D ans les sociétés industrielles et urbanisées, la mise à mort des animaux est reléguée dans un monde éloigné des villes et de la réalité sociale 1 . La délégation progressive de la gestion de cette activité à des appareils spécialisés peut être vue en lien avec « le rapport à la mort, au sexe, à l'aléa, à tout ce que l'homme affronte difficilement sans médiation, et qui, d'après Marc Guillaume 2 , ne serait plus assuré symboliquement à l'intérieur de la société ». Parler des abattoirs, « lieux d'élection du péché de chair » pour Georges Bataille, c'est s'intéresser au rapport qu'entretiennent les sociétés au sang, à la chair, au corps, à la mort. Les abattoirs font ainsi figure de référence symbolique pour quelques analyses en sciences sociales. Mary Douglas 3 s'y réfère lorsqu'elle étudie le sens du souillé et du propre dans nos sociétés. Norbert Elias 4 l'évoque à propos des transformations liées à la « civilisation des mœurs ». Georges Friedmann 5 interroge les transformations du travail, notamment après avoir visité les abattoirs de Chicago 6 .