils gravitent dans le secteur de la museologie et de la mise en valeur du patrimoine. Dans les faits, le programme d'ethnologie a longtemps assume un role de formation en museologie. Le programme accueillait a la fois les etudiants qui voulaient acquerir des habiletes en museologie et en archeologie historique. C'est par le biais du programme que des chercheurs comme Marcel Moussette, qui dirige l'equipe de chercheurs en culture materielle de Parcs Canada a Quebec, vont soutenir des theses originales sur la culture materielle (Moussette 1983).

Cette incursion de l'ethnologie sous l'angle de la culture materielle fait en sorte que la discipline se retrouve au cceur de ce nouveau champ qu'est le patrimoine. Des lors, le patrimoine ne concerne plus essentiellement l'histoire de l'architecture et des ceuvres d'art. Par le rayonnement qu'il connait, le programme d'ethnologie incite les gouvernements a elargir le concept de patrimoine pour y integrer l'etude de la culture populaire. C'est dans cette perspective que le ministere des Affaires culturelles entreprend, par exemple, des inventaires thematiques comme celui consacre aux croix de chemins et l'ambitieux projet de macro-inventaire du patrimoine quebecois.

C'est dans ce contexte qu'en 1977 la Direction generale du patrimoine entreprit le programme de macro-inventaire, qui visait a reunir, dans les delais aussi courts que possible, un minimum acceptable de connaissances pour tout le Quebec et ce, sur l'ensemble des themes et des phenomenes associes au patrimoine. Le macro-inventaire a ete concu comme un outil permettant de degager une vue d'ensemble de la richesse patrimoniale du Quebec et de relever les concentrations ou les themes susceptibles de faire l'objet d'une recherche ulterieure. Par le fait meme, il constitue un excellent instrument de planification (Macro-inventaire du patrimoine quebecois 1985 : 9).

Ces travaux menes sur le terrain par des ethnologues insufflent egalement un elan sans precedent au niveau des dossiers de classement deposes a la Commission des biens culturels du Quebec (Les chemins de la memoire 1990-1999 tome 1). Lorsqu'on analyse avec attention les types de classements faits par la Commission des biens culturels, il apparait assez clairement que les biens culturels classes ou reconnus ne sont plus de meme nature. On ne classe plus uniquement des eglises, des presbyteres ou des maisons de pierre construite sous le regime francais. On voit apparaitre d'humbles maisons de bois, des ecoles de rang, des documents d'archives et des biens historiques mobiliers(13). En somme, les preoccupations des ethnologues pour la culture populaire transforment la vision elitiste du patrimoine que les gouvernements entretenaient depuis la creation de la Commission des lieux et monuments historiques du Canada en 1991 et l'adoption par le gouvernement quebecois de la Loi sur les monuments historiques et artistiques en 1922. En ce sens, l'ethnologie contribue a un mouvement de democratisation de la culture. Il s'agit certainement d'une contribution originale de l'ethnologie a la societe quebecoise.

Deuxieme temps : 1980-1992

1980 : l'annee de toutes les desillusions

Il faut reconnaitre que la politique ou, du moins, les interets politiques ont toujours influence le developpement culturel. Le referendum de 1980 constitue certainement le meilleur exemple du genre. L'interet pour la culture populaire, pour les objets anciens et le patrimoine de fason generale va, a toute fin pratique, disparaitre. En l'espace de quelques mois, la deprime qui suit le referendum est bientot doublee d'une crise economique majeure. Le gouvernement quebecois, qui s'etait engage dans des operations de developpement au cours des annees 1970, doit maintenant composer avec une crise economique qui frappe notamment la culture. Le ministere des Affaires culturelles abandonne de nombreux projets et doit eliminer plusieurs programmes de financement. Le secteur des musees et du patrimoine va s'engager dans une longue traversee du desert. Le ministere abandonne bientot la direction du patrimoine de meme que la direction des musees. Dans le meme esprit, le ministere modifie la loi sur les biens culturels de maniere a ne plus supporter a lui seul les responsabilites liees au classement des biens culturels. On propose de confier aux municipalites la responsabilite de designer et de proteger le patrimoine. Ces choix se doublent d'une nouvelle tendance qui pousse le gouvernement a regionaliser les ministeres. Cette operation aura pour effet de demanteler les equipes nationales et de faire disparaitre l'expertise acquise au ministere des Affaires culturelles en museologie et en patrimoine. Ce constat a d'ailleurs ete note dans le rapport Arpin sur la politique du patrimoine culturel (2000 : 41).

