Les strategies fiscales municipales et la gestion de l'agglomeration urbaine: le cas de la Ville de Montreal entre 1910 et 1965.
Collin, Jean-Pierre
Resume
Cet article se veut une premiere contribution a l'analyse des strategies fiscales et financieres de la Ville de Montreal depuis le debut du siecle. Nous mettrons plus particulierement en lumiere comment la fiscalite a servi a cette derniere d'instrument d'appoint pour, d'une part, minimiser l'impact de la fragmentation municipale et d'autre part, pour faire face a son role de ville centre et a ses responsabilites de metropole. Nous decrirons ainsi comment, entre les annees 1910 et les annees 1960, la Ville de Montreal a fait appel successivement et parfois concurremment a trois approches fiscales: la premiere consiste a faire payer le banlieusard-navetteur pour son exploitation des avantages de la ville centrale; la seconde mise plutot sur l'etablissement d'une veritable fiscalite regionale; la derniere se contente de faire reconnaitre pour la ville centrale un statut de metropole.
Abstract
This article analyses the fiscal and financial strategies of the City of Montreal since the beginning of the century. We discuss how fiscal policy has been used as an instrument to minimize the impact of municipal fragmentation and also used to recognize the role of the city centre and its responsibilities to the whole metropolitan area. Between 1910 and 1960, the City of Montreal used three fiscal approaches either successively or concurrently. The first was to assess the suburbs proportionately more to the advantage of the central city, the second was to establish a fiscal policy that was truly regional, and the last was to create a statute establishing a metropolitan region.
Introduction*
Qu'ils abordent la question a partir des rapports politiques et de la dynamique interne a la societe civile, comme le fait Magnusson a l'aide du concept d'<<Etat local>> (1) qu'ils insistent plutot sur la <<souverainete>> (2) politico-economique des villes, dans le sens de la these developpee recemment par Orum, ou qu'ils s'en tiennent a une perspective institutionnelle, (3) les politologues reconnaissent les municipalites comme partie integrante de l'Etat. Les collectivites locales ne se situent ni en dehors, ni en marge de l'Etat. Elles ne sont pas non plus des appendices de ce dernier. Jouissant d'une autonomie que l'on reconnait etre relative, elles doivent etre considerees comme des membres a part entiere de l'Etat. (4)
Si la notion d'autonomie qui est implicite a toutes ces approches se traduit par l'animation de la scene politique locale et par des politiques et des programmes specifiques, elle ne peut manquer de s'exprimer aussi a travers les strategies fiscales et financieres de la Ville: or c'est la un angle de lecture de la vie politique locale et de la scene municipale qui est presque systematiquement neglige.
De fait, un premier survol de l'histoire administrative de la Ville de Montreal nous indique qu'elle a periodiquement ajuste sa fiscalite aussi bien que ses politiques et son organisation administrative pour s'adapter a l'evolution des besoins des Montrealais, aux nouvelles tendances du developpement urbain, a la definition changeante des biens et des services publics, etc. Parmi ces adaptations, cet article s'interesse aux strategies fiscales de Montreal qui ont ete concues pour faire echo aux enjeux de la gestion de l'agglomeration urbaine et non seulement en fonction du seul territoire de la municipalite montrealaise.
Cette preoccupation a ete particulierement forte entre les annees 1910 et le debut des annees 1960, d'ou l'interet que nous porterons a cette periode particuliere. En fait, au cours de ce demi-siecle, devant l'essoufflement du mouvement des annexions, les autorites montrea-laises delaissent pour un temps la recherche de solutions politiques ou institutionnelles a la question metropolitaine. Elles font preferablement appel successivement et parfois concurremment a trois approches fiscales.
La Ville de Montreal, qui s'est d'abord preoccupee d'imposer directement les banlieusards pour l'utilisation qu'ils font ou pour le profit indirect qu'ils tirent des services de la ville centrale, s'engage plus tard dans la mise en place d'une veritable fiscalite regionale dont elle est le maitre d'oeuvre et le principal gestion-naire. Dans une derniere phase, devant les limitations apportees a sa capacite d'initiative, la ville centrale ne peut plus maintenir une approche autonomiste en matiere de fiscalite. Elle tente neanmoins d'obtenir des mesures aptes a faire reconnaitre son statut particulier de metropole.
Puis, progressivement, au cours des annees 1960, la Ville de Montreal renoue avec une approche d'abord politique et institutionnelle de la question metropolitaine. On assiste donc a la relance du mouvement des annexions, sous le slogan <<Une ile, une ville>>. Malgre quelques succes partiels, (5) ce projet de l'equipe Jean Drapeau-Lucien Saulnier (6) doit bientot etre mis au rancart. L'Administration montrealaise doit alors se replier sur une solution de compromis avec la creation, en 1969, d'un premier veritable <<gouvernement regional>> : la Communaute urbaine de Montreal. (7) Des services montrealais sont regionalises et les couts sont repartis entre l'ensemble des municipalites de l'ile de Montreal. En contrepartie, la Ville de Montreal doit en partager la gestion avec la banlieue.
Avant d'exposer les evenements et les orientations qui ont marque chacune des phases, evoquees plus tot, de la strategie fiscale montrealaise de gestion de l'agglomeration urbaine, entre 1910 et 1965, il vaut la peine de rappeler brievement le cadre politique au sein duquel intervient la fiscalite municipale.
La fiscalite comme instrument de gestion politique
A chaque epoque, le niveau de la taxation ou, plus globalement, le niveau de la mobilisation des ressources pratique par la Ville de Montreal ainsi que la configuration des instruments fiscaux auxquels elle fait appel sont le resultat de facteurs juridiques, politiques et economiques qui viennent contraindre serieusement son pouvoir de depenser et sa capacite de lever des impots.
Sur le plan juridique d'abord, faut-il rappeler que les municipalites canadiennes n'ont pas d'autonomie constitutionnelle. Elles n'exercent donc strictement qu'un pouvoir delegue par le gouvernement provincial. Ainsi, pour financer les activites et les fonctions obligatoires ou facultatives prevues a sa Charte, la Ville de Montreal n'a toujours beneficie que d'un pouvoir d'initiative surveille. Elle doit obligatoirement rester a l'interieur des modes d'imposition et des parametres fixes par ladite charte.
Sur le plan politique, outre ces dimensions juridiques, soulignons que c'est au chapitre du financement et de la fiscalite que le gouvernement quebecois a exerce avec le plus de celerite, et surtout avec le plus de vigueur, son pouvoir de tutelle sur la vie municipale. (8) Il faut considerer, bien sur, que les gouvernements superieurs ont tendance a gerer l'activite budgetaire des villes comme une extension de leur propre pouvoir de depenser. Mais la fiscalite est aussi etroitement tributaire de la conception dominante du role de l'Etat. Selon que l'on accorde a l'Etat un devoir d'intervention ou une obligation de reserve, on sera, localement, plus ou moins pret a accepter les prelevements fiscaux des municipalites.
Sur le plan economique, la fiscalite montrealaise est encore soumise a deux types generaux de pression. A un premier niveau, les decisions budgetaires et fiscales des gouvernements locaux sont le reflet des rapports de force entre les groupes d'interet economique sur la scene locale. A ce chapitre, les etudes de G. Levine (9) sur les pratiques et le regime montrealais de l'evaluation fonciere et sur l'absence de toute forme d'imposition de la propriete personnelle (<<personal property taxation>>) ouvrent la voie a un champ d'etude prometteur. Mais ces decisions sont aussi fortement conditionnees par la conjoncture economique qui balise, notamment, la capacite de payer de certaines categories de contribuables et parfois meme de l'ensemble. Les autorites municipales ont ainsi les coudees franches dans les periodes de plus grande prosperite, mais elles se voient, au contraire, forcees d'ajuster leurs pratiques dans les periodes de depression economique.
Les contraintes juridiques, politiques et economiques, pour importantes qu'elles soient, ne suffisent cependant pas a rendre compte des choix budgetaires et fiscaux successifs qui ont pu etre faits par la Ville de Montreal a diverses etapes de son developpement depuis le debut du siecle. Au-dela des contraintes, certaines dimensions de la vie politique municipale sont plus particulierement marquees par les strategies fiscales.
