Tertiarisation et transformation de l'espace urbain: la rue McGill a Montreal (1842-1934).
Poitras, Claire
Resume
Cette article prend comme terrain d'etude un espace montrealais (la rue McGill) afin d'analyser le processus de tertiarisation entre les annees 1842 et 1934. D'une maniere specifique, nous traitons des dimensions urbanistiques et architecturales reliees a ces changements. Condense de l'histoire du tertiaire urbain a Montreal, l'amenagement de la rue McGill met en lumiere des tendances de developpement qui prevalent dans la metropole moderne. Jusqu'en 1900, l'economie tertiaire est controlee par des marchands de tailles variees et dont les activites s'inscrivent dans un marche local et regional. Apres 1900, les activites commerciales reculentpourfaire place aux activites manufacturieres et aux bureaux dans le secteur des transports et des communications. La place du tertiaire de direction marque alors le nouveau role assume par la rue McGill dans l'economie montrealaise.
Abstract
This paper uses a space in Montreal (McGill Street) to analyze the growth of the service-based economy between 1842 and 1934. Specifically, it focuses on the urbanistic and architectural aspects linked to the expansion of the service sector. Reflecting the main trends that have shaped the service-based economy, McGill Street's built environment shows development tendencies that prevail in the modern metropolis. up until 1900, the service-based economy is controlled by merchants of different sizes and whose activities take part at the local and regional level. After 1900, retail activities retreat to make place for industrial activities and offices in the transportation and communication sectors. Thus, the increased importance taken by management services gives McGill Street a new role in Montreal's economy.
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En deambulant rue McGill (1) artere reliant la vieille ville au centre des affaires moderne, on est frappe par ses caracteristiques urbanistiques et architecturales uniques Montreal. Mesurant vingtcinq metres de largeur et longue denviron un kilometre, cette rue rectiligne affiche un cadre bati relativement homogene constitue d'edifices commerciaux et de bureaux - certains etant tres imposants -- construits, pour la plupart, entre les annees 1840 et 1934 (figures 1 et 2). Selon toute vraisemblance, cette artere - et son prolongement en face du square Victoria -- a deja assume un role metropolitain ou se concentraient des activities dont le rayonnement depassait le cadre montrealais.
Une analyse historique du developpment de a rue McGill, et en particulier de ses fonctions urbaines, devrait lever le voile sur son role dans la dynamique economique montrealaise et continentale. Jusqu'a quel point les forces l'ceuvre dans la transformation du cadre bati sont-elles le reflet d'une redefinition des tendances et des orientations du developpement urbain? Dans quelle mesure un espace comme la rue McGill a-t-il pu jouer un role strategique dans l'emergence de Montreal titre de metropole moderne?
La periode etudiee (1842-1934 (2)) coincide avec le renforcement des activites tertiaires en milieu urbain. Certes, l'industrialisation de l'economie prend une envergure inedite (3) mais de plus, elle est accompagnee du developpement des activites tertiaires rattachees aux grands secteurs comme les transports et les communications, la finance et le commerce. Notre objectif est de mettre en lumiere les implications urbanistiques de 'insertion du tertiaire urbain dans l'amenagement. Notre hypothese est que le processus de tertiarisation renferme non seulement des consequences economiques mais qu'il a aussi une portee urbanistique, c'est-a-dire quil entraine une modification du tissu urbain et des formes architecturales le qualifiant. Qui plus est, l'etude de la tertiarisation de l'economie de la metropole a l'echelle d'une rue met en relief la diversite interne - voire la complexite -- de ce processus. Notre analyse exploratoire porte sur la periode au cours de laquelle sont implantes les premiers sieges soclau x rattaches aux grands secteurs economiques des XIX (e) et XX (e) siecles, notamment les transports et les communications. Elle met 'accent sur le milieu d'insertion, le cadre bati et l'usage des batiments. Pour analyser 'insertion du tertlaire urbain partir du cas de la rue McGill, nous avons eu recours aux annuaires Lovell entre 1842 et 1934 qui fournissent la liste de tous les etablissements des rues de Montreal. Entre 1842 et 1867, les annuaires ne contiennent qu'une liste de personnes et un repertoire de commerces organises selon leur type. Apres 1867, ils contiennent un repertoire par rue; ce qui permet d'avoir une idee plus juste des activites qui se concentrent rue McGill. Nous y avons repere des informations relatives aux fonctions urbaines des etablissements ayant pignon rue McGill selon un intervalle de dix ans partir de 1842 et ce, jusquen 1934. Nous avons proceede un denombrement des etablissements par fonctions urbaines. En outre, pour mieux saisir la nature des activites tertiaires urbaines, no us avons regroupe les etablissements tertiaires par secteur: le commerce de gros et de detail, les services la consommation, la restauration et l'hebergement, les finances, les assurances et l'immobilier, les transports et les communications.
La rue McGill peut etre consideree, en quelque sorte, comme un espace revelateur des transformations economiques qui ont marque Montreal entre 1842 et 1934. Condense de l'histoire du tertiaire urbain, cette rue permet de comprendre le developpement du centre des affaires et de ses quartiers limitrophes. Qui plus est, d'une maniere inattendue, son developpement, bien qu'il ait connu un long temps d'arret a partir du debut des annees 1930, reprend, depuis quelques annees, un nouvel essor avec la mise en place des activites rattachees ce qu'il est maintenant convenu d'appeler la nouvelle economie Autrement dit, cette artere met en lumiere des tendances de developpement urbain qui persistent encore aujourd'hui et qui sont reliees aux transformations du role economique des agglomerations.
Le texte est divise en trois parties. Premierement, nous passons en revue les principaux travaux qui not analyse le deploiement du tertiaire urbain Montreal. En deuxieme lieu, nous effectuons un bref historique du developpement de la rue McGill en mettant l'accent sur son contexte d'insertion. La troisieme partie presente les principales caracteristiques du cadre bati ainsi que ses mutations sur le plan des fonctions urbaines. A cette fin, nous avons degage trois sous-periodes pour illustrer les etapes significatives correspondant des changements formels et fonotionnels.
Le tertia ire dans la ville
Comment peut-on definir le tertiaire urbain (4)? Typiquement, dans les agglomerations nord-americaines contemporaines, un centre-vile (5) ou un quartier des affaires (downtown, ou central business district) rassemble des fonctions particulieres comme l'administration, la finance, le commerce de detail, l'hotellerie et a restauration, les activites de culture et de divertissement. De plus, se caracterise par la quasi-inexistence des fonctions residentielles et industrielles. La concentration d'emplois dans le secteur tertiaire se traduit, d'une part, par un cadre bati de grand gabarit et, d'autre part, par une separation stricte des activites dans l'espace. Un reseau de transport collectif performant et des voies rapides permettent aux milliers d'usagers d'acce der au caeur de la ville.
Afin de mieux comprendre ce qui est survenu au cours de la periode que nous examinons et qui coincide avec l'emergence du tertiaire urbain, titre comparatif, considerons brievement ce qui c'est passe ce chapitre aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale. Ce que nous constatons alors, c'est que les approches urbanistiques inspirees du Mouvement Moderne donnent lieu la construction de vastes immeubles multifonctionnels qui concentrent bureaux, commerces et hotels. Parmi les nombreuses interventions urbanistiques qui transforment de fond en comble lespace central montrealais, on peut mentionner l'elargissement de certaines arteres, notamment le boule vard Dorchester (aujourd'hui le boulevard Rene-Levesque), la mise en forme des super-ilots - le ton est donne avec le projet de la gare Centrale construite par le CN en 1943 a laquelle se greffe l'hotel Reine-Elizabeth en 1955, suivi de La Place Ville-Mane erigee entre 1959 et 1962 - et la construction de megastructures comme la Place Bonaventure inauguree en 196 7. Ces interventions exigent des remembrements majeurs de parcelles. II en resulte, entre autres choses, une disparition de petites rues et de ruelles. Au cours des annees 1960, de grands projets urbains sont egalement realises dans le but dancrer les institutions culturelles de prestige au centre-ville.
Le changement de la structure fonctionnelle du centre-ville montrealais met en lumiere la disparition de la fonction residentielle dont les lotissements font place a des immeubles de bureaux. Au cours des annees 1950 et 1960, plusieurs grands projets modifient certains secteurs centraux de la ville qui etaient auparavant habites et occupes par des fonctions urbaines traditionnelles. Le developpement des nouveaux espaces du tertiaire et d'un centre des affaires typiquement nord-americain occasionne des perturbations majeures dans le tissu urbain ancien.
Au-dela de la reconfiguration des rues et des ilots et de la specialisation accrue de lespace, le developpement du centre-ville montrealais moderne est aussi caracterise par un phenomene marquant. Il sagit de la coexistence de deux secteurs de bureaux (6), et ce, des la fin des annees 1920 : un situe au sud, a proximite de la place d'Armes et du square Victoria et lautre un peu plus au nord, pres des squares Phillips et Dorchester.
Au cours des annees 1960, cette coexistence de deux secteurs d'affaires est renforcee. L'un des effets du dedoublement du centre-ville est d'avoir limite la reconstruction du quartier des affaires traditionnel. Cela a permis de sauvegarder tout un pan de la ville victorienne et edouardienne qui, autrement, aurait disparu sous le pic des demolisseurs pour faire place aux immeubles de bureaux modernes ou encore a des espaces de stationnement, comme ce fut le cas Toronto (7).
