首页    期刊浏览 2025年03月12日 星期三
登录注册

文章基本信息

  • 标题:Comportements et représentations face à la dislocation des régulations sociales : L’hyperinflation en Argentine
  • 本地全文:下载
  • 作者:Gabriel Kessler ; Sylvia Sigal
  • 期刊名称:cultures & conflits
  • 印刷版ISSN:1777-5345
  • 出版年度:1997
  • 期号:24-25
  • 出版社:L'Harmattan
  • 摘要:Les coups d'État militaires et l'inflation ont été les deux sources de l'instabilité argentine. Depuis bientôt treize ans, l'Argentine connaît une stabilité politique qui lui a longtemps fait défaut ; rares avaient été les gouvernements assurés de finir leur mandat ; de même, ne faut-il pas oublier qu'il n'y avait pas eu d'alternance politique constitutionnelle de 1928 à 1989. A la différence des pays de l'Est, la démocratisation argentine a consisté essentiellement dans le retrait politique des Forces armées. On peut évaluer aujourd'hui, rétrospectivement, jusqu'à quel point tant la menace permanente d'une intervention militaire que les coups d'Etat effectifs avaient fait obstacle à l'élaboration de stratégies à long terme. Un an ou deux, parfois l'accomplissement d'un mandat présidentiel, circonscrivaient les marges des alliances et des conflits politiques. Ainsi, une conséquence primordiale de la démocratisation a été l'introduction d'un ordre prévisible et, dès lors, l'élargissement de l'horizon temporel de la politique. Cinq ans de stabilité économique peuvent être regardés de manière analogue. Le changement le plus important intervenu pendant le gouvernement péroniste actuel est sans aucun doute la destruction du modèle socio-économique centré sur l'État que le premier gouvernement péroniste avait mis en place au cours des années quarante. Mais il faut également constater la désintégration de ce qu'A. Hirschman a appelé la "matrice socio-politique de l'inflation"1. La stabilité monétaire, introduisant un ordre prévisible, permet aussi l'organisation de stratégies à long terme dans le domaine économique. Nous avons encore trop peu de recul pour faire des hypothèses de longue portée mais la différence entre stabilité politique et stabilité économique est néanmoins évidente. Puisque les Forces armées ne sont plus une menace, la démocratie, en tant que système régulier et prévisible de renouvellement des autorités, a cessé d'être un enjeu pour se muer en une donnée irréfutable du jeu politique. Or il n'est en pas de même pour la stabilité monétaire, malgré cinq années d'inflation contrôlée, proche aujourd'hui de zéro. De façon difficile à définir, le spectre de l'hyperinflation persiste : s'il ne s'agit pas d'une menace immédiate, l'expérience n'en est pas reléguée, pour autant, dans le passé2 , ce qui explique que le chaos monétaire ait pu, à diverses reprises, être utilisée par le gouvernement comme argument politique. La stabilité reste, en effet, un atout politique du gouvernement3 . Inflation et politique L'histoire récente de plusieurs pays latino-américains montre l'étroite relation entre inflation et politique. Le contrôle de processus fortement inflationnistes procure une légitimité politique décisive ou tout au moins des victoires électorales, comme on l'a observé en Argentine, au Pérou, en Bolivie, au Brésil ; par ailleurs, le cas de C. Menem en Argentine et d'A. Fujimori au Pérou suggèrent que les expériences hyperinflationnistes favorisent l'émergence de leaders forts, personnalistes et, dans les faits, socialement autorisés à se comporter de façon autocratique. Enfin, les conséquences de la stabilité sont, pour ainsi dire, instantanées. L'évolution de l'opinion sur le gouvernement suit celle des prix et il suffit de peu de semaines pour modifier les préférences politiques ; l'évolution préélectorale au Brésil et l'élection de F. H. Cardoso, le triomphe du Parti radical argentin en 1985 grâce au succès du plan de stabilisation et sa défaite deux ans plus tard suite à la reprise de l'inflation, en sont l'illustration. Inversement, les expectatives et résultats électoraux ont une influence décisive sur l'économie. On peut conclure ainsi à la nature réciproque, circulaire, du rapport entre macro-économie et micro-politique4 . Inflation et politique ont eu depuis longtemps partie liée. Les gouvernements étaient jugés sur l'évolution des prix incarnée par celle du dollar et la plupart des événements politiques étaient décodés par rapport à leur éventuel impact sur l'inflation par les pronostics de porte-parole spécialisés qui agissaient comme des prophéties créatrices. Des changements de cabinet, des pronunciamientos militaires, des conflits sociaux, influençaient un marché hypersensible disposé à tout traduire en points d'inflation. L'opinion publique avait fini par considérer l'inflation, élevée et chronique, comme l'origine de tous les maux, et son contrôle devint le but principal de tous les partis politiques. Qu'arrive-t-il dans des situations de haute inflation et d'hyperinflation ? Comment comprendre leur influence sur la politique ? Telles seront nos questions de départ. Nous aborderons ce problème d'une part, par l'analyse des comportements individuels à l'égard de l'argent. Nous réfléchirons, en esquissant les traits d'une 'rationalité inflationniste', engendrée par plus d'un quart de siècle d'instabilité monétaire, sur les bouleversements produits par l'accélération de la spirale inflationniste à partir de 1984, puis par l'hyperinflation de 1989. Rappelons tout d'abord qu'il faut différencier qualitativement une hyperinflation de toute inflation, même élevée, car l'effondrement de la monnaie, phénomène propre et spécifique d'une hyperinflation, touche le fondement même des rapports sociaux. La possibilité de prédiction des rapports entre les individus et les biens tend alors à disparaître, l'incohérence des systèmes d'équivalence entre les biens se généralise, l'autorité publique s'évanouit. Cette expérience, unique à plusieurs égards, dissout les bases de la cohésion sociale et désarticule les modalités d'action des acteurs sociaux. Nous essayerons d'autre part d'identifier les modes d'interprétation sociale du choc inflationniste. En effet, la pérennité de l'efficacité politique de l'hyperinflation réside, sans nul doute, dans le souvenir d'une expérience traumatisante qui ne veut pas se répéter. On ne peut cependant affirmer que cette peur soit universellement présente, ou au même degré, ou encore qu'elle entraîne des conséquences univoques et indépendantes du système de sens dans lequel l'hyperinflation s'est inscrite. Basé sur des analyses d'entretiens, de discours politiques et des média, ce travail se propose d'établir la physionomie et la logique interne d'une des modalités d'attribution de sens au chaos monétaire. Nous verrons comment s'est construite, parallèlement à l'aggravation de la crise, une interprétation de l'inflation comme le symptôme d'une société malade, d'une décadence nationale bien plus ancienne, et enfin de la nature égoïste des Argentins. Notons que si on ne peut affirmer que ce furent les seules interprétations mais celles-ci furent sans doute les plus répandues et les plus importantes. D'autres s'y sont greffées lisant dans l'hyperinflation l'expression de l'impuissance intrinsèque de la société argentine, de ses acteurs et de ses institutions, à se donner une organisation viable. Il ne fut pas difficile alors de légitimer à partir du pouvoir un discours selon lequel la débâcle monétaire était la conséquence inévitable d'un type d'organisation sociale et de postuler par conséquent qu'il devait être radicalement transformé.
  • 关键词:crises politiques; pauvreté; économie politique
国家哲学社会科学文献中心版权所有