Ainsi, la fiscalite d'une ville comme Montreal variera selon la conception que l'on a de la mission fondamentale de l'institution municipale. Doit-on y voir une administration publique decentralisee ou un palier de gouvernement?
Soucieux de restreindre le champ de l'activite municipale, les partisans de la premiere option voudront, en regle generale, confiner la municipalite a ses fonctions traditionnelles de protection et de services a la propriete et ne lui reconnaitre que le droit de taxer en fonction des benefices recus. Cette option est particulierement presente chez les partisans de la these dite du <<federalisme fiscal>> selon laquelle les gouvernements locaux devraient etre strictement specialises dans l'allocation des biens publics qui se rapprochent le plus d'un bien prive. (10) Plus precisement, pour les tenants de cette approche, tout bien ou service public qui est partiellement divisible, dont les effets sont geographiquement circonscrits a un territoire donne (donc sans effets de debordement) et de qualite variable selon l'intensite d'utilisation pourrait (et devrait) etre produit par un gouvernement local plutot que par un gouvernement de niveau superieur. Au contraire, la fonction de redistribution, qui s'incarne notamment dans des programmes d'education, de sante et de services sociaux, devrait etre l'apanage exclusif des paliers de gouvernement superieurs ou, a la rigueur, intermediaires; il est clair que le niveau municipal devrait en etre exclu.
Par contre, ceux qui voient dans les municipalites un veritable palier de gouvernement chercheront a etendre l'eventail des services publics locaux. Selon eux, plusieurs actions menees par les gouvernements superieurs auraient avantage a etre conduites par un niveau de gouvernement plus pres de la realite specifique de chaque localite. Dans leur esprit, il en resulterait plus d'efficience, plus d'efficacite et plus de pertinence. Ils voudront donc que les municipalites participent a la redistribution de la richesse et des ressources a l'interieur de la societe locale. Les strategies fiscales qu'ils favoriseront tiendront compte de cet objectif general de redistribution.
Quelles que soient les options theoriques generales, plusieurs politiques sectorielles dependent etroitement de la fiscalite. Par exemple, il n'y a pas d'urbanisme possible sans une strategie fiscale coherente avec les orientations du plan ou du schema d'amenagement. De meme maniere, les strategies de developpement economique, que ce soit dans le secteur de la promotion industrielle et touristique, dans celui de la promotion residentielle, etc., n'ont de chance de reussir que si elles peuvent compter sur des mesures fiscales facilitatrices. Les politiques sociales peuvent aussi se traduire par des mesures fiscales specifiques : a Montreal, par exemple, a deux reprises au moins, il y a eu institution d'une taxe pour <<fins de charite>> : la taxe du <<sou du pauvre>> impose sur <<chaque personne admise a un lieu d'amusement>> (11) de 1915 a 1923 et, peu avant la creation du Service du bien-etre social, la <<taxe pour fins de charite sur les appareils de radio>> (12) qui fut percue de 1940 a 1942.
L'insertion de Montreal dans l'agglomeration urbaine est une autre de ces dimensions de la politique municipale montrealaise sujettes a etre gerees, au moins partiellement, au moyen de la fiscalite. Dans cet article, nous mettrons plus particulierement en lumiere comment, a partir des annees 1910, la fiscalite a servi a la Ville de Montreal d'instrument d'appoint pour, d'une part, minimiser l'impact de la fragmentation municipale et d'autre part, pour faire face a son role de ville centre et a ses responsabilites de metropole.
Absorber la banlieue ou imposer le navetteur
Jusqu'a la premiere decennie de ce siecle, la Ville de Montreal a tente de regler la question de l'etalement urbain en annexant l'une apres l'autre les municipalites peripheriques. De 1883 a 1910, pas moins de vingt municipalites ont ete fusionnees au territoire montrealais (voir figure 1). Certaines sont d'ailleurs essentiellement rurales et ne seront veritablement urbanisees qu'apres la Deuxieme Guerre mondiale. (13)
Cependant, cette strategie annexionniste fort couteuse menace l'equilibre financier de la metropole. Montreal a serieusement hypotheque son pouvoir d'emprunt en prenant a sa charge les dettes accumulees des municipalites annexees sans que celles-ci apportent a la Ville un supplement correspondant en assiette fiscale. Mais il y a plus. Les banlieues ont negocie certains travaux d'infrastructure comme <<prix>>C'e l'annexion. L'annexion faite, il faut encore <<donner a ces territoires annexes des facilites et services comparables a ceux de Montreal>>. (14) C'est donc aussi bien le budget de fonctionnement que le service de la dette qui sont surcharges. Jusqu'en 1918, Montreal absorbe encore quelques municipalites de banlieue; notamment la Ville de Maisonneuve. Imposee par le gouvernement provincial, cette annexion forcee contribue a precipiter la Ville de Montreal dans une crise financiere qui mene a sa mise en tutelle quelques mois plus tard.
Par ailleurs, l'approche annexionniste est devenue relativement inefficace depuis qu'une partie importante de la classe moyenne, chez les Anglo-montrealais notamment, voit dans l'autonomie de la banlieue un instrument de protection de ses interets et d'affirmation communautaire. (15) La mise en echec du reglement d'annexion de la Cite d'Outremont a Montreal, en 1907, constitue probablement un des premiers episodes de cette resistance des municipalites cossues ou de classe moyenne envers la ville centrale. (16)
Dans les officines municipales, on commence donc a faire porter le debat de plus en plus sur les banlieusards plutot que sur les municipalites de banlieue. En fait, des les premieres phases de la suburbanisation, les autorites montrealaises avaient deja adopte un comportement protectionniste face aux banlieusards. Montreal cherche surtout a s'assurer que ceux qui remplissent les emplois disponibles sur son territoire n'iront pas grossir, par leurs taxes, le Tresor d'une autre municipalite.
Ce comportement est lie, entre autres choses, a l'argument qui veut que les residants de la banlieue, plmarticulierement ceux qui viennent quotidiennement travailler dans les usines, les bureaux et les commerces du centre, profitent des services dispenses par la ville centrale sans en assumer les couts de production. Les dirigeants montrealais insistent aussi sur le fait que l'emergence et le developpement des banlieues n'auraient pas ete possible sans l'existence de la ville centre avec ses atouts economiques, sociaux et culturels. Il serait donc normal, estime-t-on, que les banlieusards paient leur juste part du cout de fonctionnement de cette derniere.
Il n'y a pas que Montreal, d'ailleurs, qui prenne cette argumentation a son compte; des villes de banlieue comme Saint-Henri, Saint-Louis-du-Mile-End ou Maisonneuve le font dans leurs reglements de subvention a l'etablissement d'entreprises industrielles. (17) Bref, les milieux politiques sont persuades que les navetteurs ont un effet nefaste sur la sante fiscale de la municipalite de destination. (18)
Bien sur, les banlieusards sont deja indirectement mis a contribution a travers les impots assis sur la valeur fonciere ou les impots portant sur les activites et les transactions auxquelles ils participent en territoire montrealais. La taxe d'affaires, introduite en 1885, est le premier exemple d'un impot incorporant d'emblee cette dimension extraterritoriale. Mais la ville centrale veut aussi imposer les banlieusards directement. C'est ainsi qu'en 1907, elle demande et obtient un amendement a sa charte l'autorisant a faire un reglement pour imposer une taxe speciale sur toute personne residant en dehors des limites de la cite, mais gagnant ou recevant dans cette derniere, des gages, salaire ou commissions excedant douze cents piastres par annee, que l'engagement soit a la journee, a la semaine, au mois ou a l'annee ou pour une plus longue periode, et ne payant aucune redevance municipale a la cite ... (19)
A Montreal, l'imposition d'une telle taxe sur les salaires des non-residants dont le lieu d'emploi ou la <<place d'affaires>> sont a l'interieur de la ville centrale etait regulierement evoquee depuis le debut des annees 1890. Dans une premiere etape, le conseil municipal a tente, sans grand succes vraisemblablement, d'obliger tous les employes a resider en ville. (20)
Neanmoins, bien qu'il ait fait l'objet d'un plan d'action des l'annee de l'adoption de l'amendement a la charte, le projet de l'Administration municipale d'imposer tous les navetteurs fait long feu. Il faut dire que, dans les conditions posees par la Loi (21) et tenant compte des couts et des difficultes habituelles de perception d'une taxe sur les salaires, l'assiette fiscale sur laquelle cet impot pouvait etre leve etait des plus reduite, voire presque insignifiante.