Ce bref portrait des principaux traits marquants du centre-ville montrealais correspond au modele qui s'est repandu en Amerique du Nord aux lendemains de a Seconde Guerre mondiale. Il permet de voir que la tertiarisation a alors donne lieu a des changements considerables eu egard au tissu social fonctionnel de lespace central, tout en redefinissant le paysage urbain.
A Montreal, Ihistoire du tertiaire urbain, depuis les annees 1950, a beaucoup retenu 'attention des chercheurs. Cela sexplique en bonne partie par le poids important qu'acquiert ce secteur dans l'economie locale aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale. Tous les indicateurs convergent vers un tournant definitif partir de cette periode : entre 1951 et 1991, la part de l'emploi tertiaire dans l'economie montrealaise passe de 51,6 % 76,2 %. De plus, en parallele l'accroissement des emplois dans le secteur tertiaire, a part des emplois dans le secteur secondaire baisse de facon continue. Cette reorientation de l'economie montrealaise est tres claire apres 1949, comme le demontrent les resultats dune analyse de lutilisation du sol publiee par le Service durbanisme de la Ville de Montreal en 1964 et qui constitue le premier portrait du fait tertiaire urbain moderne (8).
Dune maniere generale, les etudes qui se sont penchees sur le role des activites tertiaires dans a structuration de 'espace montrealais ont mis accent sur Ia periode suivant la Seconde Guerre mondiale, compte tenu de ses repercussions considerables sur le tissu urbain. Cette demarche se rattache la tradition geographique et montre le phenomene du deplacement du centre-ville depuis le Vieux-Montreal et le port vers le mont Royal alors que les bureaux suivent le commerce qui fut le premier etre relocalise rue Sainte-Catherine. A cet egard, la rue McGill est strategiquement localisee etant donne que son prolongement - face au square Victoria et qul se poursuit avec le chemin de La Cote-du-Beaver-Hall - relie physiquement l'ancien et le nouveau secteur d'implantation du tertiaire.
Comment se definit le tertiaire urbain avant les annees 1940 et quelles sont ses principales expressions urbanistiques? Les recherches qui ont porte sur l'evolution des activites tertlaires Montreal avant la Seconde Guerre mondiale sont peu nombreuses en raison de importance du secteur manufacturier (9). Parmi les fonctions essentielles rattachees l'economie tertiaire des grandes villes nord-americaines, on retrouve le commerce, 'immobilier, les finances, I'administration publique, l'education et les services sociaux et de sante. Les travaux sur I'histoire de Montreal ont montre que, depuis le milieu du [XlX.sup.e] siecle, le centre de la ville (qui correspond au Vieux-Montreal actuel) devient de plus en unifonctionnel (10) alors qu'il est consacre aux activites tertiaires et specifiquement commerciales et administratives. Les travaux effectues par Gunter Gad et Deryck Holdsworth sur Toronto presentent un processus similaire de concentration de lemploi dans le secteur des services publics et financiers, et ce , des les annees 1840 (11).
Sur le plan urbanistique et architectural, la croissance du secteur tertiaire, et en particulier des activites de direction, a donne lieu Montreal la construction des premiers gratte-ciel partir de la fin des annees 1880 (12). Au cours des annees 1920, d'autres grands projets urbains modifient l'echelle architecturale de la ville comme l'a montre Jacques Lachapelle au sujet des grands immeubles concus par les architectes Ross et MacDonald (13). C'est dire que certains des elements caracteristiques des centres-villes de l'apres-guerre etaient deja esquisses dans les annees 1920, notamment les "superblocks" (14) et les complexes multifonctionnels s'elevant sur plusieurs dizaines d'etages et occupant des ilots entiers.
Quelques etudes ont deja porte sur certains secteurs du tertiaire urbain, notamment le commerce et les finances (15). De plus, l'etude du geographe Ludger Beauregard publiee en 1981, qui trace un portrait de la premiere rue de bureaux montrealaise, la rue Saint-Jacques (16), nous fournit quelques elements d'analyse historique. Toutefois, son etude brosse avant tout un portrait de l'etat de la situation en 1980. De plus, il laisse de cote la rue McGill. D'ailleurs, celle-ci est rarement mentionnee dans les diverses descriptions du centre des affaires montrealais. Quelle est la specificite fonctionnelle de la rue McGill? De quelle maniere les changements fonctionnels et l'arrivee de nouveaux occupants modifient-ils la forme des immeubles ? Que peut-on apprendre d'une etude combinant I'analyse des fonctions et de la forme urbaines?
Histoire d'une rue et de ses transformations physico-spatiales
Une rue amenagee en deux temps
Espace frontiere entre la yule anciennement enserrde par les fortifications, le port, la zone industrielle localisee 'embouchure du canal de Lachine (connu sous le nom de quartier Sainte Anne) et les nouveaux secteurs residentiels qui se developpent dans le quartier Uptown au nord, la rue McGill (17) a ete amenagee sur les glacis des fortifications au moment de leur demantelement (18). Ces travaux sont effectues entre 1801 et 1817 selon les propositions du plan des Commissaires. Les trois commissaires sont nommes par le gouvernement. II s'agit de James McGill (1744-1813), un marchand montrealais originaire d'Ecosse, de John Richardson (1755-1831) et de Joseph-Dominique-Emmanuel LeMoyne de Longueuil, remplace sa mort en 1807 par Jean-Marie Mondelet (1772-1848), notaire et depute (19) II faut preciser que la rue McGill a connu deux phases de developpement. Un premier segment situe entre les rues Craig (Saint-Antoine) au nord et des Enfants-Trouves (place d'Youville) au sud est amenage lors des travaux de demoli tion des fortifications (entre 1801 et 1817) (figure 3). En 1845, une deuxieme section allant jusqu'a la rue de la Commune vers le sud est ouverte (figure 4).
Pour plusleurs chercheurs, le demantelement des fortifications represente le principal projet public d'amenagement urbain mene au cours du [XlX.sup.e] siecle Montreal (20). Ce plan consiste en une serie d'interventions destinees lever les entraves la libre circulation des biens, des marchandises et des personnes afin de relier la viellle ville aux faubourgs qui se sont developpes aux alentours - et qui accueillent dailleurs plus d'habitants que la ville fortifiee (21). En plus de superviser la demolition des fortifications, le mandat des Commissaires consiste, d'une part, rendre aux proprietaires legitimes les parcelles de terrains qul ont servi l'erection des murs et, d'autre part, a realiser un plan d'ameliorations ainsi qu'une evaluation de ses couts d'execution (22).
Le projet initial des Commissaires propose de creer de nouvelles rues tout en prolongeant certaines arteres existantes, de canaliser le ruisseau Saint-Martin (dans l'axe de la rue Craig) et la petite riviere Saint-Pierre des fins d'assainissement en la fai sant passer dans l'egout collecteur sous la place d'Youville et d'ameliorer le reseau de squares et de marches publics (23). II s'agit non pas d'un plan d'extension mais plutot d'un plan d'embellissement, d'integration urbaine et de mise en valeur de l'espace. Cette initiative des autorites publiques contribue a moderniser la ville en eliminant les limites physiques et en decongestionnant l'espace urbain afin de permettre aux activites economiques de prendre de l'expansion. Specifiquement, la demolition du mur d'enceinte qui enserrait la partie ouest de la ville fortifiee degage un espace sur lequel est amenagee la rue McGill. Sa largeur renvoie ce plan et elle donne une allure de grande ville a Montreal.
En 1837, les Juges de Paix, qui assument alors la gestion de Montreal (24), approuvent un fonds pour permettre l'ouverture du troncon sud de la rue McGill entre la petite riviere Saint-Pierre canalisee quelques annees plus tot et la rue de la Commune qui longe le Saint-Laurent (25). Cest en 1845 que les travaux d'amenagement du deuxieme segment sont completes sur une partie de la propriete des Soeurs de la Charite dites Soeurs Grises acquise par la municipalite (26). Zone sensible aux inondations lors de la fonte des neiges compte tenu de la proximite des rives du fleuve, la rue McGill se pretait difficilement a la construction d'immeubles. A partir de la seconde moitie du XIXe siecle, les travaux d'amelioration des infrastructures portuaires rendent le site plus propice aux activites urbaines. Des lors, quelques entreprises s'y etablissent, notamment un chantier maritime. II reste que les lots situes de part et d'autre de cette partie basse de la rue restent pendant plusieurs decennies non construits. L'atla s de Hopkins publie en 1879 montre que le gouvernement du Canada y a neanmoins amenage des installations douanieres (27). De nouveaux entrepots et bureaux servant aux douanes sont inaugures en 1915 a quelques dizaines de metres de ce site.
A partir des annees 1840, les pressions sont fortes pour requalifier les terrains conventuels situes l'ouest de l'ancienne ville fortifiee et a proximite du fleuve. II faut dire que, depuis l'ouverture du canal de Lachine en 1824 et, en particulier, a la suite de son elargissement en 1843 (28), le quartier a change de vocation. L'intensification des activites portuaires, la mise en place d'un reseau d'etablissements manufacturiers et l'arrivee de centaines d'ouvriers dans le quartier Sainte-Anne ont contribue transformer le tissu social, economique et urbain de l'ouest de la vieille cite. Un probleme - qui explique d'ailleurs pourquoi les institutions religieuses ont quitte le quartier - subsiste neanmoins: les eaux du fleuve font gonfler la petite riviere Saint-Pierre, provoquant des inondations dans cette partie basse de la ville. Sa canalisation en 1831 a permis de resorber une partie du probleme.