L'entree en scene du Musee de la civilisation

On ne saurait expliquer le developpement du reseau des musees sans evoquer la saga du Musee de la civilisation. Bien que le projet d'un musee national de la civilisation remonte a 1967, il faut attendre le conflit suscite par le projet du Musee de l'Homme d'ici pour que le Musee de la civilisation voie veritablement le jour.

En 1979, Denis Vaugeois depose un document qui va laisser de nombreuses traces : Le Musee du Quebec en devenir (1979a ; voir egalement 1979b). Le rapport demontre que le Musee du Quebec, depuis son inauguration en 1933, ne s'est jamais vu assigner un role precis par les autorites gouvernementales, si bien qu'il connut diverses orientations, au gre des directeurs, chacun privilegiant tel ou tel aspect de la culture quebecoise et telle ou telle utilisation des ressources disponibles (1979a : 15). Le ministre des Affaires culturelles du Quebec souhaite alors elargir la vocation du Musee du Quebec. En somme, le ministere espere conserver le volet beaux-arts et y ajouter un nouveau volet ethnologique :

En choisissant pour objet de son action l'homme d'ici, etudie dans une perspective a la fois culturelle et sociologique, le Musee du Quebec s'engage carrement dans le champ d'interet des sciences humaines. Il ecarte, du meme coup, les sciences naturelles et la technologie. Et, bien qu'il se propose de mettre en valeur une importante collection d'art, le Musee du Quebec cherchera, en ce domaine, a montrer comment l'art fait partie de la vie de notre communaute et s'y integre sans heurt ni hiatus.

De ce qui vient d'etre dit, on comprendra que le Musee du Quebec s'inscrira plutot dans la lignee des musees de l'Homme, lesquels visent, en general, a regrouper la somme des connaissances acquises sur l'espece humaine. Bien peu de musees de l'homme ne devient point, cependant, de l'homme universel vers l'homme national, objet plus pro-privilegiant des perspectives assez semblables a celles qu'on retrouve dans les musees de l'homme, le Musee du Quebec se distinguera neanmoins de ces derniers par son option volontaire et clairement avouee en faveur de l'homme quebecois (29-30).

Cette proposition, suivie d'une consultation publique, suscite les plus vives reactions dans le milieu des musees au Quebec. En somme, ce projet est recu negativement et vecu comme un drame. Comment pouvait-on envisager en 1979 de faire du Musee du Quebec un musee national ouvert a des questions de societe ? On assiste alors a une polarisation des positions. Des barricades s'erigerent entre le milieu des beaux-arts et les museologues du ministere des Affaires culturelles.

Il faut retourner dans les journaux de l'epoque pour constater a quel point le debat prend des proportions demesurees. D'un cote comme de l'autre, les partisans adoptent une attitude qui les place dans une situation de dialogue de sourds. Certains historiens de la museologie ne retiennent de cette periode que la confrontation. Mais il y a beaucoup plus important a retenir. Le projet du ministere des Affaires culturelles devient le pretexte pour amorcer un veritable debat sur la fonction des musees dans la societe.

Quoi qu'il en soit, apres quelques mois d'un debat qui ressemble plutot a une querelle de disciplines, le gouvernement ne peut que battre en retraite. Le Musee du Quebec est alors confirme dans sa mission de conservation et de diffusion de l'art au Quebec. Quant au second volet consacre a l'homme d'ici, le ministere choisit plutot de reflechir a nouveau a ce concept et de preparer la creation d'un musee national de la civilisation. Il y a dans cette decision toute politique la prefiguration d'une tendance qui ne s'est pas dementie depuis. En fait, cette polarisation des positions ouvre la porte a une specialisation des musees. La consequence la plus immediate se manifeste dans la mission du Musee du Quebec, qui delaisse une partie importante de sa responsabilite initiale qui etait de conserver non seulement les ceuvres mais egalement les objets propres a retracer l'histoire du Quebec.

Des lors, la collection ethnographique constituee par le Musee du Quebec est donc confiee au ministere des Affaires culturelles. Quelques annees plus tard, le ministere cree le Musee de la civilisation dans un projet de loi adopte par l'Assemblee nationale en 1984. La collection ethnographique qui s'est constituee des l'ouverture du Musee du Quebec en 1933 est confiee cette fois au Musee de la civilisation.