Il reste que pendant une courte periode, l'Administration municipale met a contribution une categorie particuliere de salaries--les celibataires. En effet, entre 1918 et 1923, les celibataires masculins ayant atteint l'age de 25 ans et residant ou travaillant ou ayant une place d'affaires dans la Cite de Montreal se voient imposer une taxe annuelle forfaitaire de 10$. (22)
Contestee devant les tribunaux, l'applica-tion de la taxe a ete suspendue temporai-rement en 1919 (en consequence, il y a eu double imposition en 1920). Mais meme en temps ordinaires, la <<taxe des celibataires>> est l'objet de severes critiques de la part des fonctionnaires-per-cepteurs confrontes a un probleme de taille : comment recenser les contribua-bles.
<<Sa perception se resume a une chasse a l'homme>>, (23) se plait-on a souligner, et sa rentabilite est douteuse. De fait, au cours de la premiere annee d'applica-tion, la Ville de Montreal n'aura percu que 11 072 contributions sur un total de 29 500 celibataires recenses a l'aide des cartes du Service national. La taxe af-fiche un rendement decroissant d'annee en annee. Au lieu d'en resserrer l'applica-tion ou d'en elargir l'assiette, les autorites municipales cessent de la percevoir apres le 1er mai 1923.
Malgre tout, l'idee de taxer les non-residants est frequemment ramenee dans l'actualite. Encore en 1937-1938, la Ville tente, sans succes, de convaincre le gouvernement provincial de lui accorder le droit d'imposer une taxe de 3 % sur le sa-laire de ceux qui resident en dehors de la zone d'application du reglement concernant l'impot municipal sur le reve-nu. Par ailleurs, dans les mois qui ont precede l'adoption de ce dernier reglement, en mars 1935, on avait plutot envisage l'imposition d'une taxe sur les salaires de 1 % pour les Montrealais et de 5 % pour les banlieusards, en lieu et place (24) ou en complement a l'impot sur le revenu. (25)
Cette solution est neanmoins abandon-nee car a cette epoque, la Ville de Montreal delaisse finalement l'idee d'une taxation des salaires pour s'en remettre a des modes d'imposition beaucoup plus remunerateurs qui, dans leur application, impliquent une reconnaissance implicite qu'il existe une agglomeration urbaine formee d'une ville centrale et de ban-lieues. Pendant quelques annees, Montreal experimentera ainsi les elements d'une veritable fiscalite regionale.
Les debuts d'une veritable fiscalite regionale
Dans un effort pour redresser definitivement la situation budgetaire de la metro-pole, les autorites municipales presentent devant le comite des bills prives de l'Assemblee legislative du Quebec, un projet de loi qui comprend plusieurs elements de reforme de la fisca-lite de la metropole. Outre l'augmentations des taux d'imposition existants et les surtaxes, l'Administration montrea-laise pourra ajouter deux nouvelles recrues a sa palette fiscale : une taxe de vente et un impot sur le revenu des parti-culiers.
La taxe de vente au detail de 2 % pourra etre appliquee sur tout achat de 0,10 $ ou plus, avec exemption des premieres necessites de la vie. (26) L'impot municipal sur le revenu des particuliers correspond a un pourcentage de l'impot federal sur le revenu paye par le contribuable et s'a-joute a ce dernier. (27)
Ces deux mesures sont toutefois presentees comme temporaires, soit le temps pour la corporation municipale de regler son probleme d'equilibre budgetaire. Le prelevement des nouveaux impots n'est donc prevu que pour des periodes d'une annee a la fois. Voila pourquoi la taxe de vente et l'impot sur le revenu font chaque annee l'objet d'un nouveau reglement municipal vote au moment de l'approba-tion des previsions budgetaires.
Ce <<pacte fiscal>> de 1935, auquel viendront s'ajouter, au debut des annees 1940, quelques taxes nouvelles de moindre importance, (28) marque un point tournant d'abord par sa portee budgetaire: c'est bientot pres de 10 % du budget municipal qui est assure par ces deux taxes combinees. Mais la nouvelle fiscalite montrealaise a aussi une importance politique remarquable sous trois aspects: (1) elle contribue a doter Montreal d'une structure de taxation exemplairement di-versifiee; (2) elle ouvre brievement la porte a une fiscalite locale a caractere progressif; (3) elle interpelle l'organisa-tion regionale sur l'lle de Montreal. Repre-nons chacun de ces aspects dans l'ordre.
L'importance strategique de la diversite fiscale montrealaise a ete soulignee, des 1939, par Goldenberg et surtout par Pick. (29) A la fin des annees 1930, la metropole, qui avait depuis longtemps deja deborde le champ de l'impot foncier au sens strict avec la taxe d'affaires, la taxe d'eau et la taxe d'amusement, a, sur le plan pratique, une structure de taxation nettement plus diversifiee que toute autre ville canadienne, y compris Toronto (tableaux 1 et 2). Au tournant des annees 1940, faisant appel a presque tous les types de taxes municipales connues en Amerique a cette epoque, la Ville de Montreal ne tire de l'impot foncier (taxes foncieres et taxes locatives combinees) qu'environ 52 % de ses recettes locales, comparativement a plus de 76 % pour l'ensemble des municipalites cana-diennes. De fait, entre 1934 et 1950, les autres taxes locales prennent une part toujours plus grande du budget des recettes de la Ville de Montreal.
Cette diversification de la fiscalite n'est pas habituelle. Ainsi, Montreal est alors la seule ville canadienne a imposer une taxe de vente au detail. Outre-frontiere, mis a part New York (1934) et New Orleans (1936), il faut attendre les annees 1940 pour que le recours a une telle forme de taxation se propage. Bien que depuis les annees 1830, des municipalites de chacune des provinces aient experimente une grande variete de taxes sur le revenu, (30) l'impot sur le revenu est une mesure encore peu repandue au Canada, meme au niveau provincial. Aux Etats-Unis, les premieres villes a l'impo-ser sont Philadelphie (1938), St. Louis (1948), Cincinnati (1954) et Pittsburg (1954). (31)
Au-dela du debat sur la diversification fiscale, le pacte fiscal de 1935 innove a deux points de vue. D'abord, contraire-ment aux experiences qui ont eu lieu ail-leurs au Canada, notamment en Ontario, la metropole adopte un impot progressif sur le revenu, meme si la table d'impot ne comprend que trois paliers. (32) Les autorites municipales s'eloignent ainsi du <<rapport Bradshaw>> dont les conclusions avaient ete appuyees par les milieux d'affaires montrealais. En effet, les auteurs de ce rapport avaient plutot recommande une taxe sur le revenu des residants et une taxe sur les salaires des non-residants, imposees uniquement pour payer le cout des secours directs aux chomeurs. (33) En 1941-1942, la derniere annee ou il fut percu, la Ville introduit meme une plus grande progressivite de l'impot municipal sur le revenu. Pas moins de 45 plateaux d'imposition sont mainte-nant prevus. (34) A titre de comparaison, no-tons qu'il fallut attendre 1966 pour qu'une autre ville nord-americaine--New York--impose un impot municipal progressif sur le revenu de preference a une taxe sur les salaires. L'impot new-yorkais introduit par ailleurs un regime a deux vitesses dans lequel les residants et les non-residants sont imposes a des taux differents.