En outre, des le debut du [XX.sup.e] siecle, la mise en oeuvre du plan des Commissaires avait contribue changer l'organisation fonctionnelle de la ville historique. Entre autres choses, les activites religleuses qul avalent jusqu'alors occupe une place centrale dans l'organisation urbanistique et sociale de Ia viellie ville sont contraintes a quitter leurs premiers lieux d'etablissement. Avant la demolition des murs, deux importants ensembles conventuels ponctuaient l'espace : I'Hopital General des Soeurs de la Charite (29) qui recevait les indigents et les enfants abandonnes et le monastere des Recollets. Ces ensembles conventuels etaient "commercialement bien situes (30)". C'est ce qui explique leur disparition du tissu urbain moderne.
C'est d'abord le monastere des Recollets qui est rase et ce, en deux temps, soit en 1818 et en 1867. La premiere phase des travaux de demolition du couvent des Recollets des annees 1810 correspond a la mise en forme du plan des Commissaires et a l'ouverture de nouvelles rues et du lotissement des parcelles de terrains qui les bordent. L'ouverture de nouvelles rues morcelle considerablement les edifices formant cet ensemble conventuel. Depuis le debut du [XIX.sup.e] siecle, l'eglise est utilisee par la communaute catholique irlandaise qui la deserte en 1847 pour la nouvolle eglise Saint-Patrick's situee un peu plus au Nord, sur le chemin de la Cote-du-Beaver-Hall. En 1867, la deuxieme etape de la demolition du couvent est qualifiee par un contemporain d'intervention visant a satisfaire aux "exigences que le commerce et la fureur des embellissements ont dechainees dans notre ville (31)"
Le demembrement d'une partie du site de l'Hopital General des Scours de la Charite partir des annees 1870 est egalement du a la modernisation do la ville et au developpement des activites commerciales et industrielles. Les Sceurs do la Charite convert-issent certains de lours immeubles pour los louer diverses entreprises. Elles font aussi construire un imposant ensemble de magasins entrepots afin de profiter de a valeur fonciere de leurs terrains (32). Les Recollets ont egalement recours a une strategie similaire de promotion immobiliere sur leur ancien emplacement (33).
Subsequemment la demolition des fortifications, le square Victoria est amenage en 1842 a l'extremite ouest do la rue Saint-Jacques, au sud du marche au foin sur lequel bute la rue McGill au Nord (34). Denomme alors square des Commissairos, il vise a rendre hommage aux individus dont les idees ont permis do moderniser l'espace urbain.
Des les annees 1820, plusieurs congregations religieuses choisissent les abords de ce qui devient le square des Commissaires pour y eriger ours lieux de culte ou d'enseignement: l'American Presbyterian Church en 1826, le Petit Seminaire en 1830 et la First Baptist Church en 1831. Au cours des annees subsequentes, quatre autres eglises sont erigees en peripherie du square, dans l'axe du chemin de la Cote-du-Beaver-Hall. En 1860, le square est rebaptise en l'honneur do la reine Victoria. A partir de cette decennie, il devient le lieu privilegie d'implantation des edifices commerciaux de prestige (35). Ainsi, dans les annees 1860, les eglises sont graduellement remplacees par des magasins entrepots of des edifices multifonctionnels abritant des commerces of des bureaux. Fait a noter, dans les annees 1870, bien que les environs du square continuent a attirer des activites tertiaires, l'arrivee de fabricants de bottes et de chaussures signalent l'importance des activites industrielles dans l'economie montrealaise. Entre la fin des annees 1880 et le debut du [XX.sup.e] siecle, le square perd plusieurs de ces occupants prestigieux. Par ailleurs, la tendance est renversee dans les annees 1900 lorsque des grandes entreprises et des institutions financieres choisissent d'y implanter leurs bureaux (36) tant et si bien qu'en 1908, le square Victoria est devenu, selon un observatour de la scene architecturale montrealaise, "one of the best down-town sites (37)". Les transformations fonctionnelles et architecturales qui ont lieu au square Victoria ne sont pas sans incidence sur le developpement de la rue McGill qui connait un processus similaire d'avancees et de reculs des activites tertiaires.
Une rue qui so distingue
Le trace de la rue McGill so distingue de celui des principales arteres commerciales et d'affaires de la vieille ville commo los rues Saint-Jacques, Notre-Dame, Saint-Paul ou encore le boulevard Saint-Laurent (38). La rue McGill est concue comme une grande voie symetrique, plus large que les autres principales arteres de la ville et qui relie, dans un axe nord-sud, le port de Montreal aux quartiers residentiels et institutionnels qui se sont developpes a proximite du mont Royal.
Dans le Montreal moderne des annees 1860 (39), la rue McGill est localisee a la fois dans le quartier Ouest du district Montreal-Centre et dans le quartier Saint-Anne (40). En fait, le centre de la voie constitue la limite des deux quartiers. Le district Montreal-Centre correspond a peu de choses pres a l'ancienne ville fortifiee du Regime francais qui est divisee en trois quartiers (Est, Centre, Ouest). A partir de la seconde moitie du [XIX.sup.e] siecle, ce secteur fait l'objet d'un processus de reamenagement important. Soulignons, notamment, les transformations economiques et sociales en cours qui ont pour effet de reconfigurer son organisation sociospotiale. D'espace mixte residentiel, commercial of institutionnel, il devient avant tout une zone administrative, commerciale of financiere. En ce sens, son principal trait marquant est le depart de la population. A titre indicatif, mentionnons qu'en 1861, 2 831 personnes habitaient le quartier Ouest alors qu'en 1911, ils n'etaient plus que 226. Do tous les qu artiers composant la vieille ville, il est celui qui a, proportionnellement, perdu le plus de population au tournant du [XX.sup.e] siecle. Le declin demographique est particulierement fort entre 1861 of 1871 alors que le quartier passe de 2 831 habitants a 1 265 habitants (tableau 1).
En plus du declin demographique, le coeur de la ville connait une serie de transformations entre 1870 et 1930 qui influencent la vocation de la rue McGill : migration des grands magasins vers la rue Sainte-Catherine et declin graduel des activites commerciales sur les rues Notre-Dame et Saint-Paul, redeploiement du commerce de gros et de detail sur le boulevard Saint-Laurent, specialisation de la rue Saint-Jacques en artere financiere, centralisation des activites administratives et institutionnelles (hotel de ville, palais de justice, basilique) rue Notre-Dame, concentration des entrepots rue de la Commune, construction d'edifices do bureaux de prestige a proximite du square Victoria et de la place d'Armes.
En bref, a partir des annees 1840, plusieurs transformations economiques et sociales marquent le paysage urbain montrealais: accroissement des activites portuaires, industrielles et tertiaires, developpement d'un reseau de communication et de transport transcontinental, recul graduel des institutions religieuses de la vie civique, abandon de la vieille ville par la bourgeoisie en tant que lieu de residence (41). Quelle est la portee de cette metamorphose des activites urbaines sur la forme architecturale et urbanistique? D'une maniere plus precise, comment expriment ces changements fonctionnels rue McGill?
Formes et fonctions
Une de nos plus belles rues pour la largeur et la longueur est certainement la rue McGill; macademisee dernierement elle offre au pieton ou a la voiture une voie touf ours des plus commodes autant que des plus agreables parcourir; emule des rues Notre-Dame et St-Laurent par son commerce, elle dispute avec la rue Ste-Catherine la palme des plus beaux em-bellissements (42).
A partir des annees 1840, la transformation d'une partie de la vieille ville en centre des affaires influe sur la vocation de la rue McGill. Celle-ci accueille graduellement les activites tertiaires qui ont envahi le square Victoria et les rues Saint-Jacques, Notre-Dame et Saint-Paul ou se concentre un nombre accru dinstitutions financieres et commerciales. Certains traits caracte-ristiques la distinguent neanmoins des autres arteres commerciales. Premierement, ses dimensions se demarquent de celles des principales rues de la vieille yule en ce quelle est plus large (43). Consequemment, I est plus facile d'y construire des efifices de grande taille sans compter que plusieurs Jots sont vacants sils ne sont pas occupes par de petits immeubles faciles demolir. Deuxiemement, son orientation nord-sud est en rupture par rapport a celle des principales arteres de la ville, l'exception du boulevard Saint-Laurent. Elle permet de relier les quartiers dans un axe nord-sud, tout en degageant une perspective visuelie reli ant le port au mont Royal. Troisiemement une autre de ses caracteristiques qui en fait un espace de prestige est son rattachement un reseau de places publiques et de squares concus entre 1842 et 1901 le square Victoria amenage en 1842, les squares du Beaver-Hall et Phillips amenages entre 1842 et 1844 et laplace d'Youville amenagee en 1901 sur le site du marche Sainte-Anne. Traditionnellement, les espaces publics etaient d'importants facteurs d'attraction a Montreal et ce, en particulier pour les institutions religleuses, les sieges sociaux et les immeubles de bureaux (44).
Une economie en changement
Dans les annees 1840, 1850 et 1860, des facteurs externes contribuent changer la structure economique locale. Parmi les plus importants, mentionnons a constitution d'un reseau de canaux pour le Saint-Laurent et le developpement des reseaux ferroviaires. Beneficiant de l'aide gouvernementale, ces infrastructures de transport permettent l'integration continentale de l'economie montrealaise (45) Par la suite, les annees 1870 et 1880 representent une periode de consolidation pour l'economie de Montreal. On peut mentionner, notamment, l'adoption de la Politique nationale de 1879 qui cree un marche protege pour les entreprises manufacturieres canadiennes, ce dont l'economie de Montreal profite considerablement (46).
