摘要:Plus qu’un lieu commun, le lien entre ville et homosexualité est devenu l’un des postulats des études gays et lesbiennes, sans que ses présupposés originels et ses implications ne soient réellement questionnés. Or, ce lien ne va pas de soi et sa naturalisation interroge les fondements d’un champ qui s’est constitué par opposition à une vision essentialiste portée notamment par les médecins, puis par les psychiatres. Metropolitan Lovers,second ouvrage publié par Julie Abraham qui est professeure de littérature, permet de dépasser une vision figée et d’éclairer de manière très convaincante cette question à partir de cas empruntés à différentes métropoles américaines et européennes au xixe et au xxe siècles. Cette « histoire culturelle »1 (p. xv) revient sur la construction d’un double imaginaire urbain. D’une part, la légende noire : la ville moderne, descendante de Sodome, serait par essence l’espace du vice et de la dépravation dont l’homosexualité serait l’un des symptômes. Autant d’arguments anciens repris aujourd’hui par les conservateurs américains dans les débats publics. De l’autre, une vision idéalisée : la ville moderne garantirait l’anonymat, la tolérance et la liberté, tout en favorisant l’émancipation, l’individualisation des modes de vie et la maximisation des rencontres, autant d’éléments favorables à la réalisation d’une vie homosexuelle. Ces arguments sur la métropole tolérante se retrouvent aujourd’hui de manière emblématique dans l’« indice gay » créé par Richard Florida2. À cette dystopie et à cette utopie, elle substitue un portrait plus complexe, plus nuancé et plus riche des « identifications croisées de l’homosexualité avec la ville et de la ville avec l’homosexualité […] [identifications] qui ont à leur tour façonné notre compréhension de la modernité »3 (p. xvii). Il s’agit de montrer comment la ville est un espace où les homosexuels doivent négocier leur place et comment l’identification des homosexuels avec la ville est un discours qui participe de la production de l’espace urbain.