En second lieu, afin d'eviter la fuite vers la peripherie de l'activite commerciale, des industries et des menages a revenus plus eleves, la Ville de Montreal obtient l'autorisation de prelever les deux nou-velles taxes dans onze municipalites de la partie est de l'lle: les cites de Montreal, Westmount, Verdun et Outremont, les villes de Montreal-Est, Mont-Royal, Pointe-aux-Trembles, Montreal-Ouest, Saint-Laurent, Saint-Michel et Montreal-Nord (35) (figure 2). Une fois les frais d'administration et de perception de-duits, les revenus nets sont redistri-bues entre les municipalites membres au prorata de leur importance demogra-phique, (36) par l'intermediaire de la Commission metropolitaine de Montreal (CMM). (37)
En outre, dans le cas de l'impot sur le revenu des particuliers, selon l'interpretation que la ville centrale fait de la loi et de son reglement, les residants d'autres municipalites, dont les autres banlieues membres de la CMM, (38) qui travaillent a Montreal, y possedent des bureaux ou y entretiennent une clientele, (39) sont aussi mis a contribution. Leur municipalite ne participe toutefois pas au partage des revenus de la taxe. Cette interpretation a toutefois ete battue en breche par un ju-gement de la Cour superieure de la province de Quebec. (40)
Malgre tout, l'imposition de l'impot local sur le revenu a l'echelle de la region metropolitaine represente nettement une innovation et une originalite qui doit etre mise en evidence. Elle constitue une re-ponse certes partielle mais neanmoins ef-ficace au probleme de la taxation des non-residants.
Dans cette affaire en effet, Montreal n'est pas un simple agent de perception. Dans un cas, la ville centrale <<subventionne>> la banlieue. Dans l'autre cas, elle retire de l'operation un surplus de niveau comparable (tableau 2). Ce sont finale-ment les banlieues d'ouvriers et d'em-ployes, surtout Verdun, qui, en proportion de la contribution de leurs resi-dants, retirent le plus grand benefice.
[FIGURE 2 OMITTED]
Tout au long de la periode, dix pour cent environ du revenu de la taxe de vente percu sur le territoire de la ville de Montreal va dans les coffres des dix munici-palites de banlieue qui forment le territoire de base (tableau 3). Une telle politique de redistribution represente vrai-semblablement, pour Montreal, le prix a payer pour enrayer le mouvement de de-concentration qui ne pouvait manquer de resulter de l'imposition d'une telle taxe.
Par ailleurs, la ville centrale recupere le manque a gagner au moyen de l'impot sur le revenu. Dans ce cas en effet, la Cite de Montreal est la grande gagnante de la formule de repartition (tableau 4). Elle n'en est toutefois pas la seule benefi-ciaire. C'est aussi le cas de Saint-Laurent, Montreal-Nord, Pointe-aux-Trembles, Montreal-Est, Saint-Michel et, en particulier, Verdun.
En contrepartie, les residants de Mont-Royal, Montreal-Ouest, Outremont et, de facon remarquable, Westmount sont mis a contribution dans des proportions qui depassent clairement la quote-part recuperee par leur corporation municipale.
A l'origine, les municipalites de banlieue ne semblent pas s'etre objectees ni meme opposees avec quelque vigueur au rayonnement regional des nouvelles taxes montrealaises. (41) De fait, un lien etroit semble avoir ete fait (et accepte) entre ces impots et le fait de pouvoir be-neficier de certains services montrealais, notamment le transport en commun. C'est du moins ce qui se degage des representations faites par la Ville de Hampstead qui veut etre incluse dans l'aire d'application de l'impot municipal sur le revenu a la condition d'etre desser-vie par le tramway, dans le cadre et aux conditions habituelles du <<contrat>> entre la Montreal Tramways Company et la Ville de Montreal. (42) Bien sur, quelques-unes y trouvent leur compte au plan financier. Il est probable aussi que plusieurs aient vu dans ce mecanisme un moyen commode d'assurer le paie-ment des quotes-parts a la Commission metropolitaine de Montreal. Neanmoins, certaines municipalites doivent renoncer a une portion non negligeable de leur ri-chesse fiscale. En outre, elles perdent toutes un peu de leur autonomie aux mains de l'Administration de Montreal et de la Commission metropolitaine de Montreal.
En somme, le mode de redistribution de la taxe de vente permet, en quelque sorte, de tenir compte de la contribution indirecte des banlieusards a la sante economique de Montreal, notamment du centre-ville, du fait qu'ils viennent y faire une partie de leurs achats--parfois en meme temps qu'ils viennent y travailler. L'impot sur le revenu des particuliers a un caractere redistributif different, fonde sur la variabilite de la capacite de payer des contribuables des diverses parties de l'agglomeration urbaine. (43)
Toutefois, le fragile equilibre induit par le <<pacte fiscal de 1935>> a ete rompu au debut des annees 1940 lorsque le gou-vernement provincial a decide d'investir ces deux champs de taxation pour son propre compte. Les autorites munici-pales ont alors conserve le pouvoir de percevoir une taxe de vente au detail repartie entre les municipalites du District metropolitain de Montreal au prorata de leur population. Cependant, dans le cadre des <<Wartime Tax Rental Agreements>>, l'impot municipal sur le revenu a ete, pour cinq ans (de 1942-1943 a 1946-1947), remplace par une compensation provinciale annuelle fixe de 2 030 164 $ avant d'etre definitivement aboli sans contrepartie et sans formule de remplacement.
C'est ainsi que, par un curieux retour des choses, la ville centrale s'est trouvee a subventionner sa banlieue en lui aban-donnant une partie des recettes de la taxe de vente percue sur son territoire. Or, avec l'explosion demographique de la banlieue apres la Deuxieme Guerre mondiale jumelee au fait que la zone d'application de la taxe de vente est etendue a l'ensemble de l'lle plutot qu'au seul District metropolitain, ce transfert fiscal a pris de plus en plus d'importance. Ainsi, la part de la taxe de vente percue dans la zone metropolitaine versee a la Ville de Montreal n'est plus que de 74,67 % en 1964-1965 alors qu'elle etait de 85,79% en 1935-1936.
La Ville de Montreal se fait evidemment de plus en plus critique face au mode de redistribution du produit de la taxe de vente dans le district de Montreal. Elle reclame de nouvelles regles du jeu (44) mais surtout, elle revoit son approche de la fis-calite locale.
Vers la reconnaissance d'un statut particulier pour la metropole
Meme si cette preoccupation reste presente au niveau du discours, la Ville de Montreal ne cherche plus, a partir des annees 1950, a imposer directement ou in-directement les banlieusards. Forte de ses services metropolitains, mis en place graduellement depuis la deuxieme moitie des annees 1930, la metropole cherche plutot a faire reconnaitre sa specificite par Quebec. Une specificite au nom de laquelle elle reclame un meilleur partage des ressources publiques mobilisees a partir de son territoire.
Depuis la fin des annees 1930, la Ville de Montreal s'est effectivement mise a occu-per tout le champ laisse libre par l'ab-sence presque complete de structure regionale. (45) C'est ainsi que se multiplient les changements a sa structure administrative (voir les <<organigrammes>> de 1936 et de 1956).
C'est a cette epoque que Montreal consolide son experience et son expertise dans plusieurs domaines de l'activite municipale. La professionnalisation du Service des travaux publics, par exemple, est acquise a la faveur des grands travaux en infrastructures urbaines, en voirie et en transport en commun. Des missions municipales apparaissent, qui existent encore maintenant. De nou-veaux services sont crees. Au debut des annees 1940 sont mis sur pied l'Office d'initiative economique et touristique puis le Service de l'urbanisme et le Service du bien-etre social. Or, comme se plait a le souligner le <<Rapport Pa-quette>>, l'aire de desserte et les effets de ces nouveaux services ne se bornent pas aux limites territoriales de Montreal. (46) Ils profitent au contraire a toute l'agglomeration urbaine. Soulignons enfin la publication du premier plan directeur d'urbanisme de la metropole, en 1944.
Au cours de la decennie suivancte, la creation d'un Service de la circulation (1955) donne plus de mordant au Plan de la circulation de 1949 et suit de pres celle du Service des parcs (1954) qui, en plus de s'occuper de l'amenagement et de l'entretien des parcs, gere le Jardin botanique et organise les activites recreatives jusque-la assurees par le seul benevolat. Le secteur du logement social est aussi l'objet d'une premiere intervention majeure avec les Habitations Jeanne-Mance. Finalement, c'est en 1950 que la Ville de Montreal municipalise la Compa-gnie des tramways et entreprend la modernisation et l'extension du reseau de transport en commun a l'ensemble du ter-ritoire de la Commission metropolitaine de Montreal (voir figure 2).