A partir des annees 1880, le port sautonomise par rapport a la ville. II reste que les rues a proximite du port, y inclus la rue McGill, conservent leur attrait, comme le souligne un journaliste du Harper's New Monthly Magazine en 1889: "The water-side seems to be without the usual seaport slums; its massive business front is clean, sedate, and very proper (47)".
Entre 1896 et 1914, les commissaires du havre procedent a d'importants travaux d'amenagement qui visent moderniser les equipements portuaires (construction de nouveaux quais, jetees, hangars, entrepots, silos a grains) et, surtout, regler une fois pour toutes le probleme d'inondations qui frappent la partie sud-ouest de la ville a l'hiver ou au printemps (48). Ces travaux d'infrastructures et d'assainissement favorisent la mise en valeur des lots sites l'extremite sud de la rue McGill. Cet elan se traduit d'ailleurs par l'erection d'imposants batiments au ceurs de cette periode.
Predominance des activites commerciales (1840-90)
Sur un plan morphologique et architectural, quel paysage offre la rue McGill tel qu'on peut observer partir des annees 1840? Les principales constructions des annees 1840-90 se regroupent en deux categories : les edifices manufacturiers, qui sent habilles de brique, bien que la pierre de tailie soit egalement utilisee pour envelopper leur rez-de-chaussee, et les cornmerces qui sent revetus de pierre grise provenant des carrieres de la region. Certains immeubles construits entre 1840 et 1860 comprennent des logements amenages aux etages pour heberger la famille du commercant ou un autre locataire (figure 5). Tant les immeubles commerciaux que les immeubles industriels eccupent toute la parcelle de terrain, ne preservant aucune marge de recul. Les lots formant les ilots sont la plupart du temps etroits mais profonds.
La hauteur des immeubles industriels et des ateliers de fabrication vane (de un cinq etages (49)). Leurs volumes aussi sent difterents. Les edifices les plus anciens sent plus trapus tandis que ceux erigeseriges partir des annees 1860 gagnent en hauteur. Le gabarit des maisons de commerce en gros est analogue a celul des etabilissements manufacturiers. S'elevant sur deux quatre etages, is sent perces de nombreuses ouvertures selon un agencement symetrique. Ce fenetrage genereux correspond deux fonctions : pour les etablissements manufacturiers, elie procure l'eclairage naturel indispensable au travail des ouvriers et, pour les etablissements commerciaux, elle permet de mettre en valeur la marchandise offerte dans les vitrines du rez-de-chaussee, dent la hauteur est superieure a celle des etages.
Selon les informations fournies par les annuaires Lovel, les entreprises manufacturieres implantees rue McGill fabriquent des meubles, des chaussures et des bottes, des cigarettes et des cigares, etc. C'est dire quelies oeurent dans les secteurs traditienneis montrealais du cuir et de la chaussure, de la feurrure, du vetement et du textile, de l'alimentation et du tabac. Ces industries manufacturieres legeres logent dans des usines de petite et mayenne tallies. Le segment de a rue situe promixite du pert est affecte des activites preductives plus lourdes (chantier maritime, fabriquant de conduites en fonte). Quelques marchands de charbon cotoient ces entreprises manufacturieres.
Durant les annees 1840 a 1890, la presence d'activites manufacturieres est un trait caracteristique du centre-yule de Montreal. Cette realite est aussi perceptible rue McGill ou on retrouve piusieurs etablissements manufacturiers dans le secteur alimen taire (confiserie, biere, tabac) et dans le secteur du vetement et de la chaussure. Le dynamisme des activites manufacturieres rappelle la proximite du port ou arrivent quotidiennement des matieres premieres qui sont transformees en biens de consommation. De plus, etant donne que cette rue est situee dans le voisinage du canal de Lachine et du quartier Sainte-Anne, son developpement peut difficilement ne pas en subir les influences. Faisant l'objet d'un processus precoce de deconcentration spatiale (50), les grands etablissements manufacturiers montrealais se retrouvent aussi a l'ouest, le long du canal de Lachine et a l'est, dans les corridors ferroviaires. II reste que, durant cette periode, les principaux occupants de la rue McGill sont des magasins entrepot s (figures 6 et 7). Lorsque le cadre bati change d'echelle au debut du [XX.sup.e] siecle, c'est pour accueillir des activites tertiaires (51) En raison de la hausse des valeurs foncieres au centre-ville, nous observons a Montreal un mouvement analogue de deconcentration industrielle a celui prevalant dans plusieurs grandes villes etasuniennes (52).
L'architecture des edifices victoriens est tres elaboree en ce qui a trait aux maisons de commerce qui affichent des facades en pierre ornementee, un fenetrage en plein cintre et des colonnades et des pilastres inspires de l'architecture classique. Par exemple, le Dominion Block (figure 8), inaugure en 1867, est le premier edifice commercial de prestige erige rue McGill. Haut de quatre etages en plus du premier niveau hors sol, il abrite les activites de trois grossistes (53). En fait, les etablissements commerciaux d'envergure implantes rue McGill sont des magasins entrepots. Avec l'apparition de ces edifices monofonctionnels, l'architecture commerciale change. Le commercant n'habite plus au-dessus de sa boutique comme il le faisait traditionnellement. La vente et la presentation des biens exigent plusieurs centaines de metres carres d'espace d'exposition et d'entreposage.
Depuis les annees 1860, a Montreal, les boutiques ont delaisse les rez-de-chaussee des immeubles residentiels pour se redeployer dans des ensembles integres. Parmi ces nouveaux complexes commerciaux etablis rue McGill, on retrouve, en plus du Dominion Block (1867), les edifices Phillips (1870) et Burland (1889) qui ont de trois a quatre etages (54). Leur systeme structural constitue de poutres et de colonnes et d'une ossature de pierre permet de grands espaces ininterrompus ou les magasins peuvent s'etendre sur plusieurs etages. Cette architecture commerciale est caracteristique de celle des grandes villes de la cote Est des Etats-Unis comme Boston, New York ou Philadelphie (55).
Dans le secteur des services d'hebergement, avec ses 200 chambres reparties sur quatre etages, l'hotel Albion (figure 9) (en service entre 1861 et 1886 et agrandi a deux reprises) est aussi, selon ses proprietaires, une institution incontournable pour les visiteurs de Montreal. Sa localisation n'est pas etrangere a sa popularite. De plus, sa facade ornee de balcons offre a ses occupants une vue imprenable sur la ville et ses environs:
The commanding height of the building, looming as it does above all surrounding structures, and from its proximity to the River St. Lawrence, commanding a magnificent view of its blue waters, the Victoria Bridge, ensures to its guests, in the summer time, a plentiful supply of fresh air. To the north, one has a fine view of Victoria Square; still further away, Mount Royal, clothed in verdure, greeds the eye [...] (56).
Les hotels affichent une presence marquee entre 1860 et 1880. A partir des annees 1890, ils se deplacent vers le nouveau centre-ville en voie de formation dans le quartier Uptown. Is sont alors remplaces par un nombre accru de restaurants, de tavernes et de cafes; ce qui explique I'importance du secteur "restauration et hebergement" et ce, jusqu'en 1934.
Durant les decennies des annees 1840 a 1890, ce sont en definitive les marchands, les commercants et les manufacturiers qui participent a I'effervescence de la rue McGill (figures 6 et 7) Les grossistes en marchandises generales (mercerie et produits de la ferme) et en epicerie font alors partie integrante des fonctions tertiaires des grandes villes nord-americaines dont les economies dependent des echanges commerciaux (57)
Les commerces de detail gardent une certaine vigueur etant donne qu'ils repondent aux besoins des habitants des quartiers environnants. A ce sujet, on constate une predominance du secteur alimentaire. Certaines institutions ont d'ailleurs acquis une reputation regionale comme le magasin-entrepot Mathewson qui est un des premiers a avoir pignon rue McGill partir de 1842 lorsque son proprietaire fait construire un petit edifice de deux etages avec un toit en pente perce de lucarnes. Le dernier etage sert d'habitation. La presence du marche Sainte-Anne a proximite a un impact sur la nature des commerces qui s'implantent rue McGill. Comme dans la plupart des villes, les edifices situes dans le voisinage des marches publics sont occupes par une multitude de petits commerces d'alimentation.
Entre les annees 1840 et 1890, ce sont des fonctions urbaines mixtes caracteristiques de la ville marchande et portuaire en voie d'industrialisation qui predominent. II s'agit la de la structure fonctionnelle specifique a la ville compacte ou cohabitent quelques residences, des commerces, des manufactures et des ateliers, exprimant par le fait meme un lien etroit entre le transport, la fabrication et le commerce. Centre d'echanges entre le port et la ville, la rue McGill reflete les conditions d'une ville portuaire et marchande. En ce qui a trait a la fonction residentielle, on constate qu'un certain nombre d'habitants maintiennent une adresse rue McGill. C'est dans les annees 1850 qu'on y retrouve la proportion la plus elevee d'habitations, avec plus de 20 % des occupants. Dans les annees subsequentes, ce taux connait des replis et des hausses.