Avec le recul du temps, on constate que ce qui s'annoncait comme un echec en 1979 se transforme en succes. Meme avec son concept museologique propre, on doit reconnaitre que le volet civilisation n'aurait jamais trouve un veritable epanouissement dans la structure du Musee du Quebec. La creation de deux structures autonomes permet donc le maintien et le developpement des missions respectives du Musee du Quebec et du Musee de la civilisation.

Les difficultes rencontrees par les artisans du Musee de la civilisation vont cependant se transformer et donner naissance a une institution originale qui va devenir le modele de la nouvelle museologie.

Les facteurs qui ont contribue au succes

Il faut bien l'avouer, une large part du succes du Musee de la civilisation reside precisement dans la rupture avec l'approche traditionnelle des musees d'ethnographie. Contrairement a la pratique courante, le Musee ne fait pas des collections le coeur de ses operations et de sa reflexion. Roland Arpin propose plutot de centrer le Musee sur l'aventure humaine et de structurer la programmation des expositions, des programmes educatifs et des activites culturelles autour de thematiques (Arpin 1993). Les objets sont presents, mais ils servent avant tout a supporter le discours des expositions. Cette approche, il faut bien l'avouer, a souleve bien des controverses. En adoptant une nouvelle facon de concevoir la museologie, Roland Arpin propose une forme de disruption(14) de la museologie. De plus, il remet en question le role des conservateurs en confiant la realisation des expositions a des charges de projets qu'il imagine etre des specialistes de la communication. Cette approche pedagogique s'inscrit egalement en contradiction avec le modele traditionnel. Cette seconde disruption a secoue le milieu des musees car il remet alors en question les valeurs les plus fondamentales des museologues.

Le concept museologique du musee de la civilisation propose une troisieme rupture fondamentale. De maniere a echapper au piege des disciplines, les auteurs du concept ont choisi de creer un musee multidisciplinaire. Le Musee de la civilisation ne se veut pas un musee d'ethnographie, ni un musee d'histoire, ni un musee d'anthropologie. Il se definit comme un musee de societe. C'est pourquoi chaque projet d'exposition fait appel a des chercheurs qui proviennent de toutes les disciplines, de maniere a ce que les themes ne soient pas traites en regard d'un seul point de vue disciplinaire (Bergeron 2002 : 173-213). Par cette prise de position, le Musee de la civilisation prefigure une nouvelle tendance fondamentale. En somme, le musee annonce la remise en question des musees disciplinaires.

Lorsqu'on examine objectivement ces choix strategiques, on constate que les musees d'anthropologie ou d'ethnologie comme les musees d'histoire ne peuvent plus se permettre de s'enfermer dans des perspectives uniques. Cependant, l'approche museologique centree sur l'aventure humaine ne s'inscrit pas en contradiction avec l'approche ethnologique, bien au contraire. Cette approche s'apparente plutot a la demarche ethnologique dans la mesure ou elle permet de centrer le discours museologique du point de vue des personnes en tenant compte de la culture populaire. Faut-il rappeler que l'equipe initiale du Musee de la civilisation comptait un nombre important d'ethnologues qui occupaient des postes cles (conservateurs, charges de projets, charges de recherche et directeurs). L'analyse des scenarios des premieres expositions revelerait certainement une preoccupation particuliere pour la culture populaire. On n'a qu'a penser aux premieres expositions produites au Musee de la civilisation comme Memoires(15) qui a marque la museologie nord-americaine ou comme Souffrir pour etre belle ou Cher amour (Arpin 1988-2001 : 32-52). Dans cette perspective, le Musee n'est plus le lieu d'expression des elites et le porte parole de leurs valeurs. En centrant l'exposition sur l'aventure et l'experience humaine, on oblige les museologues a sortir du culte des objets. En s'engageant sur cette voie, le Musee de la civilisation renouvelle le regard sur la societe et, en ce sens, il apporte une nouvelle vision de ce que peut etre un musee de societe. Meme si le Musee se definit comme un musee de societe et rejette toute etiquette qui pourrait le lier a une discipline, il demeure fondamentalement un musee ethnographique. En ce sens, on peut dire que le Musee de la civilisation apparait comme l'aboutissement de ce projet de Musee de l'Homme evoque des 1967.