Tous ces changements, et d'autres encore, sont autant d'initiatives qui contri-buent a faire de la Ville de Montreal le seul <<joueur>> metropolitain. D'ailleurs, deux commissions d'enquete souligne-ront de maniere tout a fait insistante la portee metropolitaine de plusieurs services et de nombreux equipements a la charge des seuls Montrealais. (47)
Dans ce contexte, entre 1952 et 1965, la Ville de Montreal profite de toutes les tribunes pour reclamer des modifications a sa fiscalite qui lui donneront les moyens de sa politique metropolitaine sans parte-naires. (48) Concretement, elle insiste beaucoup moins sur les effets de debordement et beaucoup plus sur sa mission regionale qui fait que <<certains services ou activites qui ont un caractere local dans une municipalite ont un caractere metropolitain quand il s'agit de la Ville de Montreal qui herite de problemes d'envergure metropolitaine>>. (49) Une mission metropolitaine qu'elle ne manque pas d'alimenter a l'aide de quelques coups de force (50): construction du metro en regie municipale, organisation de l'Exposition universelle de 1967, confection d'un schema directeur d'agglomeration (<<Horizon 2000>>) la meme annee, etc.
M-ontreal aime aussi faire valoir que le role de la municipalite contemporaine s'est nettement developpe et diversifie. Si la municipalite conserve ses fonctions liees a la protection et au service a la pro-priete, elle <<s'adresse beaucoup plus qu'autrefois a la personne meme du ci-toyen et a son activite>>. (51) La reconnai-sance, par le gouvernement provincial, de cette mission metropolitaine et de ce nouveau role devrait, aux yeux des autori-tes municipales, se traduire par l'obligation pour le premier d'assumer une part importante des besoins budgetaires de la seconde. La ville centrale compte maintenant moins sur les banlieusards que sur l'ensemble de la societe quebe-coise.
Au lieu de chercher a diversifier sa structure fiscale, a developper et a investir de nouveaux champs fiscaux locaux qui mettent a contribution l'ensemble des Montrealais <<en imposant des taxes et des fardeaux additionnels sur ses propres contribuables et citoyens et sur ceux qui travaillent et font affaires a Montreal>>, (52) l'Administration municipale prefere s'en remettre a des formules de partage d'assiettes fiscales et a des programmes de subventions incondition-nelles et conditionnelles. (53) Elle introduit surtout l'idee d'un subside annuel per capita calibre selon la taille de la municipalite. (54) Une solution qui fut de fait mise progressivement en pratique, au Quebec, dans la deuxieme moitie des an-nees 1960.
D'ailleurs, contrairement au milieu des an-nees 1930 ou les principales innovations--aussi bien l'impot sur le revenu que la taxe de vente ou la taxe sur le service tetephonique--s'alimentent au dyna-misme economique de la region, les propositions de reforme fiscale des an-nees 1952-1965 cherchent plutot a faire en sorte qu'une partie des revenus muni-cipaux soit <<a l'abri des variations econo-miques sur lesquelles la Cite n'a aucun controle>>. (55)
Parallelement, les dirigeants politiques montrealais pratiquent une politique de fermeture face aux municipalites de banlieue. Ils tentent plutot de developper avec le gouvernement provincial une relation privilegiee apte a permettre a la ville centrale de gerer seule la region. On en a pour temoignage la paralysie chroni-que dans laquelle la Ville de Montreal, profitant de son droit de veto, n'hesite pas a plonger la Corporation du Montreal metropolitain creee en 1959. (56)
Gerer l'agglomeration urbaine montrealaise: le role de la fiscalite
Ceux qui se sont interesses au debat sur l'organisation metropolitaine de meme que ceux qui l'ont anime ont donne beaucoup d'importance au point de vue <<reformiste>> qui tend a privilegier une logique de planification urbaine et de <<good government>>.
Ainsi, dans l'identification des facteurs qui expliqueraient la difficulte de faire emerger une structure metropolitaine a Montreal, historiens et analystes ont surtout insiste sur l'opposition entre les refor-mistes et les populistes, sur le facteur linguistique (du fait principalement que les Anglo-Montrealais apres s'etre retran-ches en banlieue, ont, avec succes, fait de celle-ci un instrument de promotion et de defense de leurs interets) et sur la ri-valite proverbiale entre le gouvernement quebecois et la Ville de Montreal, conju-guee a l'absence d'un reseau de villes de taille moyenne (comme on en trouve en Ontario, par exemple).
Cependant, on n'a pas beaucoup traite du fait que les grands projects d'amenagement ont ete formules sans prendre en compte le probleme de l'equite fiscale entre les Montrealais et les banlieusards. De ce fait, ils etaient au depart voues a l'echec. Formules dans l'abstrait des structures politico-administratives, d'une part, du jeu politique et de la scene politique, d'autre part, ces projets ne trouvent pas preneurs sur la scene locale. Seuls quelques individus bien pensants et quelques groupes prives a audience restreinte les animent ou les reprennent a leur compte. A. Germain fournit deux exemples de ce type : le projet du canal de l'aqueduc et celui de la Commission metropolitaine des parcs (57) dans les an-nees 1910. Le projet d'une Confederation d'arrondissements (de bourgs) pour l'lle de Montreal est de la meme farine. Ce projet est calque sur le modele mis de l'avant, a la meme epoque, par les re-formistes dans plusieurs grandes metro-poles americaines, dont Pittsburg, Cleveland et Saint-Louis. (58)
L'objectif ultime d'une telle reforme structurelle est de battre en breche la politique partisane a Montreal, en insistant particulierement sur l'enjeu de la planification urbaine. D'abord le fait d'un individu, (59) ce projet a ete porte par des groupes prives entre 1910 et 1950. Au milieu des annees 1930, la Ville de Montreal donne une credibilite nouvelle au concept d'une federation metropolitaine pour l'agglomeration montrealaise en dotant la region d'un debut de fiscalite regionale (60) et surtout en accordant un role a la Commission metropolitaine de Montreal.
Par la suite, le concept du <<borough system>> est reste dans les annales jusqu'en 1970 alors qu'il recoit enfin l'aval d'un corps municipal constitue--la Cite de Westmount--qui le propose moins pour provoquer une reforme des institutions regionales que pour desamorcer celle qui vient d'etre lancee par le gouvernement provincial avec la creation, l'annee prece-dente, de la Communaute urbaine de Montreal. (61)
Bien sur, ce projet a eu son importance. D'autant plus que si le modele confederal elabore par Nantel n'a pas eu de suites immediates, il a inspire pratiquement tous les projets ainsi que toutes les experiences partielles et les formes de gouvernement metropolitain depuis 1918. Mais jusqu'a la creation de la Communaute urbaine de Montreal, en 1969, ce modele--faute, notamment, d'etre accompagne de propositions fiscales qui assurent une meilleure equite fiscale entre les municipalites et entre les contri-buables--ne pouvait pas quitter les planches a dessin. Il n'a certainement pas su profiter de l'occasion qui lui a ete offerte par la Ville de Montreal dans les annees 1930.
En outre, il faut souligner qu'en donnant ainsi beaucoup d'importance aux initiatives privees du groupe reformiste, les analystes ont eu tendance a ignorer les experiences internes a l'appareil municipal. (62) Ainsi, il n'existe encore aucun bi-lan de l'episode du Service d'urbanisme et de recherche de la Commission metropolitaine de Montreal (1936-1939); l'histoire de cette derniere reste encore a faire. Il en va de meme de l'Office d'initiative economique et touristique (1937-1971), du Conseil economique du Grand Montreal (1942-1958), etc.
Dans cet article, nous avons eu l'occasion de voir comment l'etude de la fiscalite permet d'eclairer des dimensions peut-etre triviales mais neanmoins essen-tielles des enjeux urbains a Montreal. Ainsi, il est apparu qu'entre les annees 1910 et les annees 1960, les strategies fiscales de la ville centrale ont, par certains aspects, servi d'instrument de gestion de l'agglomeration urbaine. Il nous a surtout ete donne de constater que la seconde moitie des annees 1930 a ete une pe-riode plus intense a ce chapitre. A cette epoque en effet, la dimension resolu-ment metropolitaine de l'impot sur le reve-nu, de la taxe de vente--et, dans une moindre mesure, de la taxe sur le service telephonique--constitue une veritable strategie parallele a celle des partisans de l'administration par les professionnels.