L 'arrivee des activites tertiaires de direction et le maintien des activites industrielles (de 1890 1916)
Aux edifices industriels et commerciaux de l'ere victorienne ont succede ceux de l'ere edouardienne qui confirment l'approche Beaux-Arts comme courant architectural dominant. Cette nouvelle orientation architecturale est perceptible dans les choix stylistiques effectues pour les grands immeubles construits partir du debut du [XX.sup.e] siecle. Leurs concepteurs reprennent les principes du classicisme comme la division de la facade en trois sections (base, fut et couronnement). De plus, le caractere continental - en opposition a l'influence locale - se traduit par le recours a des materiaux de revetement importes des Etats-Unis. En bref, l'eclectisme architectural omnipresent rue McGill est un heritage des decennies des annees 1840 a 1890 qui sont marquees, d'un cote, par la succession des influences culturelles et des styles souvent venus d'ailleurs et, de l'autre, par la modification des fonctions.
Les transformations architecturales observees rue McGill expriment une restructuration economique majeure. Ainsi, le debut du [XX.sup.e] siecle est une periode faste pour l'economie de Montreal. Pour la rue McGill, cela represente un changement de vocation tres net. C'est entre 1900 et 1912 que s'implantent les activites tertiaires de direction. L'elevation du cadre bati et la migration des activites tertiaires a l'exterieur de la ville historique temoignent de cette Evolution. D'une maniere specifique, entre 1900 et 1911, environ 56 000 metres carres de superficie de plancher reserves strictement a des activites de bureau sont amenages rue McGill (58)
Au debut du [XX.sup.e] siecle, cette rue acquiert veritablement le statut d'artere de prestige aupres des grandes entreprises de services publics (chemins de fer, telecommunications) qui y erigent leurs sieges sociaux et leurs filiales. Le batiment de bureaux devient alors un enjeu majeur pour les professionnels de l'architecture et de l'amenagement tout en symbolisant un changement dans l'economie de la ville. Desormais, ce sont les grandes entreprises qui prennent part au developpement de la metropole et plusieurs d'entre elles sent localisees rue McGill. Chronologiquement, la construction des nouveaux edifices consacres strictement a la fonction tertiaire de direction se fait dans l'ordre suivant: le nouveau siege social du Grand Tronc (59) en 1901, l'edifice Canadian Express en 1906-1908 et les Edifices McGill et Shaughnessy (60) en 1912.
Entre 1899 et 1902, l'entreprise ferroviaire du Grand Tronc donne le ton en faisant Eriger son imposant siege social de quatre etages (figure 10) qualifie par les critiques architecturaux de l'epoque de veritable palais. Les couts de sa construction s'elevent a 500 000,00 $ (61). L'entreprise retient les services de l'architecte Etatsunien Richard Waite pour la conception de son nouveau siege social sur un terrain donne par la Ville de Montreal. La richesse de son ornementation exterieure traduit aussi l'opulence de l'amenagement interieur des espaces de representation.
Les activites du Grand Tronc sont concentrees au Quebec et en Ontario. Proprietaire du pont Victoria qui franchit le fleuve, l'entreprise entre dans une importante phase d'expansion qui l'amene a construire un chemin de fer transcontinental. En 1881, cette entreprise avait concentre ses installations employant des milliers de travailleurs dans le quartier ouvrier de Pointe-Saint-Charles. Plus de 300 personnes travaillaient dans son bureau de direction reparti dans differents locaux loues, notamment dans un immeuble situe sur la place Jacques-Cartier. A la fin du [XIX.sup.e] siecle, ses directeurs envisagent de concentrer les activites de direction dans un nouveau siege social qui sera finalement construit rue McGilll.
En 1881, l'entreprise assume la gestion d'un reseau ferroviaire long de 2 112 kilometres. Vingt ans plus tard, les 6 720 kilometres de voies necessitent le travail de 560 personnes au bureau de direction (62). Le directeur general estime que l'entreprise va beneficier d'une meilleure visibilite si elle est localisee au coeur de la ville. C'est du moins dans ces termes qu'il defend le nouvel emplacement dans une lettre transmise au maire et au Conseil municipal de Montreal alors qu'il soilicite leur aide pour installer le siege social dans le centre des affaires(63). Le nouveau siege social regroupe sous un meme toit les services de la direction, de l'administration et de l'ingenierie (64), de meme que les filiales de telegraphe et de telephone. De plus, le centre des affaires represente le seul lieu veritablement approprie pour une grande entreprise. Le president de l'entreprise souhaite obtenir un terrain appartenant a la Ville qui constitue une portion de l'ancien marche au foin, situe tout juste au nord du square Victoria. Cette demande souleve des protestations chez les gens d'affaires. Apres quelques mois d'echanges, la Ville de Montreal cede un terrain au Grand Tronc rue McGill entre les rues Saint-Paul et William. La Ville exproprie alors des residants et des marchands (65) qui occupaient une serie de petits edifices qui sont demolis pour faire place au nouvel immeuble.
D'un point de vue architectural et urbanistique, les changements qualitatifs et formels sont importants. Entre 1900 et 1916, plusieurs grands immeubles de prestige sont eriges rue McGill. Les promoteurs et les proprietaires apprecient des lieux degages pour y construire leur edifice. Visibles de plus loin, les immeubles dominent l'environnement. Leur situation en retrait de la forte congestion des rues de la vieille ville ameliore aussi leur visibilite. II est vrai que la Ville de Montreal procede a des travaux d'elargissement des rues la fin des annees 1880 mais certaines arteres du centre des affaires, notamment les rues Saint-Jacques, Notre-Dame et Saint-Paul, noffrent pas les memes qualites urbanistiques que la rue McGill. En outre, les rues de la vieille ville sont de plus en plus encombrees (66).
Construire rue McGill procure la possibilite de dessiner des edifices qui ne sont pas de simples alignements classiques de facades ornementees. En effet, compte tenu du fait que plusieurs voies dans axe est-ouest traversent cette rue, les carrefours sont nombreux, offrant des sites propices a la construction d'edifices degages sur au moms deux, sinon trois cotes. Le choix de cette artere est surement determine du moms en partie, par les perspectives urbanistiques quelle offre. II reste que certains edifices possedent une vocation representative (comme le Grand Tronc) alors que d'autres immeubles sont construits des fins speculatives, notamment les edifices McGill et Shaughnessy (67).
A partir des annees 1910, on assiste une diversification fonctionnelle accrue des activites tertiaires de la rue McGill (figure 7). Par ailleurs, certains secteurs sont presque completement absents, notamment les finances, les assurances et l'immobilier, les services aux entreprises, l'education et les services sociaux et de sante. On sait que d'autres arteres de la zone centrale et de la peripherie sont specialisees dans l'accueil de ces activites. Cette tendance marque aussi les autres rues d'affaires de la metropole comme les rues Saint-Jacques et Sainte-Catherine. Les activites residentielles et commerciales sont repoussees pour faire place aux bureaux et, fait marquant, aux activites manufacturieres. En tant quaxe commercial, la rue McGill s'en trouve du coup fragilisee. Sa force reside desormais dans sa capacite consolider un tissu industriel dynamique et attirer des activites tertiaires dans le secteur des transports et des communications.
En face du siege social du Grand Tronc est erige, a partir de 1906, un edifice haut de neuf etages, le Canadian Express (figure 11), filiale du Grand Tronc. Cette entreprise de transport est specialisee dans les transferts financiers internationaux (68). Ce nouveau gratte-ciel est la preuve tangible de l'implantation des activites tertiaires de la rue. Ce changement d'echelle est rendu possible grace l'entree en vigueur d'un nouveau reglement municipal qui autorise des edifices en hauteur. Son adoption, en 1901, par le Conseil municipal de Montreal contribue changer le paysage de la rue et du centre des affaires. Ce reglement permet desormais de construire des edifices de dix etages incluant le rez-de-chaussee (ou plus ou moms 43 metres) contribuant, de ce fait, la densification du centre des affaires (69). En outre, le recours aux nouvelles technologies comme les ascenseurs, la generalisation des mesures visant proteger les immeubles centre les incendies (70) et les nouveaux systemes constructifs facilitent l'augmentation du nombre d'etages.
En 1912, la direction d'une entreprise ferroviaire rivale du Grand Tronc, le Canadien Pacifique (71), choisit aussi la rue McGill pour y installer l'une de ses filiales active dans le domaine de la telegraphie. L'emplacement du nouvel immeuble de bureaux erige sur l'ancien site de l'hotel Albion est presque identique celul de son principal concurrent, savoir l'edifice Shaughnessy (figure 12) qui est erige tout juste cote du Canadian Express. Ses concepteurs tirent egalement profit du nouveau reglement regissant la hauteur des edifices (71).
L'annee 1912 est aussi marquee par la construction de l'edifice McGill haut de neuf etages a l'angle de la rue des Recollets. Entre 1912 et 1915, c'est au tour du gouvernement canadien d'y implanter un immeuble de prestige, ce qui lui permet de remplacer le vieil Examining Warehouse localise a l'angle de la rue de la Commune. Inaugure en 1916 (73). le nouvel edifice des douanes affiche une facture architectiurale tres classique, inspiree des principes Beaux-Arts. La localisation de a douane et la proximit du port font de la rue McGill un site recherche des societes maritimes, des importateurs-exportateurs et des courtiers. Derriere son imposante colonnade, ses murs abritent plusieurs entreprises specialisees dans importation et l'exportation des marchandises (74). L'edifice des douanes est en fait un vaste entrepot ou des preposes examinent et evaluent les marchandises qui entrent et sortent du port de Montreal. Avec son entree monumentale devant la place d'Youville, cet edifice est, en quelque sorte, porte d 'entree de la ville des echanges.