La question de la formation professionnelle en museologie

L'apparition du Musee de la civilisation et le developpement du reseau des musees suscite de nouvelles preoccupations au plan de la formation professionnelle. C'est dans ce contexte que le ministere de la main-d'oeuvre et de la securite du revenu entreprend une consultation de maniere a proposer un devis de formation professionnelle pour les conservateurs de musee. Ce devis a pour objectifs de donner aux membres du domaine museal toutes les dimensions de la profession de conservateur-conservatrice , de definir les aires de competence reconnues, de foumir aux institutions museales une description detaillee des taches, qualites et competences. De plus, cette operation vise a permettre l'elaboration de programmes de formation professionnelle et de perfectionnement. Ce rapport rappelle que la Societe des musees quebecois demeure le seul organisme qui forme officiellement les professionnels de la museologie. On definit ainsi la problematique :

Les musees se developpent et se professionnalisent a un rythme accelere depuis 1970. Le personnel en place doit s'adapter pour faire face aux problemes pratiques qu'il rencontre dans l'accomplissement de ses taches : outils de recherche sur les collections, techniques de conservation et de restauration, implantation de l'information, methodes et techniques de presentation des expositions, elaboration de guides pedagogiques, nouvelles techniques de communication, de mise en marche, et de gestion (Ministere de la main d'oeuvre et de la securite du revenu 1987).

Les auteurs du rapport reconnaissent que le travail de conservateur exige une formation de deuxieme ou de troisieme cycle dans six disciplines reconnues : histoire, histoire de l'art, ethnologie, anthropologie, archeologie, sciences et technologies. On precise que pour devenir conservateur, les candidats doivent avoir une connaissance de la museologie par le biais de formations speciales ou par l'experience acquise dans un musee. Ce rapport arrive au moment ou l'Universite de Montreal, l'Universite du Quebec a Montreal et l'Universite Laval proposent un programme de maitrise en museologie. Disposant d'une solide experience en ethnomuseologie et d'une longue tradition, l'Universite Laval sera finalement ecartee dans la mesure ou l'Universite de Montreal et L'UQAM proposent un programme conjoint de maitrise en museologie. L'Universite Laval doit abandonner le programme de maitrise, mais propose un diplome de deuxieme cycle en museologie avec le support du programme d'ethnologie.

Au-dela de cette bataille qui oppose trois universites, on doit constater que les musees jouissent d'une notoriete indeniable. C'est dans ce contexte de developpement et de valorisation du role du musee dans la societe que la formation des museologues se professionnalise.

Troisieme temps : la fin des musees d'ethnographie ?

Dans le sillage du succes intemational que connait le Musee de la civilisation, le reseau des institutions museales se developpe largement (Ministere de la culture et des communications 2000 : 9-12). Les politiciens et les decideurs envisagent alors de faire des musees des moteurs du developpement culturel et economique. De nombreux projets emergent tout a coup. Plusieurs musees proposent des plans de relance et de developpement ; c'est le cas du musee du Seminaire de Sherbrooke, du musee de Joliette, du musee McCord et du Musee du Seminaire de Quebec qui souhaite se transformer en musee de l'Amerique francaise(16). Et puis, de nouveaux projets se concretisent. Le gouvernement federal propose de construire a Quebec un musee de la Nouvelle-France ; le gouvernement quebecois annonce l'agrandissement du Musee du Quebec et la construction d'un Musee des Arts et traditions populaires du Quebec a Trois-Rivieres.

Cette euphorie qui gagne le reseau des musees connait son apogee avec le congres international des musees qui se tient a Quebec a l'automne 1992. Le reseau des musees quebecois et canadiens acquiert alors une reconnaissance internationale.

Jamais, sans doute, on n'aura parle de musees au Quebec qu'en cette annee 1992 qui a vu en mai, a Montreal, la reouverture du musee McCord dans des locaux restaures et agrandis, l'installation du Musee d'art contemporain dans un batiment neuf integre a la Place des arts, et qui verra en septembre, a Quebec, les assises de la XVIe Conference generale du Conseil international des musees (ICOM), regroupant quelque 9 000 membres partout dans le monde.

L'annee 1992, qui est a plusieurs egards celle des grands anniversaires au Quebec, peut aussi etre consideree comme l'annee des musees et de la museologie, car jamais on n'a vu s'affirmer une telle vitalite dans ce secteur (Couture 1992 : 4-10).