Comment expliquer l'importance des innovations fiscales introduites par la Ville de Montreal a cette epoque? Avant que l'on puisse definitivement repondre a cette question, d'autres recherches se-ront necessaires. Bien sur, c'est d'abord pour une question de survie financiere que Montreal innove au chapitre de la fiscalite. Cependant, au cours de l'administration Rinfret-Gabias (1932-1934) et surtout pendant celle de l'equipe Houde-Savignac (1934-1936), c'est l'ensemble de l'appareil municipal--dans ses instances politiques et administratives--qui semble vouloir innover au chapitre de la gestion financiere et de la gestion des ressources humaines, (63) au chapitre de l'amenagement du territoire (zonage) et de la circulation, au chapitre de l'even-tail des services municipaux, les autorites montrealaises se montrant sensibles a l'elargissement des services a la personne et a la mise en place d'une gestion metropolitaine, (64) etc.
Bref, dans les annees 1930, malgre le po-pulisme de ses dirigeants politiques sur lequel l'historiographie s'est tres lourde-ment attarde, la metropole a ete capable de politiques originales; elle a ete un lieu d'experimentation et d'innovation dans la construction d'un Etat moderne au Quebec et au Canada. Cette hypothese est au centre de nos recherches en cours sur le processus de formation de l'appareil administratif municipal a Montreal.
Notes
* Une premiere version de ce texte a ete presentee dans le cadre de l'atelier sur <<la vie urbaine et l'administration municipale, XIX[degrees]-XX[degrees] siecles>> de Montreal 1642-1992, ville de contacts et d'echange, 45e Congres annuel de l'lnstitut d'histoire de l'Amerique francaise, Montreal, 8-10 octobre 1992. Cet article a ete realise dans le cadre d'un projet de recherche portant sur l'histoire de l'organisation administrative de la Ville de Montreal depuis la fin du XIX[degrees] siecle. Ce projet a beneficie du soutien financier du fonds FCAR par l'intermediaire de son programme d'aide a l'etablissement de nouveaux chercheurs.
1. Warren Magnusson, <<Urban politics and the local State>>, Studies in Political Economy, no 16, 1985, p. 111-142 et <<Political science, political economy, and the Local State>>, Urban History Review/Revue d'histoire urbaine, vol. XIV, no 1, juin 1985, p. 47-53.
2. Anthony Orum, <<Apprehending the city. The view from above, below, and behind>>, Urban Affairs Quarterly, vol. 26, no 4, juin 1991, p. 589-609.
3. Jean-Pierre Collin, <<La Cite sur mesure: Specialisation sociale de l'espace et autonomie munici-pale dans la banlieue montrealaise, 1875-1920>>, Urban History Review/Review/Revue D'histoire urbaine, vol.XIII, no 1, juin 1984, p. 19-34.
4. Gerard Divay et Jacques Leveillee, avec la collaboration de Bernard McCann, La reforme munici-pale et l'Etat quebecois (1960-1979), Montreal, INRS-Urbanisation, <<Etudes et documents>> no 27, septembre 1981, p. 13.
5. Trois annexions sont realisees: Rivieres-des-Prairies en 1963, Saraguay l'annee suivante et Saint-Michel en 1968.
6. Respectivement maire et president du Comite executif de la Ville de Montreal tout au long des annees 1960.
7. Sur l'histoire de la gestion regionale a Montreal, voir Gerard Divay et Jean-Pierre Collin, La Communaute urbaine de Montreal: de la ville centrale a lile centrale, Montreal, INRS-Urbanisation, 1977; Paul-Andre Baril, Metropolitan Reform in Montreal, Memoire de M.A. (science politique), Universite McGill, 1980; Andrew Sancton, Governing the Island of Montreal: Language Differences and Metropolitan Politics, Berkeley, University of California Press, 1985.
8. A ce propos, voir Jacques Leveillee et Marie-Odile Trepanier, <<Evolution de la legislation relative a l'espace urbain au Quebec>>, Revue juridique Themis, vol. 16, no 1-2, 1981-1982, p. 19-121.
9. Gregory James Levine, <<Criticizing the assessment : Views of the property evaluation process in Montreal 1870-1920 and their implications for historical geography>>, Geographe canadien/Canadian Geographer, vol. 8, no 3, 1984, p. 276-284; <<To tax or not to tax? Political struggle over personnal property taxation in Montreal and Toronto, 1870 to 1920>>, International Journal of Urban and Regional Research, vol. 11, no 4, decembre 1987, p. 543-565; <<Tax exemptions in Montreal and Toronto, 1870 to 1920>>--Cahiers de geographie du Quebec, vol. 35, no 94, avril 1991, p. 117-134.
10. Voir Pierre-Henri Derycke et Guy Gilbert, Economie publique locale, Paris, Economica, 1988.
11. Direction generale de la gestion des documents et des archives (DGDA), Ville de Montreal, Dossiers de resolutions du Conseil et du Comite executif, 3ieme serie, no 1692.
12. Reglement 1628 de la Cite de Montreal, 20 juin 1940.
13. Jean-Pierre Collin, Pouvoir municipal et enjeux politiques locaux dans la Paroisse de Montreal, de 1871 a 1921, Memoire de maitrise (science politique), Universite du Quebec a Montreal, aout 1982.
14. Commission d'etude des problemes metropolitains de Montreal, Rapport (rapport Paquette), Montreal, Editeur officiel du Quebec, janvier 1955, p. 53.
15. Sur cet aspect de l'histoire politique montrealaise, voir Sancton, Governing the Island ...
16. Robert Rumilly, Histoire d'Outremont, Montreal, Lemeac, 1975, p. 87-109; Jean-Pierre Collin, Pouvoir municipal....
17. Voir Jean-Pierre Collin, Pouvoir municipal ...
18. Ce debat n'est pas clos. En fait, il revient periodi-quement dans l'actualite politique municipale aussi bien en Europe et aux Etats-Unis qu'au Canada et donne parfois lieu a des debats dans la litterature specialisee. Voir, parmi plusieurs au-tres, Regis Deloche, <<La querelle de la centralite ou le paradoxe du passager legalement clandestin>> et Bernard Jurion, <<Externalites et depenses des villes centrales>>, dans Paul Burgat et Claude Jeanrenaud (dir.), Services publics locaux: de-mande, offre et financement, Paris, Economica, 1987; Jeffrey A. Slovak, <<City spending, suburban demand, and fiscal exploitation: a replication and extension>>, Social Forces, vol. 64, no 1, septembre 1985, p. 168-190. Sur le cas de Montreal, voir Jean-Pierre Collin, <<Le partage fiscal banlieue-ville centrale: les montrealais subvention-nent-ils les banlieusards?>>--Revue canadienne de science politique / Canadian Journal of Political Science, vol. 17, no 1, mars 1984, p. 109-131 et Les effets de debordement a Montreal. L'impact budgetaire du navettage pour la ville centrale: considerations theoriques et pratiques, Montreal, INRS-Urbanisation et Ville de Montreal, mars 1992.
19. 7 Edouard VII, c. 63, s. 20. Cet article de la charte fut abroge en 1937: 1 George VI, c. 103, s. 42.
20. Jean-Baptiste Gagnepetit, <<Chronique ouvriere>>, La Presse, 6 juin 1891, p. 4.
21. Il est precise dans la loi que la taxe ne doit pas exceder un pour cent sur le surplus de douze cents piastres, ce qui correspond en gros au salaire moyen des travailleurs masculins adultes en 1921. Voir Terry Copp, Classe ouvriere et pauvrete. Les conditions de vie des travailleurs montrealais, 1897-1929, Montreal, Boreal Express, 1978, p. 40.
22. DGDA, Dossiers de resolutions du Conseil et du Comite executif, 3ieme serie, no 3917.
23. Lettre du Surintendant du Service des privileges et des licences au president de la Commission administrative, 17 octobre 1919, DGDA, Dossiers de resolutions du Conseil et du Comite executif, 3ieme serie, no 3917.
