BL : C'est la première idée de Tarde et la plus ancienne. C'est la chose qu'il a maintenu tout le long et d'ailleurs dès après le premier article - l'année d'après - il l'applique à l'économie. Son deuxième article est sur l'économie. Il a toujours eu cette idée que l'économie est un peu comme la forêt amazonienne : quand les gens arrivent dans la forêt amazonienne, ils croient que la forêt est très riche et qu'elle est enracinée à la façon européenne dans des sols très profonds, alors qu'en fait, comme le montrent les pédologues, la forêt amazonienne est accrochée au ciel en quelque sorte. Il n'y a presque pas de sol, et elle tient par le haut, par la circulation rapide de l'eau, des nutriments, des produits organiques qui circulent à toute vitesse. Si tu coupes la forêt, le sol disparaît aussitôt : elle est pendue par ses branches au ciel et pas enracinée par ses racines dans le sol. L'économie c'est pareil pour Tarde. C'est une métaphore mais Tarde a vu tout de suite que l'économie était en fait inversée. On la plonge dans des infrastructures qui sont supposées très matérielles, alors qu'elle est à l'envers en fait. Elle est vraiment accrochée à ce qu'il appelle « des intérêts passionnés », soit des évaluations de croyances et de désirs.