La crise economique qui se profile au debut des annees 1990 va cependant ralentir considerablement les projets de developpement des musees. Le gouvernement quebecois prefere s'engager dans des investissements culturels pour des projets de centres d'exposition et de centres d'interpretation. Cette tendance (Simard 1992), qui se confirme dans la decennie 1990, est deja perceptible au milieu des annees 1980. Les politiciens comprennent rapidement qu'il est plus simple de construire des centres d'interpretation pour developper le tourisme regional. Ces centres demandent un investissement important en immobilier, mais ils necessitent peu de ressources financieres au plan du fonctionnement. En d'autres termes, pour une fraction du cout d'un musee conventionnel, l'etat peut creer plusieurs centres d'interpretation. De plus, aux yeux des citoyens, il n'existe pas de difference entre musee et centre d'interpretation. Des lors, les centres d'interpretation s'inscrivent dans les agendas politiques des ministres et des deputes.

Par ailleurs, a compter de 1991, le gouvernement du Quebec et le gouvernement federal investissent massivement dans l'informatisation des collections publiques (Arpin 2000 : 62). Cette politique favorise le travail de recherche sur les collections ethnographiques des musees canadiens.

Cette nouvelle orientation provoque des impacts majeurs. Le premier et le plus significatif : on abandonne la creation de musees ethnographiques dans les regions. On prefere traiter des identites regionales dans des expositions permanentes qui prennent la forme de centres d'interpretation. Des firmes se specialisent et creent des centres d'interpretation dans les differentes regions du Quebec. Premiere consequence, ces centres d'interpretation n'ont pas besoin de conservateurs ou d'ethnologues en permanence. Ce type d'institution museale ne se definit pas comme un lieu de connaissance et de conservation de la memoire populaire. Les centres d'interpretation deveinnent des lieux de promotion de certaines thematiques. Deuxieme consequence : on cree un reseau de musees statiques, c'est-a-dire qu'on y fige des thematiques qui n'evoluent a peu pres pas et qui ont pour consequence de ne pas fideliser les clienteles locales et regionales. Ce sont en quelque sorte des lieux destines avant tout aux touristes.

Les musees regionaux ont habituellement le mandat de travailler aux identites regionales. A cet egard, les ethnologues ont toujours excelle dans ce secteur. Comme on abandonne peu a peu ce type de musee, on voit egalement disparaitre les ethnologues qui avaient developpe une perspective identitaire dans ces musees regionaux.

Un nouveau type de musee d'ethnographie : les economusees

La crise economique qui frappe la culture et plus particulierement le reseau des musees au milieu des annees 1990 va permettre l'emergence d'une toute nouvelle forme de museologie. Le concept des economusees arrive a point nomme. Le contexte est on ne peut plus favorable a ce type d'equipement culturel et economique.

Les economusees(17) apparaissent comme une alternative aux musees d'ethnographie, tout en offrant une solution moderne au probleme du financement des institutions museales. Mais le plus interessant, c'est que ce type d'institution favorise la connaissance et la mise en valeur de savoir-faire traditionnels et artisanaux. En ce sens, les economusees s'inspirent profondement de l'approche ethnographique. Faut-il le rappeler, le concept original est l'oeuvre de Cyril Simard, un ethnologue qui a longtemps ceuvre dans le monde des metiers d'art ainsi qu'au Musee du Quebec. On lui doit une des formes les plus originales de la nouvelle museologie nord-americaine. Ce concept a franchi les frontieres du Quebec et on retrouve des economusees au Nouveau-Brunswick, a l'Ile du Prince-Edouard, en Nouvelle-Ecosse et a Terre-Neuve.

1991 : le projet du Musee des ATP de Trois-Rivieres

Dans ce bilan des annees 1990, on ne saurait passer sous silence le cas du Musee des arts et traditions populaires de Trois-Rivieres. Il s'agit probablement de l'echec le plus deplorable qu'on ait pu observer au Quebec. Ce projet a eu eta encore aujourd'hui des consequences importantes sur la museologie et l'avenir des musees d'ethnographie.

Sans vouloir epiloguer sur les raisons qui expliquent la fermeture du Musee deux ans a peine apres son ouverture, on ne peut s'empecher d'etablir quelques constats.

1- Le simple fait de s'etre inspire du musee des arts et traditions populaires de Paris constitue en soi une erreur fondamentale. On doit reconnaitre que le concept original du Musee des ATP de Paris est apparu au milieu des annees 1970 comme un modele original et novateur. Cependant, ce Musee a connu des difficultes telles qu'il sera bientot demantele pour prendre une autre forme et une nouvelle mission a Marseille.

2- L'equipe initiale du musee de Trois-Rivieres a eu du mal a faire de ce musee un musee d'ethnologie. Le discours et la maniere ne collaient plus a la realite.