24. The Gazette, 19 decembre 1934.
25. Cite de Montreal. Rapport sur des sources additionnelles possibles de revenu, (Rapport Bradshaw), Montreal, 3 decembre 1934, 19 pages.
26. Voir Reglement imposant une taxe de vente dans le territoire de la cite de Montreal et de certaines municipalites sous le controle de la Commission metropolitaine de Montreal. Portant d'abord le nu-mero 1336, ce reglement est renouvelle chaque annee jusqu'en 1941. Par la suite, il ne fut amende qu'une seule fois en 1950.
27. Voir Reglement imposant une taxe dite "Impot sur le revenu" dans le territoire de la cite de Montreal et de certaines municipalites sous le controle de la Commission Metropolitaine de Montreal. Portant d'abord le numero 1337, ce reglement est renouvelle chaque annee jusqu'en 1941.
28. La taxe sur le service local de telephone, la taxe de charite sur les appareils de radio, la taxe sur les primes d'assurance et la taxe d'eau sur les vehicules automobiles. Bien qu'elles rapportent peu, ces taxes mettent a l'occasion les banlieusards a contribution et ajoutent a la diversification du portefeuille fiscal de la Ville de Montreal.
29. H. Carl Goldenberg, Finances municipales au Canada, Ottawa, Commission royale sur les relations entre le Dominion et les provinces, 1939 et Alfred J. Pick, The Administration of Paris and Montreal: A Comparative Study, Montreal, Witness Press, 1939. Il faut d'ailleurs deplorer que, dans son diagnostic particulierement pessimiste de la situation financiere et fiscale de la Ville de Montreal, C. E. Huet-Massue n'ait pas pris le temps d'evaluer l'impact des mesures de redres-sement mises en place en 1935 (Financial and Economic Situation of Montreal Compared with that of Toronto, Montreal, The Shawinigan Water and Power Co., mars 1940).
30. Sheldon Silver, <<The feasibility of a municipal income tax in Canada>>, Canadian Tax Journal, vol. 16, 1968, p. 398-406.
31. Dans tous les cas, il s'agit plus exactement d'un impot sur la masse salariale.
32. Au cours des debats, les dirigeants politiques de Montreal ont evoque un temps l'idee d'un impot encore plus progressif (entre 2% et 19% du revenu annuel net). Ce projet prevoyait egalement que le taux de la taxe d'affaires serait rendu progressif selon une table d'imposition variant de 10% a 20%. Voir Montreal Star, 24 janvier 1935; rapporte dans Terry Copp, <<Montreal's Municipal Government and the Crisis of the 1930s>>, Alan F. J. Artibise et Gilbert A. stelter (dir.), The Usable Urban Past: Planning and Politics in the Modern Canadian City, Toronto, Macmillan, 1979, p. 112-129.
33. Cite de Montreal, Rapport sur des sources additionnelles ...
34. Le reglement 1680 prevoit, en effet, qu'a l'avenir l'impot municipal sur le revenu variera de 3% de l'impot federal verse l'annee precedante jusqu'a concurrence de 260$ a 14% de ce montant pour ceux qui auront verse au federal en impot plus de 40 000$.
35. La Ville de Montreal avait a l'origine demande l'autorisation de prelever la taxe de vente et l'impot sur le revenu des particuliers dans l'ensemble du territoire de l'lle de Montreal
36. Au prorata de la population de chacune tel qu'etabli au recensement de 1931
37. Cette derniere avait ete creee en 1921 pour re-pondre aux difficultes financieres serieuses de quatre municipalites de banlieue a la suite du re-fus de Montreal de proceder a de nouvelles annexions. La Commission a pour mandat principal de regler les dettes de celles-ci et, plus largement, de surveiller, a l'avenir, l'exercice du pou-voir d'emprunt et de controler les finances d'un ensemble plus large de municipalites. Ces der-nieres se partageront, par ailleurs, le reglement des dettes des banlieues en faillite. La Commission metropolitaine de Montreal exerce donc au-pres d'une quinzaine de municipalites de l'est de lile de Montreal des pouvoirs de surveillance et, eventuellement, de mise en tutelle analogues a ceux qui furent confies, dix ans plus tard, a la Commission municipale du Quebec.
38. Lachine, LaSalle, Saint-Pierre et Hampstead.
39. Le Devoir, 18 mai 1937.
40. DGDA, Dossiers de resolutions du Conseil et du Comite executif, 3ieme serie, no 50457.
41. De fait, la principale manifestation d'opposition est venue de la banlieue la plus favorisee, sur le plan des finances municipales : la Cite de Verdun. C'est toutefois pour des raisons d'equite sociale que le maire Herve Ferland s'en prend, sans succes, au reglement montrealais sur la taxe de vente. Il s'objecte, principalement, au fait qu'en fixant le plancher d'imposition a 10cents, plusieurs articles de la vie courante, qui ne sont pas compris dans la liste des premieres necessites de la vie, sont ainsi taxes a des taux reels variant de 3% a 10%.
42. Nous avons entrepris une etude des debats et des enjeux qui ont marque l'histoire de la Commission metropolitaine de Montreal. A l'occasion de cette recherche, nous comptons eclairer cet episode des relations ville centrale-banlieue.
43. Les onze municipalites du territoire de base comprennent, en 1941 comme en 1931, environ 96% de la population de l'ile de Montreal et 93% de celle de la region metropolitaine de recensement.
44. Au debut des annees 1960, elle obtient partielle-ment gain de cause lorsque, dans la foulee des travaux de la Commission royale d'enquete sur la fiscalite (Belanger), la Loi de l'impot sur la vente au detail est modifie par le Bill 35. L'uniformisation de la Taxe de vente du Quebec (TVQ) a la grandeur du Quebec s'accompagne de la remise d'une part (2 points sur 6) aux municipalites qui s'appuie sur un triple critere geographique de repartition. Ainsi chaque municipalite recoit une somme qui correspond: pour 50% au revenu percu sur son territoire; pour 40% au revenu percu sur une base regionale; pour 10% au revenu percu dans l'ensemble du Quebec. Mais, en meme temps qu'elle est, d'une certaine maniere, generalisee, la taxe municipale de vente est ainsi transformee en subvention inconditionnelle.
45. Entre 1936 et 1939, la Commission metropolitaine de Montreal semble prendre de l'assurance car elle se dote d'un service d'urbanisme et de recherche. Mais elle se montre finalement incapable de produire quelque chose de neuf malgre le fait que le pacte de 1935 lui avait reconnu un role, si administratif soit-il, en matiere de fiscalite locale. Il est d'ailleurs significatif qu'en 1940, plu-tot que d'y avoir recours, on fait appel a la tutelle de la Commission municipale de Quebec pour solutionner le probleme financier de Montreal.
46. Commission d'etude des problemes metropoli-tains de Montreal, op. cit.
47. Commission d'etude des problemes metropoli-tains de Montreal, op.cit.; Commision d'etude des problemes intermunicipaux dans l'ile de Montreal, Rapport (rapport Blier), Quebec, Editeur oficiel du Quebec, decembre 1964, 107 pages.
48. Qui par certains aspects rappelle la grande vague des annexions du tournant du siecle comme le montrera par la suite la priorite donnee au projet de faire d' <<Une ile, une ville>>.
49. Commission d'etude des problemes intermunicipaux dans l'lle de Montreal, op. cit., p. 6.
50. Roger Bedard, La bataille des annexions, Montreal, Editions du Jour, 1964; Gerard Divay et Jean-Pierre Collin, La Communaute urbaine de Montreal ...
51. Ville de Montreal, Memoire de la Ville de Montreal a la Commission royale d'enquete sur la fiscalite, mai 1964, p. 63.
52. Cite de Montreal, Rapport sur des sources additionelles possibles ..., p. 1.
53. Les mesures mises de l'avant jusqu'au milieu des annees 1960 sont, en regle generale, inspirees du Rapport du Comite charge d'etudier la question de la repartition des taxes et obligations entre la Ville de Montreal et les gouvernements superieurs, 21 novembre 1953.