La derniere sous-periode qui caracterise les transformations fonctionnelles et urbanistiques de la rue McGill est marquee par le repli des magasins entrepots et la consolidation des activites manufacturieres et tertiaires. A partir de 1920, le nombre des grossistes chute d'une maniere radicale, pour croitre nouveau au d& but des annees 1930. En fait, le declin du grossiste independant au debut du XXe siecle est un phenomene generalise au Canada:
Le ralentissement de activites de construction (de 1916 a 1934)
Leur role diminue considerablement au debut du [XX.sup.e] siecle, mesure que de plus en plus de manufacturiers organisent leurs propres reseaux de commercialisation pour vendre directement au detaillant par l'entremise de succursales etablies dans tout le pays. Lorsque vient l'expansion des grands magasins, des chaines de cooperatives, dans les annees 1920, presque toutes leurs marchandises sont achetees rabais, directement aux producteurs (75).
Un tres net ralentissement des activites de construction affecte aussi son developpement. Pourtant, a partir des annees 1920 a Montreal, nous assistons a la realisation de nombreux grands projets urbains (76). C'est comme si cette artere n'avait pas le meme pouvoir d'attraction que d'autres secteurs de la metropole, meme si quelques petits projets consolident sa participation aux secteurs des transports et des communications. Ainsi, l'extension de la ville et le developpement de la banlieue encouragent les promoteurs des chemins de fer ameliorer leurs liaisons entre le centre des affaires et les municipalites suburbaines de la Rive-Sud qui attirent un nombre accru d'habitants (77). Inauguree en 1923, la petite gare de la Montreal Southern and Island Counties sert de terminus au service de tramway qui relie, depuis 1908, Montreal la rive sud du fleuve en passant par le pont Victoria.
Le seul projet dimportance qui change le paysage de l'artere est celui de lagrandissement de l'edifice des douanes dont la superficie double entre 1934 et 1936. A partir de ce moment et ce, jusqu'au debut des annees 1990, il n'y a eu qu'une seule construction d'importance rue McGill, a savoir le gratte-ciel de a banque Toronto Dominion construit en 1960 et localise angle de la rue Saint-Jacques.
A plusieurs egards, le troncon de la rue McGill situe entre les rues de la Commune et Saint-Jacques est demeure avant tout un temoin de la premiere poussee tertiaire des annees 1900 et 1910. D'ailleurs, quelques exceptions pres, l'ensemble des rues d'affaires du Vieux-Montreal a traverse une interruption analogue (78). Le developpement du nouveau centre commercial et tertiaire vers le nord et l'ouest de meme que la reconstruction de quelques ilots dans la ville historique permettent d'absorber la demande pour de nouveaux espaces de bureaux et commerciaux.
La transformation de la structure fonctionnelle et des caracteristiques du cadre bati de la rue McGill fait echo la redefinition du statut et du role de Montreal comme metropole au cours des [XIX.sup.e] et xxe siecles. L'implantation des premiers sieges sociaux des grandes entreprises dans des secteurs cles comme les transports et les communications confirme la predominance des nouveaux acteurs du developpement urbain.
Epilogue
Aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale, il est clair que la rue McGill subit la concurrence d'implantations tertiaires et commerciales plus recentes, alors que prend forme le centre moderne des affaires. De toute evidence, la rue McGill n'est plus au centre des grands projets urbains montrealais et elle ne joue plus le role de porte d'entree de la ville. II faut aussi souligner le deplacement des activites portuaires vers lest de la metropole au cours des annees 1970, du au changement dans les methodes de transport des marchandises generales avec l'utilisation des conteneurs. Les grands travaux d'amenagement des annees 1960 de meme que ceux exiges par 'Exposition universelle de 1967 n'integrent pas cette artere dans leurs plans. A proximite, l'autoroute Bonaventure amenagee dans un contexte de modernisation de la metropole amene les automobilistes directement au coeur de la nouvelle zone centrale situee desormais rue University, l'intersection du boulevard Rene-Levesque.
Apres un long temps d'arret, la rue McGill et les abords du square Victoria se trouvent nouveau au coeur des grands projets urbains montrealais. Les transformations qul ont marque cet espace tout au long des [XIX.sup.e] et [xx.sup.e] siecles reprennent. Au cours des annees 1960 et 1970, quelques entreprises et promoteurs immobiliers y font construire des gratte-ciel dans le prolongement de l'axe de la rue et proximite du square Victoria: la Tour de la Bourse, le siege social de la societe quebecoise Quabecor et l'edifice de la banque Toronto Dominion. Plus recemment (en 2001-2), cet espace public a fait 'objet dun important programme de developpement immobilier dans la cadre du projet du Quartier international dastine attirer des organismas internationaux.
Depuis le milieu des annees 1990, la rue McGill est soumisa una intense activite da requalification. Son cadre bati n'a pas beaucoup ete modifie. Par aillaurs, son image a considerablemant change. En fait, salon certains acteurs du devaloppement urbain du centra-ville, notammant las planificateurs municipaux et las promotaurs immobiliers, la rue McGill deviandra lun des principaux axes da developpament du nouveau cantra-ville c'est-a-dire la secteur ou sont amenages la Cite Multimedia at la Quartiar international de Montreal (79). Pour y attirer des evantuals locatairas, les promotaurs da ces nouveaux projats raprennent las arguments de la proximite geographiqua et de la concentration salon lesquals les transactions d'affairas ou le devaloppamant da nouveaux produits necessitant des contacts face face et des echangas informels. II samble qua la voisinaga de la rue McGill se prete bien aux axigences de la nouvella economia. En outra, il appert qua les actaurs da la nouvalla economie apprecient particulidrament las edifices at las quartiers industrials amenages au tournant du xxe siecle (80) pour laur polyvalanca, laur localisation et leurs attributs architecturaux.
Sur un autra plan, on constate un changemant important dans la structure fonctionnalla recante de la rue McGill. Des las premieres anneees de son developpement et de son amenagement, Cette rue accueille peu d'habitants. Cette tendance est aujourd'hui completement renversee depuis que queiques edifices ont ete recycles en habitation et que de nouveaux immeubles residentiels y ant ete eriges. Avec quelques centaines d'habitants qui ont choisi d'y vivre, il s'agit la d'un precedent historique. L'arrivee de cette population a favorise l'implantation de petits commerces de quartier (epicerie, restaurants, services la personne). De plus, la reconversion en 2000, par une societe espagnole, de l'edifice Canadian Express (abandonne depuis plusieurs annees) en hotel de 120 chambres (81) a permis de reintroduire un type d'occupation qui avait fait la renommee de la rue au [XIX.sup.e] siecle.
Au cours des dernieres annees, le redeveloppement de la rue sest fait par le biais d'une requalification et d'une rehabilitation du cadre bati. Rompant avec 'approche des annees 1960 et 1970 qui preconisait la reconstruction de la yule, cette approche urbanistique plus respectueuse du patrimoine urbain demeure toutefois fragile face aux pressions du marche immobilier alimentees par les changements economiques en cours. Est-ce que les caracteristiques de la rue McGill sont compatibles avec le nouveau role quassument desormais les grandes metropoles dans l'economie mondialisee, y inclus Montreal?
Notre hypothese de depart suggerait que le processus de tertiarisation de l'economie modifie le tissu urbain et les formes architecturales. Or, les transformations qui ont marque l'histoire de Ia rue McGill nous apprennent que la tertiarisation ne peut expliquer de maniere entierement satisfaisante les changements de role et de fonction. Des processus plus globaux, qui relevent de (l'histoire locale, notamment le statut industriel et portuaire de Montreal, sont egalement intervenus pour lui donner la forme et la vocation que nous lui connaissons.
Remerciement
Je tiens a ramercier Julie Archambault, geo-cartographe a l'INRS-UCS, da con aide pour la realisation dec tigurec at Julie Duchesne, assistante de rechercha a l'INRS-UCS, pour la recharche effectuee a la Bibliotheque nationale du Quebec at aux archives de la Villa de Montreal, De plus, je remercie las evaluateurs anonymec at Michele Daganais pour leurs commenteires qul ont grandament contribue a ameliorer une premiere version de cat article.
[FIGURE 6 OMITTED]
[FIGURE 7 OMITTED] Tableau 1 Population des quartiers anciens de Montreal (district Montreal Centre), 1861-1911 1861 1871 1881 1891 1901 1911 Montreal-Centre 6 750 5 264 4 635 5 119 4 110 4 245 Quartier Centre 1 424 1 110 827 675 1 094 458 Quartier Ouest 2 831 1 265 842 1 007 439 226 Quartier Est 2 495 2 889 2 966 3 437 2 577 3 561 Source: Paul-Andre Linteau, Histoire de Montreal depuis la Confederation (Montreal: Boreal, 1992), 188.
Notes
(1.) Notons quil faut distinguer la rue McGill de l'avenue McGill College. Situee en plein coeur du nouveau centre-ville de Montreal, l'avenue McGill College -- dont la denomination renvoie a institution d'enseignement a laquelle elle conduit -- a fait l'objet d'un important projet de reamenagement au cours des annees 1980 dans le but d'en faire la principale artere de prestige du nouveau centre des affaires. A ce sujet, voir: Souhila Djiar, Amenagement et dynamique urbaine: Etude du projet McGill College (1984) en rapport avec le mouvement City Beautiful", these en amenagement (Montreal: Universite de Montreal, 1999).
(2.) Nous avons retenu l'annee 1842 comme point de depart etant donne qu'elle correspond a la premiere annee de perution des annuaires Lovell utilises dens cette analyse. La periode se termine avec le dernier grand projet immobilier construit rue McGill avant les annees 1960, savoir l'egrendissament de l'edifice des douanes realise per le gouvernement canadian en 1934.
