摘要:Lorsqu’Enée contemple les représentations de la guerre de Troie sur les murs du temple de Junon, lors de son arrivée à Carthage, il voit la Dolonie, l’exploit de Diomède ramenant au camp achéen les chevaux de Rhésos1 ; à côté de cette représentation, le jeune Troïle, tué par Achille, est emporté sur son char2 ; sa lance3 retournée, trace un sillon dans la poussière (uersa puluis inscribitur hasta) : le malheur de Troie, dont le nom même de Troïlos est emblématique4, se trouve ainsi inscrit dans la poussière5. Mais, à quelque temps de là, un des protagonistes raconte la Dolonie à Calypso : il s’agit d’Ulysse qui dessine sur le sable, avec une baguette, sa version de la terrible nuit iliadique du chant 10 : ille leui uirga / in spisso litore pingit opus6. Si le sillon tracé par la lance de Troïle dans la poussière est par nature éphémère, l’opus dessiné avec art par Ulysse (pingit opus) s’inscrit plus distinctement, plus profondément, dans le sable humide du rivage (spisso litore). L’homme d’Ithaque y trace l’itinéraire qu’il dit avoir emprunté pour ramener les chevaux de Rhésos chez les Achéens. L’une et l’autre représentations, ainsi, se répondent. Mais la réécriture métaphorique d’Ulysse est-elle vouée à une postérité plus longue ? Non, car les flots capricieux viennent effacer l’œuvre d’une baguette légère et élégiaque (leui uirga)7, alors que, paradoxalement, le sillon de la lance de Troïlos, fruit d’un hasard funeste, demeure inscrit dans le marbre de Carthage. Et pourtant, les deux textes qui sont le support de ces représentations nous sont parvenus…