3- Enfin, le fait de s'inspirer du Musee de la civilisation, sans disposer des memes besoins, n'a pas donne de bons resultats. Le musee n'a pas reussi a trouver sa propre identite et a devenir un lieu de convergence dans son milieu.

4- On doit reconnaitre que le budget de fonctionnement accorde par le ministere de la culture a contribue a creer au musee un etat de crise. En ne donnant pas au Musee de Trois-Rivieres le budget necessaire pour assumer sa mission, le ministere condamnait du meme coup ce musee.

5- La consequence la plus grave de cette aventure, c'est que, dans l'opinion publique comme dans l'opinion des museologues, il semble que le modele des musees d'ethnographie soit depasse. Il s'agit peutetre du dernier musee auquel on a confie une mission aussi precise au Quebec.

Le Musee de la derniere chance

La relance du musee des Arts et traditions populaires, qui est devenu le Musee quebecois de culture populaire, en est a sa derniere chance. Le 29 septembre 2000, le Comite de relance deposait un rapport de relance a la ministre de la Culture et des Communications. Le Musee doit donc reouvrir ses portes au printemps 2003. Si le public ne suit pas cette fois, il est probable que le musee ne puisse s'en remettre et que le ministere choisisse de le fermer definitivement. Quoiqu'il advienne, on doit retenir que ce n'est pas le fait que ce musee ait ete defini comme un musee d'ethnographie qui pose un probleme fondamental. Les difficultes resident davantage dans les strategies de mediation. Le Musee de la civilisation a demontre que le concept et la maniere d'echanger avec les publics du musee comptent davantage que les orientations scientifiques. En d'autres termes, c'est la mediation, c'est-a-dire le rapport aux visiteurs, qui determine le succes d'une institution museale.

La place de la recherche et des collections

La place de la recherche dans les musees regionaux se trouve a toute fin pratique elaguee. Malgre ces prises de positions discutables, les musees conservent encore des collections ethnographiques. A cet egard, le Musee de la civilisation a mene entre 1998 et 1991 une vaste enquete dans le reseau des musees quebecois de maniere a identifier les principales collections ethnographiques (Denis 1993). Comme le souligne Christian Denis, sans etre exhaustif, cet inventaire permet dans un premier temps d'identifier 55 musees pouvant conserver des collections ethnographiques. Apres analyse, on a retenu 50 musees. La grille d'analyse s'inspire du systeme de classification de Robert G. Chenhall publie en 1978. A cette classification, on a ajoute deux categories de maniere a identifier les objets amerindiens et les objets lies aux communautes ethniques. Il apparait assez clairement dans ce rapport qu'il existe d'importantes collections ethnographiques dans le reseau des musees quebecois. La lecture des tableaux indique egalement que les musees disposent d'une documentation sommaire de ces collections. Bien que l'informatisation des collections entreprise au debut des annees 1990 ait permis de mieux connattre ce patrimoine ethnographique, les bases de donnees ne nous donnent acces qu'a tres peu d'informations. Au mieux, on a identifie les objets, on a precise le lieu exact d'entreposage et on a note l'etat de conservation. En bref, cette operation visait d'abord et avant tout a denombrer les objets et a permettre la gestion administrative du patrimoine quebecois. Au plan de la recherche, on constate que tout reste a faire.

Bilan : crise du savoir et de la formation

Il apparait indeniable que le programme d'ethnologie a joue un role fondamental dans la formation des premiers museologues au Quebec. Consequemment, les ethnologues ont influence, au cours des trente-cinq dernieres annees, le developpement du reseau des musees au Quebec en favorisant la mise en valeur des collections ethnographiques et de la culture populaire.

A la lumiere de ce retour historique sur les musees d'ethnographie au Quebec, on peut parler d'une veritable crise identitaire des musees d'ethnographie qui a commence a se faire sentir au debut des annees 1990. Qu'en est-ii en 2002 du reseau des musees d'ethnographie ? Objectivement, peu de musees se definissent comme des musees d'ethnographie ou d'ethnologie. Cependant, tout comme en 1967, alors que Jean-Claude Dupont decouvrait ces petits musees regionaux, on retrouve aujourd'hui d'importantes collections d'objets ethnographiques qui temoignent de la culture populaire quebecoise. Trente-cinq ans plus tard, on observe les memes problemes fondamentaux qui refont surface. La connaissance que nous avons de ces collections ethnographiques demeure elementaire. Dans la majorite des cas, les conservateurs et museologues qui ont la responsabilite de ces musees ne disposent pas de la formation necessaire pour etudier et interpreter ces collections. C'est pourquoi il y aurait lieu de faire une place a de jeunes ethnologues dans ces musees, pour travailler a la documentation des collections.