(3.) A titre indicatif, entre 1870 et 1930, la valeur brute des produits des industries manufacturiers de Montreal passe de 36 a 532 millions de dollars. Jean Delage, "L'industrie manufacturiere", in Esdras Minville (dir.), Montreal economique (Montreal: Fides et H.E.C., 1943), 202.
(4.) Un exercice preliminaire de definition du tertiaire urbain dens la premiere moitie du [XX.sup.e] siecle a fait par des membres du Groupe de recherche sur l'histoire de Montreal. Les activites tertiaires regroupent les services rattaches l'echange et au transport des biens, au transport, a l'eccuell et a l'hebergement des personnes, a l'accumulation et a la gestion des flux et des stocks financiers, a la creation et a la circulation du savoir et de l'information, a la gestion des entreprises, a la gestion de l'Etat, des institutions et des services publics, a la gestion culturelle, a l'education et a la sante et aux soins personnels. L'analyse des donnees des recensements canadiens de 1911 a 1951 montre que, des les annees 1920, plus de 50% de la main-d-aeuvre montrealaise se trouve dens le secteur des services. Recensements du Canada, 1911-51.
(5.) Au sujet de l'evolution des centres-villes entrees annees 1880 et 1950 en Amerique du Nord, voir: Robert M. Fogelson, Downtown. Its Rise and Fall, 1880-1950 (New Haven et Londres: Yale University Press, 2001). Pour une analyse des centres-villas au cours des annees 1950, voir: Michael Johns, Moment of Grace. The American City in the 1950s (Berkeley: University of California Press, 2002).
(6.) Gunter Gad, "Downtown Montreal and Toronto: Distinct Places with Much in Common," Canadian Journal of Regional Science/Revue canadienne de sciences regionales 23, n[degrees] 1-2 (1999): 143-70.
(7.) ibid.: 154
(8.) Ville de Montreal, Le centre ville de Montreal (Montreal: Service d'urbanisme, 1964), 15. Selon cette etude, a l'interieur des limites du centre-ville (borne alors au nord par l'avenue des Pins, a l'est par la rue Saint-Denis, au sud par le fleuve at la canal Lachine et a l'ouest par le rue Guy), la superficie de plancher accoupee per las fonctions urbaines a evolue de la maniere suivante entra 1949 et 1962: -9,8% pour les residences; -5,5% pour las commerces de detail; + 77,2% pour les bureaux; +20,1% pour les proprietes publiques; -2,9% pour l'entreposage et la commerce de gros; -6,6 % pour les industries; -412% pour les stationnements; +18,3 % pour la culture at la divertissement; +28,5% pour les institutions; -54.1% pour les hotels at autres.
(9.) Sur l'importance des activites industrielles dans l'economie de Montreal au [XIX.sup.e] siecle voir la bilan de Paul-Andre Lint eau at de Jean-Claude Robert, Montreal au 19e siecle: bilan dune recherche , Urban History Review I Revue d'histoira urbaine 13, n[degrees] 3 (1985): 206-22.
(10.) France Vanleethem, " Las architectes montrealais face a la commande", in Isabelle Gournay at France Vanleethem (dir.), Montreal Metropole, 1880-1930 (Montreal: Boreal at Centre Canadian d'Architecture, 1998), 85.
(11.) Gunter Gad at Deryck Holdsworth, "Building for city, region, and nation, Office development in Toronto 1834-1984", in Victor L. Russell (dir.), Forging a Consensus. Historical Essays on Toronto (Toronto: University of Toronto Press, 1984), 272-319.
(12.) Madeleine Forget, Las grafte-ciel de Montreal (Montreal Las Editions du Meridien, 1990).
(13.) Jacques Lechepelle, La fantasme metropolitain. L'architecture de Ross et MacDonald (Montreal : Presses de l'Universite de Montreal, 2001), 142-44.
(14.) Isabelle Gournay, "Manifestations du gigantisme au centre-villa , in Gournay at Vanleethem (dir.), Mont real Metropole, 1880-1930, 185.
(15.) Lucien Favreau at Roger Charbonneau, "La finance a Montreal", in Minvilla (dir.), Montreal economique, 277-78.
(16.) Ludger Beauregard, "La rue Saint-Jacques de Montreal: une geographie des bureaux" (Montreal: Universite de Montreal, department de geographia, 1981).
(17.) La rue fut baptisee en 1813 en hommage a James McGill (1744-1813), un des commisseires qui act charge de surveillar las travaux de demolition des fortifications. Celul-ci decede avant Ia fin des travaux. Phyllic Lambert etAlan Stewart (dir.), Montreal, ville fortifiee au XVIIIe siecle (Montreal: Centre Cenadien d'Architecture, 1992), 80. La trace de ta rue McGill reprend partiellement celui d'une petite rue qui longeait la mur ouest des fortitications. Ella est alors connue comma la rue Saint-Augustin ou Saint-Augustine. Ville de Montreal, Les rues de Montreal (Montreal: Meridien, 1995), 328.
(18.) Ibid. Sur la ville fortifiee, voir : Lambert et Stewart (dir.), Montreal, ville fortifiee au [XVIII.sup.e] siecle. Les fortifications sont erigees a partir de 1687. Leur demolition est surtout motivee par le fait que Montreal n'est plus considere, apres 1763, comme une place forte par les autorites britanniques. Des lors, aucun fonds n'est destine a l'entretien ou a la modification des murs. A la fin du [XVIII.sup.e] siecle, les habitants reclament leur demolition "en raison de leur delabrement avance et de l'obstacle qu'ils posent a la croissance de la ville" (Phyllis Lambert, "Le demantelement des fortifications : vers une nouvelle forme urbaine", in Lambert et Stewart (dir.), Montreal, ville fortifiee au [XVIII.sup.e] siecle, 79).
(19.) Ibid., 80.
(20.) Ibid.; Jean-Claude Marsan, Montreal en evolution (Montreal : Fides, 1974), 154-59; Jean-Claude Robert, Atlas historique de Montreal (Montreal : Art Global et Libre Expression, 1994), 86. D'ailleurs, a l'exception de l'amenagement de grands parcs, Montreal a fait l'objet de peu d'interventions urbanistiques majeures au [XIX.sup.e] siecle et au debut du [XX.sup.e] siecle. C'est plus par petits projets et par amenagement a la piece qua l'espace urbain est ramodele. Voir au sujet de l'effet" courtapointe "de Montreal : David B. Hanna, "Montreal, a City Built by Small Builders, 1867-1880", these en geographie (Montreal
: McGill University, 1986).
(21.) Lambert, "La demantelement des fortifications : vers une nouvelle forme urbaine", 80.
(22.) Marsan, Montreal en evolution, 155.
(23.) Robert, Atlas historique be Montreal, 86.
(24.) Ibid., 83.
(25.) Archives de la Ville de Montreal (AVM), "Rapport pour le prolongement de la rue McGill", 24 aout 1837. Dossier rue McGill, R 3375.
(26.) Site Internet da la Ville de Montreal, "La rue McGill", http://www2.ville.montreal.qc.ca/cgi-bin/hall/fiche_rue.cgi?id=40
(27.) H. W. Hopkins, Atlas of the city and island of Montreal, including the counties of Jacques Cartier and Hochelaga (Quebec : Provincial Surveying and Pub. Co., 1879).
(28.) Sur le canal de Lachine voir: Yvon Desloges at Alain Gelly, Le canal be Lachine. Du tumulte des flots a l'essor industrial et urbain, 1860-1950 (Sillery: Septentrion, 2002).
(29.) Cet hopital fut construit par Jean-Francois Charon de la Barre en 1692. II est le premier a accueillir les hommes de la colonie. Son instigateur fonde une communaute appelee les Hospitaliers de Saint-Joseph de la Croix, surnommee aussi les Freres Charon. En 1747, trente ans apres le deces de Jean-Francois Charon, les Soeurs de la Charite prennent le relais de l'oeuvre. Aujourd'hui un petit parc localise au pied de la rue rappelle le role qu'ont joue les Freres Charon dans la developpement du quartier. Quant aux Soeurs Grises, elles relocalisent leur etablissement a proximite du mont Royal en 1871. En 1981, elles ont reintegre leur premiere maison mere qui sert aujourd'hui de centre d'animation et d'accueli. Une rue situee a l'ouest de McGill porte leur nom dapuis 1801.
(30.) Robert Lahaise, Les edifices conventuels du Vieux Montreal (Montreal : Hurtubise HMH, 1980), 517.
(31.) In ibid., 360.
(32.) Communaute urbaine de Montreal, Repertoire d'architecture traditionnelle sur le territoire be la Communaute urbaine de Montreal. Les magasins, les cinemas (Montreal : CUM, 1985), 130.
(33.) Ibid., xvi.
(34.) Marc H. Choko, Las grandes places publiques de Montreal (Montreal : Le Meridien), 65-109.
(35.) Ibid.
(36.) "Montreal Notes", The Canadian Architect and Builder 21 (1907) : 25.
(37.) "Montreal Business Blocks", The Canadian Architect and Builder 22 (1908) : 20.
(38.) Au sujet du boulevard Saint-Laurent, voir : Pierre Anctil, Saint-Laurent. La Main be Montreal (Quebec : Septentrion, 2002).
(39.) En 1845, la loi d'incorporation municipale fait en sorte que le territoire de la ville est redecoupe en neuf quartiers. Robert, Atlas historique be Montreal, 90.
