摘要:Dans son dernier livre théorique paru en 2003, Thinking in Education, Matthew Lipman
indiquait qu’en philosophie pour les enfants, nous avons besoin d’une théorie des actes la
pensée, car sans elle le travail, qui attend ceux et celles qui pratiquent cette discipline et
qui ont à cœur de mettre l’accent sur la formation de la pensée en action, risque d’être
sans effet appréciable. Pour faire un pas dans cette direction, il semblait clair à ses yeux
qu’il serait approprié de tenir compte, notamment, des recherches qui ont accordé une
attention aux locutions performatives. Car, ajoutait-il, le langage est, en un sens, une carte
de l’esprit. Dans cet article, je souhaite faire un pas de plus, m’engager dans le chemin
tracé par Lipman, mais en faisant appel cette fois à un linguiste, Gustave Guillaume – et la
science linguistique dénommée psychomécanique du langage - qui a consacré l’essentiel
de ses efforts, en tant que linguiste, à comprendre comment la pensée construit le langage
en se construisant par le langage. Dans un premier temps, j’exposerai les principales
articulations de la théorie de Guillaume concernant le langage, en me concentrant sur les
distinctions qu’il y a lieu d’établir entre la langue (terme proposé initialement par
Saussure en 1916) et le discours (dans sa reconstruction de la théorie de Saussure,
Guillaume a remplacé le terme «parole» par «discours»). Ces deux réalités s’opposent à
plus d’un égard. Ainsi, par exemple, alors que la langue est une chose qu'on emploie, le
discours est le lieu de l'emploi que l'on fait de la langue. De plus, alors que la langue est le
résultat d'une construction qui s'étale sur un espace de temps très long, le discours est un
ouvrage dont le temps de construction est relativement très court. Qui plus est, au
moment où le sujet parlant entre en activité de langage il a devant lui un discours à
construire alors qu'il possède en lui une langue déjà construite. Dans un second temps, en
m’appuyant sur les distinctions préalablement établies, j’examinerai comment ces
différentes articulations prennent forme dans le jeu subtil des articles un et le en français,
en montrant de quelle manière cette catégorie grammaticale représente une variation du
concept qui n’est pas à confondre avec celle que les logiciens reconnaissent habituellement
sous les termes de compréhension et extension du concept. Troisièmement, j’inviterai le
lecteur à imaginer ce qu’il en aurait été du premier roman de Lipman – La découverte
d’Harry Stottlemeier – si ce dernier avait connu la théorie linguistique de Gustave
Guillaume concernant les articles. Cela aurait peut-être conduit Lipman à écrire une toute
autre version de son roman philosophique. Imaginant ce que cela aurait pu donner pour
quelques-uns des chapitres de ce roman, nous tenterons alors de nous mettre dans la peau
du personnage principal – Harry – et de voir comment il aurait pu être conduit, aidé par
ses pairs, à entrevoir que son entreprise de questionnement touchant la pensée propose,
somme toute, un renversement complet dans le monde de l’éducation.
其他摘要:In his last theoretical book published in 2003, Thinking in Education, Matthew Lipman stated that within the Philosophy for Children (P4C) program, we need a theory of thinking, because without it the work that awaits its practitioners and those who focus on the formation of thinking may have no recognized effects. To make progress in this direction, he thought it particularly appropriate to take into account research on performative sentences, since language is in a sense a mind map. In this article, I want to take a step further on the path Lipman paved by appealing to the field of linguistics known as the psychomechanics of language and to linguist Gustave Guillaume, who dedicated most of his research to understanding how thinking constructs language by constructing itself through language. First, I will outline the major points of Guillaume’s theory of language, focusing on his important distinction between “tongue” (after “langue” as proposed by Saussure in 1916) and “discourse” (which, in the reconstruction of Saussure’s theory, he substituted for the latter’s “parole”), which oppose each other in many respects. For example, while tongue is something we use, discourse designates the space in which we use tongue. Further, while tongue is the result of a construction that spans a long period of time, discourse takes a relatively short amount of time to construct. Moreover, when a talking subject enters into language she has to construct discourse whereas she already possesses a constructed tongue. Thus tongue seems like something permanent within thought, while discourse has a superficial, discontinuous character that is alternately present and absent. In short, tongue has the character of something acquired and established deep in thought, in a sustainable and durable manner. In contrast, discourse is not established—it asserts freedom in the face of an instituted tongue. Second, I will examine how these distinctions take shape within the subtle game between the two French articles “un” and “le,” demonstrating how these represent a variation of the concept rather than what logicians typically identify as the comprehension and extension of the concept. Third, I will invite readers to imagine how Lipman’s first philosophical novel, Harry Stottlemeier’s Discovery, might have been different had he known about Gustave Guillaume’s linguistic theory concerning articles. By imagining how some of the book’s key chapters may have differed, I will put myself in the shoes of its main character Harry and consider how he could have been driven, with the help of his peers, to envision the ways in which his questioning endeavour ultimately entailed a complete reversal in the world of education.
关键词:pensée;langage;linguistique;théorie de la pensée;formation de la pensée