Lorsqu'on examine attentivement la formation offerte en museologie a l'Universite de Montreal, a l'Universite du Quebec a Montreal ou a l'Universite Laval, on est frappe par l'accent mis sur la communication et la mediation des patrimoines. La formation actuelle en museologie a permis de former d'excellents professionnels qui maitrisent parfaitement les concepts de communication en museologie. Ils ont acquis ici et a l'etranger une reconnaissance certaine. Cependant, les programmes de museologie ne consacrent pas assez de temps a la formation fondamentale en museologie. On ne doit pas perdre de vue que les museologues travaillent d'abord et avant tout avec des objets et des oeuvres. A ce chapitre, on ne forme toujours pas de conservateurs au Quebec. Bien sur, l'histoire de l'art forme des conservateurs pour travailler dans les collections beaux-arts, mais nous ne formons pas de conservateur pour prendre en charge les collections ethno-historiques qui constituent une large part du patrimoine quebecois. A ce chapitre, nous faisons face a un deficit majeur. Le Quebec forme des museologues specialistes de la communication, mais pas de conservateurs disposant des connaissances fondamentales en culture materielle. Bien que l'expertise quebecoise soit reconnue en Europe, les museologues europeens reconnaissent egalement cette grande faiblesse dans la formation des museologues quebecois. II ne faut pas perdre de vue que le travail de museologue concerne pour l'essentiel des objets de culture materielle. A juste titre, on a longtemps reproche aux museologues quebecois d'etre trop centres sur les collections. Les programmes de formation en museologie ont repondu aux attentes des musees en formant des museologues sensibles a la communication. Malheureusement, on a trop neglige le travail fondamental sur les collections. Il y aurait lieu de retablir l'equilibre entre ces deux grandes fonctions car on risque fort de se retrouver dans quelques annees avec des museologues qui se desinteresseront de la ressource fondamentale des musees. Les objets auront-ils encore leur place dans les musees d'ethnographie ? Voila la veritable question.

Comme l'avaient imagine George-Henri Riviere et Jean-Claude Dupont a une autre epoque, le musee d'ethnographie doit etre un lieu de memoire, un lieu de connaissance et un lieu de rassemblement pour les collectivites. Aujourd'hui comme en 1967, les musees d'ethnographie continuent trop souvent a n'etre que des cabinets de curiosites, precisement parce qu'il n'y a pas d'ethnologues pour analyser et reveler le veritable sens de ces collections. En abandonnant la formation en culture materielle des museologues, on a cree une fracture entre la mediation du patrimoine et les savoirs. Ce phenomene que l'on observe au Quebec prend des formes differentes en France, mais le probleme fondamental reste le meme. Les jeunes ethnologues et consequemment les nouveaux museologues deviennent de moins en moins sensibles a l'etude des objets.

L'ethnologie, on l'a bien demontre, a contribue de maniere fondamentale au developpement des musees au Quebec. Elle a oriente et inspire notamment la maniere originale du Musee de la civilisation comme musee de societe qui a joue un role de leader au plan national et international. La reconnaissance du Musee de la civilisation a egalement mis en relief la necessite pour les museologues de prendre des distances avec les approches disciplinaires. Dans cette perspective, est-ce que les musees d'ethnographie sont appeles a disparaitre ? Je crois fondamentalement que l'approche humaniste de l'ethnologie a toujours sa place. Si la tendance que l'on observe depuis quelques annees se maintient, les musees vont continuer a se specialiser(18). Cependant, l'approche et le regard que pose l'ethnologie sur la culture populaire demeure toujours actuel et inspirant. Par ailleurs, quoiqu'on en dise et quoiqu'on en pense, les musees, qu'ils se definissent comme des musees de societe ou des musees d'histoire, vont continuer a constituer des collections d'objets ethnographiques. Il y aura de l'avenir pour les musees d'ethnographie dans la mesure ou l'ethnologie reprendra sa place dans le champ de la culture materielle et qu'elle permettra une interpretation des objets qui fasse appel au savoir et a l'intelligence, car la veritable crise se situe precisement sur ce terrain.