(40.) Avec plus de 16 000 habitants en 1861, le quartier Sainte-Anne est un des plus peuples de Montreal. Traverse par le canal de Lachine et les voies ferrees du Grand Tronc, il attire aussi de nombreuses entreprises manufacturieres. Dans les annees 1860 et 1870, il devient en fait l'un des plus industrialise de Montreal. Bettina Bradbury, Families ouvrieres a Montreal (Montreal: Boreal, 1995), 28; Paul-Andre Linteau, Histoire de Montreal depuis la Confederation (Montreal : Boreal 1992), 76-77.
(41.) La nouveau quartier residentiel bourgeois situe au nord de la rue Sainte-Catherina est amenage a partir des annees 1850 et 1860. Voir a ce sujet Roderick MacLeod, "Salubrious Settings and Fortunate Families: The Making of Montreal's Golden Square Mile, 1840-1895", these en histoire (Montreal : McGill University, 1997).
(42.) Embellissement de Montreal, [III.sup.e] article, Rue McGill", La Guepe, Montreal, 29 mai 1860.
(43.) Contrairement a d'autres arteres du centre de Montreal, la rue McGill n'a pas fait l'objet de mesures d'elargissement, etant donne qu'elle a ete conoue tres large des son amenagement au debut du [XIX.sup.e] siecle. Au sujet des traveux d'elargissement des rues montrealaises at des strategies urbanistiques et foncieres sous-jacentes, voir : Jason Gilliland," The Creative Destruction of Montreal : Street Widenings and Urban (Re)Development in the Nineteenth Century", Urban History Review/Revue d'histoire urbaine 31, n[degrees] 1 (2002) : 37-51.
(44.) Choko, Les grandes places publiques de Montreal.
(45.) Robert, Atlas historique be Montreal, 79.
(46.) Ibid.
(47.) "Montreal", Harper's New Monthly Magazine 79 (juin-novembre 1889) : 92.
(48.) Linteau, Histoire de Montreal depuis la Confederation. 145-46.
(49.) Soulignons que la definition que nous retenons du terme "etage" n'inclut pas le rez-de-chaussee.
(50.) Sur la processus de deconcentration spatiale des activites industrielles a Montreal entre 1850 et 1930, voir Robert Lewis, Manufacturing Montreal (The Making of an Industrial Landscape, 1850 to 1930) (Baltimore : Johns Hopkins University Press, 2000).
(51.) C'est ce dont temoignent les inventaires architecturaux realises par la Communaute urbaine de Montreal at l'inventaire fait par la Ville de Montreal qui se trouve sur le site Internet du Vieux-Montreal (http://vieux.montreal.qc.ca/inventaire/hall_fla.htm).
(52.) Fogelson, Downtown. Its Rise and Fall, 1880-1950, 194.
(53.) "Dominion Block", in The Commercial Sketch of Montreal and its Superiority as a Wholesale Market (Montreal : Chisholm & Dodd, 1868), 22.
(54.) Sur l'architecture commerciale de cette periode, voir Marsan, Montreal en evolution. 234-42.
(55.) Sur l'expression architecturale des changements economiques urbains au [XIX.sup.e] siecle aux Etats-Unis, voir Stuart M. Blumin, The Emergence of the Middle Class (Social Experience in the American City, 1760-1900) (Cambridge: MIT Press, 1989), 93-107.
(56.) "Albion Hotel", in The Commercial Sketch of Montreal and its Superiority as a Wholesale Market, 42.
(57.) Dans son analyse comparative sur le developpement du centre des affaires de Montreal et de Toronto, Gunter Gad fait le constat suivant: "Wholesale establishments in both cities required banks, shipping companies, and other services such as insurance, freight agencies, or customs brokers. Intensively developed sub-areas had been formed by the 1880s, where wholesale end related business clustered not far from the actual/physical port end rail facilities and key institutions such as the federal government's customs houses". Gad," Downtown Montreal and Toronto: Distinct Places with Much in Common" : 147.
(58.) Ces calculs ont ete effectues a partir des repertoires d'architecture traditionnelle de la Communaute urbaine de Montreal.
(59.) Ayant obtenu sa charte en 1852 et appartenant a des Britanniques, le Grand Tronc est alors proprietaire du principal reseau ferroviaire du pays (les premieres lignes reliant Montreal a Portland, Maine en 1853 et a Toronto en 1856). Cette entreprise "occupe une place considerable dans la vie economique montrealaise. C'est l'instrument de distribution des produits importes par les marchands montrealais ou febriques dans la ville" (Linteau, Histoire de Montreal depuis la Confederation, 22). Sur le Grand Tronc, voir: William A. Currie, The Grand Trunk Railway of Canada (Toronto: University of Toronto Press, 1957).
(60.) Lord Thomas George Shaughnessy (1853-1923) a aeuvre au sein de la Compagnie du Canadian Pacifique.
(61.) The Canadian Architect and Builder 15, n[degrees] 1 (1901): 4.
(62.) Guy Pinard, "L'editice du Grand Tronc", La Presse, dimanche le 31 juillet 1988.
(63.) AVM, lettre transmise par Charles Hays, directeur general du Grand Tronc au maire de Montreal et au Conseil municipal (Montreal, 30 saptembre 1897). Dossier rue McGill, R 3375.
(64.) Une analyse preliminaire des donnees des recensements canadiens des annees 1911 a 1951 montre que le secteur des services aux entreprises est tres peu developpe. On peut faire l'hypothese que les entreprises ont recours a leurs ressources internes afin d'effectuer les activites rattachees a ce secteur. C'est le cas, par exemple, des grandes entreprises comme le Grand Tronc qui dispose de ses propres services d'ingenierie, de comptabilite ou encore de publicite. Recensements du Canada, 1911-1951.
(65.) C'est ce que montrent les feuilles de route des evaluateurs qui servent a la realisation du role d'evaluation municipale.
(66.) Les rues etroites et denses de la vieille ville conservent cependant de leur attrait. Par example, apres l'incendie qui detruit son immeuble, le Board of Trade choisit de reconstruire sur le meme emplacement. En 1928, la Banque Royale fait edifier son gratte-ciel rue Saint-Jacques.
(67.) C'est ce que revele la liste des occupants publiee dans les annuaires Lovell.
(68.) France Vanlaethem. "Les architectes montrealais face a la commande", 91.
(69.) Les observateurs de la scene architecturale montrealaise n'etaient pas tous favorables a l'augmentation de la hauteur des edifices tel qu'on le faisait dans plusieurs villes nord-americaines: "Enthusiasm for this kind of largeness of enterprise has carried many cities a long way up in the air; but the man in the street must pay for these things in a congested outlook and deteriorated health". "Montreal Notes", The Canadian Architect and Builder 17, n[degrees]7 (1906): 107.
(70.) Au sujet du developpement des dispositifs techniques et reglementaires visant a proteger des incendies les immeubles et leur contenu au [XIX.sup.e] siecle, voir: Sara E. Wermiel, The Fireproof Building (Technology and Public Safety in the Nineteenth-Century American City) (Baltimore: Johns Hopkins University Press, 2000).
(71.) Cette entreprise est fondee en 1881 par des gens d'affaires montrealais avec l'aide du gouvernement federal. Au debut du [XX.sup.e] siecle, la concurrence prevalent entre le Grand Tronc et le Canadien Pacifique a marque le paysage architectural montrealais et canadien. En effet, les deux entreprises ont finance la construction d'un reseau d'hotels et de gares toutes plus remarquables les unes que les autres. Voir David B. Hanna, "L'importance des infrastructures de transport", in Gournay et Vanlaethem (dir.), Montreal Metropole, 1880-1930, 49-61.
(72.) Madeleine Forget, Les gratte-ciel de Montreal, 88.
(73.) "La nouvelle douane est ouverte au public", Le Canada, mercredi 26 avril 1916.
(74.) Ibid.
(75.) Donald Kerr, Gerald Bloomfield at G. E. Mills, "Le commerce de gros", planche 8, in Donald Kerr et al. (dir.), Atlas historique du Canada (Montreal: Presses de l'Universite de Montreal, 1990).
(76.) Lachapelle, Le fantasme metropolitain. L'architecture de Ross et MacDonald; Gournay et Vanlaethem (dir.), Montreal Metropole, 1880-1930.
(77.) Jean-Pierre Collin et Claire Poitras, "La fabrication d'un espace suburbain: la Rive-Sud de Montreal", Recherches Sociographiques 43, n[degrees] 2 (2002) 275-310.
(78.) Gad, "Downtown Montreal and Toronto: Distinct Places with Much in Common": 153.
(79.) Francois Berger, "La Cite du multimedia connait un developpement fulgurant", La Presse, mardi 14 mars 2000, A-8. Le projet de la Cite du multimedia vise a transformer un quartier industrial laisse a l'abandon depuis plusieurs decennies en un haut lieu de l'economie du savoir. Lance en 1998 par le gouvernement du Quebec, il favorise le regroupement geographique d'entreprises du multimedia avec l'aide financiere de l'Etat.
(80.) Ce paradoxe de la localisation des nouvelles activites economiques dans de vieux espaces et quartiers industriels se retrouve dans plusieurs grandes villes. Voir a ce sujet Joel Kotkin, The New Geography. How the Digital Revolution is Reshaping the American Landscape (New York: Random House, 2001).
(81.) Jean Chartier, "Sept hotels de charme au caeur du Vieux-Montreal", Le Devoir, lundi 13 mars 2000, A-3.