54. Comme pour la taxe de vente, vingt ans plus tot, cette idee est empruntee aux pratiques en cours dans la Ville et dans l'Etat de New York.
55. Cite de Montreal, Memoire de la Cite de Montreal a la Commission royale d'enquete sur les problemes constitutionnels, Montreal, ler septembre 1955, p. 177.
56. Sur ces questions, voir Gerard Divay et Jean-Pierre Collin, La Communaute urbaine de Montreal ...
57. Annick Germain, Les Mouvements de reforme urbaine a Montreal au tournant du siecle. Modes de developpement, modes d'urbanisation et transformations de la scene politique, Montreal, Centre d'information et d'aide a la recherche, De-partement de sociologie, Universite de Montreal, 1984, p. 88-91 et 322-324.
58. Jon C. Teaford, City and Suburb. The Political Fragmentation of Metropolitan America, 1850-1970, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1979.
59. L'honorable Guillaume Alphonse Nantel, La metropole de demain. Avenir de Montreal, Montreal, Typ. Adjutor Menard, 1910.
60. Ce geste est certainement l'un des plus significatif qui ait ete pose pour permettre l'emergence d'une dynamique metropolitaine a Montreal avant la creation de la Communaute urbaine de Montreal, en 1969.
61. Cite de Westmount, Autorites municipales dans la region metropolitaine de Montreal, Westmount, 1970.
62. Outre Annick Germain et Andrew Sancton, op.cit., voir Harold Kaplan, Reform, Planning, and City Politics: Montreal, Winnipeg, and Toronto, Toronto, University of Toronto Press, 1982; Jean-Francois Leonard, L'evolution du role du Service d'urbanisme de la ville de Montreal dans l'orientation de la politique d'amenagement de la ville de Montreal, 1941-1971, These de M.A. (science politique), Universite du Quebec a Montreal, 1974.
63. Michele Dagenais, Dynamique d'une bureaucratie. L'administration municipale de Montreal et ses fonctionnaires, 1900-1945. These de Ph. D. (histoire), Universite du Quebec a Montreal, decembre 1992.
64. Jean-Pierre Collin, <<Civic Management in Montreal at the End of the Great Depression>>, communication presentee dans le cadre du Douzieme congres biennal de l'Association for Canadian Studies in the United States, New Orleans, Louisiana, 17-21 novembre 1993, 17 pages et annexes. acres 1 1918 Ville de Maisonneuve 1157,00 2 1916 Ville du Sault-au-Recollet 1150,00 3 1916 Ville de Cartierville 1293,00 4 1914 Partie de la paroisse de Saint-Laurent 92,70 5 1912 Partie du village de Cote-Saint-Luc 373,00 6 1910 Partie de la paroisse de Saint-Laurent 877,50 7 1910 Ville de Longue-Pointe 4193,70 8 1910 Ville de Bordeaux 868,28 9 1910 Village d'Ahuntsic 726,50 10 1910 Village de Beaurivage 46,50 11 1910 Village de Tetrauville 311,30 12 1910 Village de Rosemont 1431,50 13 1910 Ville de Notre-Dame-de-Grace 2536,00 14 1910 Ville de Cote-des-Neiges 1402,17 15 1910 Ville de Saint-Louis 720,00 16 1910 Ville de Saint-Paul 263,00 17 1909 Ville Emard 951,00 18 1909 Partie de la ville d'Outremont 17,23 19 1909 Village De Lorimier 391,00 20 1908 Partie de la paroisse du Sault-au-Recollet 313,00 21 1908 Ville de Notre-Dame-des-Neiges 1131,07 22 1908 Partie du village de Rosemont 85,00 23 1908 lie Sainte-Helene 135,00 24 1907 Partie de la paroisse de Saint-Laurent 960,00 25 1906 Partie de la paroisse du Sault-au-Recollet 863,60 26 1906 Partie du village de Rosemont 185,00 27 1905 Village de Villeray 60,00 28 1905 Ville de Saint-Henri 450,00 29 1905 Ville de Sainte-Cunegonde 124,00 30 1893 Ville de la Cote-Saint-Louis 850,00 31 1887 Village de Saint-Gabriel 330,00 32 1886 Ville de Saint-Jean-Baptiste 308,00 33 1883 Ville d'Hochelaga 1260,00 34 1874 Parc du Mont-Royal 35 1840-1883 Cite de Montreal 6298,74 * Superficle comprise dans cella de Montreal Cartographie INRS-Urbanisation Figure 1: Les annexion a la cite de Montreal, 1883-1918 TABLEAU 1 -- Evolution du budget des recettes de la Ville de Montreal, par type de laxe ou de revenu, 1931-1971. (en %) 1931 1940-41 1950-51 1960-61 1970-71 Taxes foncieres 50.4 35.0 30.7 34.7 37.5 Taxes locatives 23.8 17.8 22.4 26.7 25.6 Autres taxes locales 4.0 18.3 22.5 17.3 14.8 Tarification* 8.4 7.1 8.4 7.0 11.2 Autres revenus** 13.4 12.8 16.0 12.6 7.7 Transferts 0.0 9.0 0.0 1.7 3.2 TOTAL (en 000$) 29 978 47 844 70 446 139 837 312 741 * En 1970-1971, la Ville de Montreal a recu des autres municipalites membres de la nouvelle Communaute urbaine de Montreal 24 260 183$ pour couvrir leur quote-part des couts du service de police. ** Comprend le surplus accumule au fonds general ajoute au revenu de l'annee courante. Source : Ville de Montreal, Rapports annuels du Directeur des finances. Compilations de l'auteur. TABLEAU 2 -- Taxe de vente et impot sur le revenu: revenus percus sur le territoire de Montreal et quote-part encaissee par la Cite de Montreal, par annee. (en 000$) 1935-36 1936-37 1937-38 1938-39 1939-40 TAXE DE VENTE Revenu brut 3315 3823 4180 4083 4440 Revenu net 2986 3457 3781 3686 4020 IMPOT SUR LE REVENU Revenu brut 878 901 1063 1254 1248 Revenu net 1221 1268 1444 1745 1792 TOTAL Revenu brut 3897 4429 4924 5016 5351 Revenu net 3912 4432 4908 5108 5475 Source: Ville de Montreal, Direction de la gestion des documents et des archives (DGDA), Dossiers de resolutions du Conseil municipal et du Comite executif, 3e serie, no 50457. Compilations de l'auteur. TABLEAU 3 -- Proportion de la taxe de vente et de l'impot sur le revenu preleve sur le teritoire de Montreal, par annee, comparee a sa quote-part. (en %) TAXE DE VENTE Quote-part de Montreal 1935-36 1936-37 1937-38 1938-39 1939-40 85.79 95.24 94.87 94.62 94.87 94.74 IMPOT SUR LE REVENU Quote-part de Montreal 1935-36 1936-37 1937-38 1938-39 1939-40 85.79 61.70 60.96 61.54 61.63 59.74 Source : Ville de Montreal, Direction de la gestion des documents et des archives (DGDA), Dossiers de resolutions du Conseil municipal et du Comite executif, 3e serie, no 50457. Compilations de l'auteur. TABLEAU 4 -- Surplus (ou deficit) annuel resultant de la formule de repartition de l'impot sur le revenu, par municipalite. (en 000$) 1935-36 1936-37 1937-38 1938-39 1939-40 Montreal 343 367 380 491 544 Westmount -383 -399 -460 -511 -600 Outremont -39 -40 -65 -96 -71 Montreal-Ouest -11 -12 -14 -16 -16 Mont-Royal 0 -0,5 -1 -3 -5 Verdun 89 92 104 125 129 Saint-Laurent 8 8 9 11 10 Montreal-Nord 6 7 8 10 10 Pointe-aux-Trembles 4 4 5 6 6 Montreal-Est 3 3 4 5 5 Saint-Michel-de-Laval 2 2 3 3 3 Autres -23 -30 -17 -24 -14 Source: Ville de Montreal, Direction de la gestion des documents et des archives (DGDA), Dossiers de resolutions du Conseil municipal et du Comite executif, 3e serie, no 50457. Compilations de l'auteur.