(1.) Le tresor de la langue francaise, http://atilf.inalf.fr/tlfv3.htm

(2.) J'ai coordonne les activites du Groupe-conseil sur la politique du patrimoine sous la presidence de Roland Arpin et j'ai participe a la redaction du rapport depose a Agnes Maltais, ministre de la Culture et des Communications du Quebec, dans lequel nous tracons un bilan de l'evolution du concept de patrimoine au Quebec (voir le chapitrel dans Arpin et al. 2000 : 1-51).

(3.) Voir a ce propos le numero special de la revue Forces ayant pour theme Plein feu sur les musees (ete 1992), rassemblant des textes de plusieurs museologues quebecois reconnus. C'etait egalement l'occasion pour ces auteurs de mettre en relief l'originalite de la museologie quebecoise.

(4.) Le directeur general du musee de la civilisation, Roland Arpin, a souvent evoque cet evenement historique pour expliquer la philosophie du concept du Musee de la civilisation. Raymond Montpetit reconnait egalement l'impact de l'exposition universelle de 1967 (2002 : 81-94).

(5.) Cette collection sera remise au Musee du Quebec au moment du demantelement de l'INC. La collection Coverdale, tout comme la collection ethnographique, sera finalement confiee au musee de la civilisation en 1984. Nathalie Hamel prepare actuellement une these de doctorat en ethnologie a l'Universite Laval sur cette collection ethnographique majeure pour l'histoire de la museologie au Quebec.

(6.) Les paragraphes suivants sont tires de Arpin et Bergeron dans Pichette 2001 : 408, 410.

(7.) Lorsqu'on songe a Robert-Lionel Seguin, on pense notamment a son ouvrage majeur publie en 1967, La civilisation traditionnelle de l' habitant aux 17e et 18e siecles. Voir egalement la bibliographie exhaustive de Seguin dans Bouchard (1983).

(8.) A cet egard, Dupont assumera ses responsabilites puisqu'il consacre sa carriere a l'etude de la culture materielle (voir sa bibliographie dans Pichette 2001 : 473-486).

(9.) Jean du Berger decrit le contenu du certificat en folklore offert au departement d'etudes canadiennes. Les cours sont consacres a l'etude des contes, des legendes, des chansons, des traditions populaires ainsi qu'a des enquetes folkloriques (voir du Berger 1997 : 17).

(10.) Ces objectifs sont confirmes dans l'entrevue accordee par le directeur de l'INC, Pierre Lachapelle, publiee dans Culture vivante (1969 : 3).

(11.) La these de Dupont, L'artisan forgeron (1979), demeure encore aujourd'hui exemplaire a plusieurs egards. Elle repose avant tout sur les enquetes orales, mais integre les dimensions historiques et sociales. Dupont tient compte a la fois de la tradition du geste et de la parole.

(12.) Michel Lessard se lance au milieu des annees 1990 dans la redaction d'une mise a jour de son Encyclopedie des antiquites. Il publie cette fois trois ouvrages qui, une fois de plus, connaissent un succes inegale aupres du grand public : Objets anciens du Quebec. La vie domestique (1994), Antiquites du Quebec (1995) et Meubles anciens du Quebec (1999).

(13.) Voir les tableaux 7 et 8 dans Arpin et al. (2000 : 56, 57). Pour mieux comprendre les changements apportes a la loi sur les biens culturels, on peut consulter Dumouchel (1987) ainsi que le tableau 2 dans Arpin et al. (2000 : 28).

(14.) A propos du concept de disruption, on peut consulter Dru (1997).

(15.) L'exposition permanente Memoires, qui presente l'identite et l'histoire des Quebecois, demeure encore aujourd'hui le meilleur exemple de l'approche originale developpee au Musee de la civilisation. Cette exposition repose d'abord et avant tout sur les travaux d'une equipe multidisciplinaire du CELAT a l'Universite Laval. Philippe Dube, aujourd'hui responsable du diplome de deuxieme cycle en museologie, en etait le charge de projet. Bien qu'elle doive etre remplacee en 2005, elle reste une des expositions les plus appreciee du grand public.

(16.) Voir a ce propos la publication de la Commission des biens culturels pour le colloque ICOM (Simard 1992).

(17.) Comme il existe peu d'ouvrages sur ce type de musee, on peut consulter le site internet de la Societe internationale des entreprises economusee : www.economusees.com

(18.) J'ai developpe la question des tendances en museologie en portant une attention toute particuliere a la specialisation des musees que je compare au phenomene de multiplication des medias de communication : radio, television, etc. (2002 : 199-210).

References

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